Sommet africain à Washington
Voyant que la Chine a pris de l'avance en Afrique, les États-Unis tentent de rattraper leur retard.

Les leaders africains étaient réunis à Washington avec le président américain Joe Biden.
Photo : La présidence du Ghana
Pendant trois jours, les grandes artères de Washington ont été paralysées à cause d'un sommet qui a rassemblé les chefs d'État de 49 pays africains dans la capitale américaine.
Un sommet qui n'a pas fait la une des journaux américains et qui s'est plutôt déroulé dans une grande discrétion médiatique. Rien à voir avec la visite d'État du président français Emmanuel Macron, début décembre, où l'on a multiplié les discours et les conférences de presse, avant qu'un somptueux dîner d'État ne vienne clore la visite.
Cette semaine, on voulait parler business : l'Amérique souhaite développer un partenariat commercial avec l'Afrique.
Cela faisait huit ans qu'il n'y avait pas eu de sommet États-Unis-Afrique. La dernière rencontre remontait à 2014, sous l'administration de Barack Obama. Pour sa part, Donald Trump n'avait montré aucun intérêt à en organiser une durant son mandat.
Aujourd'hui, les États-Unis veulent se réengager avec les leaders du continent africain : ce sont les mots du président Biden. On courtise le continent, alors que la Chine investit depuis des années des milliards de dollars en infrastructures et que la Russie, également, garde son influence sur le continent. Moscou vient d'ailleurs de signer un accord de coopération sur la sécurité et le renseignement au Mali, autrefois chasse gardée de la France.
L'Afrique a un énorme potentiel, a souligné Joe Biden, notamment dans le secteur agricole, que l'on peut transformer. Le président américain a tendu la main aux 49 dirigeants réunis à Washington; on a parlé de partenariat, d'étendre les marchés et de réduire les barrières tarifaires.
« Nous soutenons l'entrée de l'Union africaine comme membre permanent du G20. »
On reconnaît en coulisse que la Chine a pris de l'avance sur le continent et que Washington tente de rattraper son retard.
Au total, les États-Unis s'engagent à investir 55 milliards de dollars au cours des trois prochaines années pour s'attaquer aux différents défis auxquels fait face le continent africain. Les changements climatiques, les conflits et la pandémie continuent d'avoir un impact sur la crise alimentaire, a soutenu le président américain, en chiffrant à 140 millions le nombre d'Africains qui font face à l'insécurité alimentaire.
« J'annonce un montant additionnel de 2 milliards de dollars destiné à l'assistance humanitaire pour combattre l'insécurité alimentaire. »
Des votes significatifs
Le réveil s'est produit lors des votes à l'Assemblée générale des Nations unies pour condamner l'invasion russe en Ukraine. Sur les 35 pays qui se sont abstenus, 16 étaient des pays africains, dont l'Afrique du Sud, l'Algérie et le Sénégal.
Et lors d'un deuxième vote sur la suspension de la Fédération de Russie comme membre du Conseil des droits de l'homme, 9 pays africains, dont l'Algérie, le Congo et l'Éthiopie, s'y sont opposés, et 19 autres pays du continent, dont l'Afrique du Sud, le Sénégal et l'Égypte, se sont abstenus.
« Le vote africain aux Nations unies sur l'Ukraine était une surprise, mais on ne peut pas attendre que les Africains suivent comme des moutons l'Occident. Chaque pays a des relations, que ce soit avec la Russie, l'Ukraine ou la Chine. »
Durant l'apartheid, les Russes s'étaient rangés du côté africain, et les Africains n'ont pas oublié, renchérit Mvemba Phezo Dizolele, directeur du programme Afrique au Centre d'études stratégiques à Washington.
La Chine, quant à elle, est le principal partenaire commercial de l'Afrique. Depuis l'an 2000, un sommet Chine-Afrique a lieu tous les trois ans. Le dernier remonte au mois de novembre 2021 à Dakar, au Sénégal.
Les Turcs et les Chinois sont omniprésents en Afrique, affirme Mvemba Phezo Dizolele, mais les États-Unis ont des avantages sur le plan technologique et aussi en matière de développement économique. L'avenir est en Afrique, dit-il, où l'âge moyen est de 19 ans, alors qu'en Allemagne, il est de 49 ans et aux États-Unis, de 38 ans.
Je suis là pour écouter
, a conclu Joe Biden en se tournant vers le président de l'Union africaine : Nous avons la volonté de travailler avec l'Afrique, nous avons besoin de vous.