Quand un loyer à 775 $ par mois devient une chambre à 105 $ la nuit sur Airbnb

De plus en plus de chambres sont offertes au centre-ville de Chicoutimi sur la plateforme Airbnb.
Photo : Radio-Canada / Gilles Munger
D'anciens locataires déplorent que les logements qu'ils louaient à Chicoutimi deviennent des chambres à louer sur la plateforme Airbnb, alors que la crise du logement se fait sentir et que les loyers sont rares.
Étienne Landry-Désy vient tout juste d'emménager dans sa propre maison. Il y a quelques semaines encore, il habitait dans un appartement de Chicoutimi qu'il payait 775 $ par mois. Il y a passé près de deux ans.
C'est un logement qui est bien situé à proximité du centre-ville, de tous les services qui a une dimension intéressante pour une famille de trois ou quatre personnes
, a-t-il commencé par raconter.
Mais l'immeuble a été vendu peu avant le déménagement et l'appartement est maintenant disponible sur la plateforme Airbnb où il est possible de le louer pour 105 $ la nuit au tarif régulier. Cette façon de faire s'inscrit dans le modèle d'affaires des nouveaux propriétaires.
C'est aussi un endroit intéressant pour les touristes, je comprends le principe. Mais de voir que ça part pour de la location court terme, puis que ce n'est plus disponible pour une famille qui voudrait venir ici dans la région pour mettre l'épaule à la roue, pour contribuer à notre société ou pour une jeune famille qui se cherche un endroit aujourd'hui, bien c'est dommage, puis c'est fâchant
, a poursuivi Étienne Landry-Désy.
Une demande pour partir
David Tremblay est fâché lui aussi. Il habite dans un autre immeuble de Chicoutimi qui appartient aux mêmes propriétaires. Ils lui ont offert 1500 $ et le remboursement de ses frais de déménagement pour qu'il quitte le logement.
Ils m'ont demandé de partir, complètement
, s’offusque-t-il encore.
Ce dernier aurait pu contester auprès du Tribunal administratif du logement, mais il a consenti à partir. Sa décision a été influencée par le fait que l'appartement au-dessus du sien a déjà été converti en Airbnb. Certains voyageurs de passage sont bruyants.
L'homme déplore que la location court terme entraîne le retrait du marché de certains appartements. Ce sera vraisemblablement le cas de celui qu'il habite depuis un an.
La situation est inacceptable à ses yeux, alors que le taux d'inoccupation atteint 1,7 % à Saguenay
Avant, tu avais un divan ou une chambre d’ami, bien aujourd’hui, mets-là sur Airbnb. Maintenant, c’est des hôtels. C’est quasiment une agence d’hôtellerie. Ils ont des employés qui font le ménage. C’est rendu une business
, a-t-il dénoncé.
Joint au téléphone par Radio-Canada, l'un des propriétaires a refusé une demande d'entrevue.
Des pouvoirs limités
Acheter un immeuble de quatre logements et moins pour y faire de la location court terme n'a rien d'illégal à Saguenay. Il suffit d'obtenir un permis d'hébergement touristique. Depuis 2019, la Ville en a émis 46. Les propriétaires non conformes peuvent recevoir une amende allant de 250 à 500 $.
Les pouvoirs des villes en général à travers le Québec sont assez limités là-dedans dans le sens où on peut faire quelques règlements pour circonscrire des secteurs, manifestement des types d'habitations aussi, mais les règles du gouvernement provincial autorisent ce type d'hébergement touristique
, a détaillé Dominic Arseneau, porte-parole de Saguenay.
D’après un reportage de Mireille Chayer