L’agrile du frêne, un fléau bien installé dans le Nord de l’Ontario

L'agrile du frêne se nourrit exclusivement des différentes espèces de frênes.
Photo : getty images/istockphoto / yod67
Le musée Science Nord a dû se résigner à couper une douzaine de frênes sur son terrain cette semaine, en raison d’une infestation d’agriles du frêne, un insecte envahissant ravageur qui est maintenant bien installé dans tout le Nord de l’Ontario.
L’insecte d'origine asiatique, qui se retrouve un peu partout en province, est bien souvent synonyme d’une peine de mort pour les frênes, qui servent de lieu de reproduction et de propagation pour l’insecte. Ce processus est rapidement fatal pour l’arbre infecté.
Meghan Mitchell, qui est scientifique à Science Nord, concède que le sort de ces arbres était difficile à éviter.
Pour éviter que l’insecte ne se propage encore plus, nous avons été forcés de les abattre,f malheureusement
, explique-t-elle.
Mme Mitchell affirme que le frêne rouge, l'espèce d’arbre qui a été coupée à Science Nord, peut aussi être retrouvé autour du lac Ramsey et du lac Laurentien.
Ces arbres aussi sont en danger selon elle, car l’insecte s’attaque spécifiquement à cette espèce
.
Selon Mme Mitchell, les arbres qui sont tombés devraient être remplacés au printemps prochain, mais nous n’allons pas planter des frênes, nous pensons plutôt planter des érables
, explique-t-elle.
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Un insecte qui a été amené par les humains
Isabelle Aubin, chercheuse scientifique au Centre de foresterie des Grands Lacs, affirme que l’agrile du frêne est maintenant bien établi dans toutes les régions du Nord de l’Ontario.
L’insecte a tout d’abord été introduit au Canada dans le sud de la province, pour ensuite être amené dans le Nord de l’Ontario à l’aide de gens qui amenaient du bois de chauffage à leur chalet
, explique-t-elle.
Elle affirme que dans le nord-est, cette arrivée s’est faite surtout via la route 17 depuis Ottawa, jusqu’à la région de Sault-Sainte-Marie.
Pour le nord-ouest de l’Ontario, la propagation s’est plutôt faite via des personnes qui arrivaient des États-Unis avec du bois.
Mais heureusement pour les forêts du Nord de l’Ontario, le frêne, que ce soit la variété rouge ou noire, n’est pas une essence dominante dans de larges pans de la forêt boréale.
On retrouve surtout le frêne rouge dans des milieux urbains puisqu’il a été planté là, alors qu’on trouve les deux types de frênes surtout autour des cours d’eau
, affirme Mme Aubin.
Mme Aubin estime que le taux de fatalité des arbres touchés est de plus de 99 %. C’est presque du jamais vu qu’un arbre mature puisse survivre
, dit-elle.
En pondant ses œufs dans l’écorce du frêne, la femelle et les larves vont faire en sorte que la circulation des nutriments va être fortement ralentie, ce qui peut être fatal très rapidement, surtout lorsque des sécheresses arrivent
, explique-t-elle.
SI un arbre est infecté, celui-ci pourrait mourir en l’espace de 5 à 8 ans, mais dans certains cas, affirme-t-elle, les frênes peuvent mourir en deux ans
.
Des ravages et de l’espoir
Depuis la détection de l’insecte en 2002 dans la région de Windsor, peu de solutions ont été trouvées pour lutter efficacement contre l’agrile du frêne.
Selon Isabelle Aubin, si certaines techniques comme un traitement préventif avec l'injection d'un biopesticide ou encore le relâchement de certaines guêpes parasitoïdes de l’agrile ont obtenu du succès, ce ne sera pas suffisant pour enrayer la progression de l’insecte.
Je crois que le frêne mature va disparaître de nos paysages à moyen terme
, explique-t-elle.
Mme Aubin croit toutefois que tout n’est pas perdu pour le frêne au pays, qui pourrait malgré tout survivre d’une certaine façon.
Le frêne va survivre, peut-être sous forme d’arbuste pour le moment, parce que c’est une espèce qui a malgré tout une bonne vitalité végétative. Cela signifie que très souvent, de nouveaux arbres vont pousser à partir d’un arbre qui est tombé
, explique-t-elle.
Les recherches sont encore à leurs débuts à cet effet, mais pour les jeunes arbres qui repoussent des restes d’un arbre affecté par l’agrile, on voit que les jeunes tiges sont capables d'un certain niveau de résistance. Ils peuvent survivre à plusieurs attaques de l'agrile malgré leur petite taille
, ajoute-t-elle.