Crise des surdoses : Pierre Poilievre prône le modèle albertain en Colombie-Britannique

Six ans après la déclaration de l’état d’urgence sanitaire provincial pour faire face à ce fléau, six Britanno-Colombiens meurent encore chaque jour d’une surdose.
Photo : Radio-Canada / Ben Nelms
Pour faire face à la crise des surdoses, le chef du Parti conservateur du Canada, Pierre Poilievre, préconise l’adoption du modèle albertain axé sur le rétablissement des toxicomanes, plutôt que sur l’approvisionnement en drogues sécuritaires.
De passage en Colombie-Britannique, le foyer de la crise des surdoses au pays, le chef de l’Opposition officielle du Canada a condamné des politiques du gouvernement Trudeau à différents égards, incluant la crise des opioïdes, mercredi.
Pierre Poilievre a affirmé qu’un gouvernement conservateur mettrait fin au programme de subventions fédéral qui paye des gens pour consommer des narcotiques dangereux
et utiliserait l'argent économisé pour financer des programmes de rétablissement des toxicomanes.
L’Alberta a suivi ce modèle, ce qui lui a permis de réduire de moitié
ses décès liés aux surdoses, selon le chef conservateur.
Après avoir explosé pendant la pandémie, le nombre de morts par surdose d'opioïdes a chuté de 47 % en Alberta entre novembre 2021, son pic, et juillet 2022, le dernier mois dont les données ont été rendues publiques par la province, passant de 174 à 92.
En Colombie-Britannique, ces chiffres ont également diminué pendant cette période, mais à un rythme moins important, passant de 210 en novembre 2021 à 194 en juillet 2022.

Le chef du Parti conservateur du Canada s'est adressé aux médias le 9 novembre à Vancouver, une rare conférence de presse depuis son élection à la tête du parti, le 10 septembre 2022.
Photo : La Presse canadienne / Marissa Tiel
Beaucoup de gens sont insultés
Cette crise et ses solutions sont toutefois bien plus complexes que le portrait qu'en dresse le chef conservateur, soutient le Dr Brian Conway, directeur médical du Centre des maladies infectieuses de Vancouver, qui travaille auprès des démunis du quartier Downtown Eastside.
Il doute que Pierre Poilievre ait pris le temps de se renseigner sur ce dossier et ses subtilités avant sa sortie à Vancouver.
Beaucoup de gens sont insultés. Ils le perçoivent comme une intervention politique sans fondement. C’est une crise qui perdure depuis au moins cinq ou six ans. S’il y avait une solution simple, pensez-vous qu’on le l’aurait pas déjà adoptée?
À lire aussi :
Les situations en Colombie-Britannique et en Alberta sont très différentes, et la crise des surdoses se règle un individu à la fois, dans le contexte où les gens vivent
, explique le médecin. Par ailleurs, la Colombie-Britannique voit sur une base quotidienne des cas difficiles qui leur viennent de l'Alberta, souligne le Dr Conway.
Il n’y a pas de Downtown Eastside, en Alberta, il n’y a pas de ville de tentes, en Alberta. C’est un problème beaucoup plus complexe.

Un homme tient une affiche sur laquelle on lit, en anglais, « Réveillez-vous, nous mourrons », lors d'une manifestation visant à attirer l'attention du public sur la crise des surdoses à Vancouver, en février 2017. (Archives)
Photo : La Presse canadienne / Darryl Dyck
La réhabilitation est bien la clef du succès pour certains, affirme-t-il, mais d’autres voies doivent également être explorées.
Le Dr Conway a, par ailleurs, bon espoir que le nouveau maire de Vancouver, Ken Sim, rallie davantage de monde à la cause pour trouver des solutions novatrices à cette crise.
Deux modèles aux antipodes
Pour Paul Sobey, médecin spécialiste en traitement des dépendances et professeur associé à l'Université Simon Fraser, l’approche albertaine est plus à même de porter ses fruits. Il doute que d'essayer de supplanter l’approvisionnement en drogues pour le rendre plus sécuritaire soit efficace.
On ne va jamais combattre les vendeurs de drogue [...] Cette histoire de drogues toxiques et sécuritaires, c’est une guerre des drogues.
La Colombie-Britannique a également décidé d’opter pour la décriminalisation de petites quantités de drogues, une première au pays. La mesure entrera en vigueur en janvier 2023 grâce à une exemption de Santé Canada.
L’idée est de déstigmatiser les toxicomanes pour les encourager à aller chercher de l’aide, tout en maintenant illégale la vente de ces drogues.
En Alberta, le gouvernement de Jason Kenney s’était opposé à cette mesure, qui aurait, selon lui, augmenté le trafic de drogues et augmenté la criminalité et les incidents liés aux surdoses.