Stupéfaction après l’agression mortelle d’une personne en situation d’itinérance

L'attaque au couteau a eu lieu à l'angle de la rue York et de l'avenue University, selon le Service de police de Toronto.
Photo : Radio-Canada
À Toronto, l'agression mortelle d'un homme de 59 ans en situation d'itinérance a créé une onde de stupeur et d'incompréhension. Huit adolescentes sont accusées de l'avoir poignardé à mort. Cette violence inquiète les travailleurs qui œuvrent auprès des personnes sans-abri.
C'est effrayant qu'elles aient pu faire cela. [...] Cela fait peur. [...] Cela ne devrait jamais se produire
, croit la directrice générale de Homeless Connect Toronto, Melody Li.
Les événements violents que les sans-abri subissent ne sont pas nouveaux, mais ne s'essoufflent pas dans la Ville reine, rappellent des intervenants du milieu.
Selon une femme témoin de la scène, l'homme qui a été tué tentait de la protéger des adolescentes.
La résidente de l'hôtel Strathcona, transformé en refuge, explique au micro de CBC News que le groupe de filles l'aurait approchée pour tenter de lui voler son alcool.
Les jeunes suspectes sont âgées de 13 à 16 ans.

Le militant Gaétan Héroux affirme avoir connu plusieurs itinérants qui sont morts à Toronto.
Photo : Radio-Canada / Annie Poulin
Le membre de la Coalition ontarienne contre la pauvreté Gaétan Héroux se désole d'entendre un autre cas de violence mortelle contre cette communauté vulnérable, mais il n'est pas surpris.
Quand j'ai appris que c'était un sans-abri, cela ne m'a pas surpris du tout. C'est même la première chose à laquelle j'ai pensé [...] parce que des histoires comme cela j'en ai connu.
[Les sans-abri] sont plus vulnérables à la violence parce que plusieurs d'entre eux sont dans la rue 24 heures par jour
, affirme Gaétan Héroux.
M. Héroux se souvient de plusieurs cas où une personne en situation d'itinérance a été tuée à Toronto. Ce qui l'inquiète particulièrement, c'est le jeune âge des suspectes et la violence du crime.
Cela perturbe tout le monde de voir que les [suspectes] sont si jeunes.
J'essaie de comprendre pourquoi des filles de 13, 14, 16 ans se seraient trouvées dans une situation où cet affrontement [a eu lieu]. À Toronto, on a une situation où l'itinérance est très visible. Alors, souvent, quand on rencontre des gens dans la rue, on ne comprend pas leur situation
, explique Gaétan Héroux.
La Ville [de Toronto] ne veut pas une histoire où les sans-abri se font tuer dans la rue
, dit celui qui travaille auprès de cette population depuis plus de 30 ans.
J'ai encore beaucoup de questions
, ajoute-t-il.

Deqa Farah, qui travaille auprès de personnes en situation d'itinérance, dénonce avec fermeté les violences qu'elles subissent au quotidien.
Photo : Radio-Canada
C'est extrêmement troublant, surtout si l'on considère l'âge des personnes qui auraient commis ce crime odieux
, pense aussi la directrice du centre Fred Victor, Deqa Farah.
Malheureusement, les agressions et la violence contre les sans-abri sont quotidiennes, mais ce niveau de violence est quelque chose de nouveau et d'inquiétant
, ajoute-t-elle.
La directrice générale de Homeless Connect Toronto, Melody Li, fait le même constat.
Elle dénonce avec la même fermeté les violences et les injustices que subissent perpétuellement les personnes en situation d'itinérance. Ces personnes sont extrêmement vulnérables lorsqu'elles n'ont pas de domicile fixe
, explique-t-elle.
Quand j'ai peur, je vais chez moi et je verrouille ma porte. Quand on ne peut pas se réfugier chez soi, on est exposé à plus de risques
, ajoute Melody Li.
J'étais consternée que des jeunes filles puissent penser qu'il n'y a rien de mal à blesser une autre personne de cette façon et cela m'a vraiment choquée. Ça m'a fait peur.
Comme ses homologues, elle affirme ne pas avoir été surprise de savoir que la victime était une personne en situation d'itinérance. Elle s'inquiète surtout de l'âge des filles accusées d'avoir poignardé à mort cet homme.
Cette histoire jette beaucoup de lumière sur la façon dont nous dépeignons les personnes en situation d'itinérance. Nous ne parvenons pas à enseigner à nos jeunes à avoir de la compassion envers tout le monde
, pense-t-elle.
L'enquête se poursuit
Le Service de police de Toronto en est à reconstituer le fil des événements survenus dans la nuit de samedi à dimanche pour mieux comprendre ce qui s'est produit.
Nous avons parlé aux parents de ces huit individus. Comme vous pouvez l'imaginer, ils étaient choqués, comme s'ils avaient été frappés par un camion
, explique le sergent-détective du Service de police de Toronto Terry Browne.
C'est un appel tout aussi perturbant pour la famille de la personne qui a perdu la vie. Elle ne s'attendait pas à recevoir notre appel
, ajoute-t-il.

Selon le sergent-détective Terry Browne de la police de Toronto, le groupe de jeunes filles a été impliqué dans au moins trois événements dans la nuit de samedi à dimanche.
Photo : Radio-Canada / Meagan Fitzpatrick
Parlez à vos enfants [...] on ne veut pas que cela se répète
, lance le sergent-détective Terry Browne.
Il faut avoir ces conversations pour savoir ce qu'ils font
, pense-t-il.
Selon lui, les huit [filles] étaient ensemble et ont participé conjointement à [cette attaque]
.
En 19 ans de carrière au sein de l'Unité des homicides, je n'ai jamais vu une situation comme celle-ci
, affirme l'agent.
Les suspectes ont comparu devant le tribunal de l'ancien hôtel de ville dimanche et ont été placées en détention provisoire.
Elles doivent comparaître à nouveau le 29 décembre.
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Avec des informations de CBC News