François Legault annonce une augmentation des redevances sur l’eau
Les quantités d'eau prélevées annuellement au Québec par les embouteilleurs et l'industrie seront désormais rendues publiques.

Le premier ministre du Québec, François Legault (à droite) prend la parole à la COP15 alors que le vice-gouverneur chinois de la province du Yunnan, Wang Xiangang, assiste à la conférence sur la biodiversité, à Montréal, le jeudi 15 décembre 2022.
Photo : La Presse canadienne / Ryan Remiorz
Invité à prendre la parole jeudi matin à la COP15 de Montréal, le premier ministre du Québec, François Legault, s’est engagé à déposer dès la prochaine session parlementaire un projet de loi sur la protection de l’eau qui prévoit, entre autres, une hausse des redevances sur l’eau puisée dans la province.
Rappelant aux représentants du monde entier, réunis au Palais des congrès jusqu’à lundi pour discuter de biodiversité, que le Québec dispose de 3 % des réserves d’eau douce de la planète, François Legault a expliqué que la protection de la biodiversité passe inévitablement par la protection de l’eau
.
Dans les prochaines années, les réserves d’eau douce vont devenir de plus en plus précieuses. On doit les protéger.
Qualifiant cette richesse naturelle d’or bleu
, M. Legault a déploré que le Québec ne reçoive pas son dû de la part des grandes industries qui puisent chaque année à très bon marché des milliards de litres dans les réserves d’eau douce de la province.
En 2021, le Québec a reçu moins de 3 millions de dollars pour des prélèvements d’eau de 811 milliards de litres. Ce n’est pas acceptable
, a lancé le premier ministre du Québec, qui a promis de déposer dès la prochaine session parlementaire un projet de loi sur la protection de l’eau.
La première chose qui va être dans ce projet de loi, c’est une hausse des redevances sur l’eau
, a-t-il promis.
Les redevances sur l'eau puisée commercialement au Québec n'ont pas été augmentées depuis 2010.
On va établir un tarif plus équitable, pour éviter les abus. Et pour que notre eau soit payée à sa juste valeur.
Rappelons que le gouvernement Legault avait déjà déposé le 8 juin dernier un projet de loi sur les redevances sur l'eau, mais ce dernier était mort au feuilleton après le déclenchement des élections, à l'automne.
Les Québécois connaîtront enfin les quantités d'eau prélevées

Au Québec, la tarification pour l'utilisation de l'eau est inchangée depuis 2010.
Photo : iStock / Group4 Studio
Au Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE) et chez Eau Secours, on a salué cette annonce du premier ministre, mais en rappelant toutefois que Québec n'a jamais rendu publiques ses données sur les quantités d'eau qui sont prélevées chaque année par l'industrie et les embouteilleurs commerciaux.
Or, le gouvernement Legault ne peut, selon les deux organismes, ordonner une hausse des redevances efficace tout en maintenant le secret autour des données sur l'utilisation de l'eau au Québec.
Ce à quoi le ministre québécois de l'Environnement, Benoit Charette, promet de remédier.
Dans une entrevue accordée à Radio-Canada en marge de l'annonce du premier ministre, M. Charette a déclaré : On veut être plus transparent, ce que nous demandaient le public et plusieurs organismes depuis plusieurs années
.
Actuellement, tout le monde ne rend pas publiques les quantités d’eau prélevées par les utilisateurs commerciaux ou industriels. C’est une donnée qui dorénavant sera rendue publique avec l’adoption du projet de loi.
À partir du moment où les données sont publiques, ça va peut-être mettre une certaine pression constructive sur les entreprises qui utilisent cette eau-là. Peut-être que ça va les inviter à revoir leurs pratiques
, espère le ministre.
Avec plus de 3 millions de lacs et des dizaines de milliers de rivières qui couvrent 10 % de son territoire, le Québec possède 3 % des réserves d’eau douce renouvelable de la planète.
Fonds bleu
En plus d’instaurer une hausse des redevances sur l’eau, le projet de loi de Québec comportera la création d’un Fonds bleu qui sera financé notamment à partir de cette hausse.
Ce fonds va atteindre, à la fin du mandat, 150 millions de dollars par année, et va permettre de financer des projets de protection et de mise en valeur de nos cours d’eau
, a promis François Legault.
Ces fonds seront entre autres consacrés à la lutte contre les espèces aquatiques envahissantes, le nettoyage des berges de rivières, la revégétalisation des bandes riveraines et la mise aux normes des installations sanitaires individuelles.
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Un prix dérisoire
En 2010, les redevances au Québec étaient les plus élevées au Canada, mais aujourd’hui, elles sont jugées dérisoires. Actuellement, les tarifs en vigueur sont de 0,0025 $ par mètre cube (2,50 $ par million de litres) notamment pour les pâtes et papiers et l’industrie minière.
Les embouteilleurs d’eau et les fabricants de béton paient 0,070 $ par mètre cube (70 $ par million de litres). Ce qui est bien en deçà des redevances exigées ailleurs au pays et en Europe.
En Ontario, depuis 2017, il en coûte aux utilisateurs industriels et commerciaux 3,71 $ de redevances par million de litres d'eau. Les installations d’embouteillage qui puisent dans les réserves souterraines doivent quant à elles payer 503,71 $ par million de litres d’eau puisés.
C'est sept fois plus que ce que facture actuellement Québec aux embouteilleurs.