Stephen Lecce impose une convention collective aux travailleurs en éducation

Le ministre de l'Éducation, Stephen Lecce, se dit déçu que le syndicat n'ait pas accepté la dernière offre.
Photo : CBC/Evan Mitsui
Le ministre de l’Éducation de l’Ontario a déposé lundi un projet de loi qui impose une convention collective aux travailleurs de soutien en éducation pendant quatre ans. Si le projet de loi est adopté, il rendra illégale la grève de vendredi. Le Syndicat canadien de la fonction publique de l’Ontario (SCFP) assure qu’il ne reculera pas.
Le texte prévoit d’appliquer la dernière offre présentée dimanche par le gouvernement.
Le ministère propose des hausses annuelles de 2,5 % pour les syndiqués qui gagnent moins de 43 000 $ par année et de 1,5 % pour les autres syndiqués (comparativement à son offre initiale de 2 % pour les employés dont le salaire est inférieur à 40 000 $ et de 1,25 % pour les autres).
Le SCFP continue à réclamer des augmentations de 11,7 %.
Les élèves sont enfin de retour en classe et ont commencé leur rattrapage après deux années de perturbations causées par la pandémie. Nous sommes déçus de voir que le SCFP refuse tout compromis
, indique le ministre Stephen Lecce par communiqué.
Le gouvernement ferme aussi la porte à toute autre négociation avec les syndiqués du SCFP cette semaine. En revanche, les discussions se poursuivront avec les autres syndicats du secteur de l’éducation.
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Le gouvernement veut aussi empêcher la grève prévue pour vendredi et a déjà inclus dans son texte de loi la disposition de dérogation, communément appelée clause dérogatoire
, de la Charte canadienne des droits et libertés.
Si nous n’agissons pas aujourd’hui, si nous n’avions pas présenté ce projet de loi cet après-midi, il y aurait une grève ce vendredi. Il y a des parents dans cette province qui demandent que le gouvernement soit de leur côté, que nous disions que c’est assez
, a insisté le ministre de l’Éducation qui ajoute qu’il aurait préféré un accord négocié.
La disposition de dérogation permet à tout premier ministre provincial ou fédéral qui l’invoque de soustraire une loi à tout recours judiciaire fondé sur certains droits inclus dans la Charte, notamment la liberté d’expression, et ce, pendant cinq ans.
En d’autres mots, cela protégerait le gouvernement de toute poursuite judiciaire de la part du syndicat même si le droit de grève est protégé par la Charte.
Le syndicat prêt à faire la grève malgré tout
Vendredi, peu importe ce que ce texte de loi dit, nos membres vont manifester dans toute la province. Cela signifie qu’aucun syndiqué ne sera au travail. Nous allons au contraire soutenir l’éducation publique
, a annoncé le président du SCFP, Fred Hahn.
Cependant, cette décision ne vient pas sans conséquence. Le projet de loi du gouvernement Ford prévoit des amendes pour les syndiqués qui décideraient tout de même de débrayer vendredi. Ces amendes pourraient s'élever à 4000 $ par jour pour un employé et à 500 000 $ par jour pour le syndicat.
Il y aura des conséquences : nous avons été très clairs avec nos membres à ce sujet. Mais il y aura aussi des conséquences si nous ne nous battons pas. Notre syndicat soutiendra financièrement ceux qui recevront des amendes
, a affirmé la présidente du Conseil des syndicats, Laura Walton.
La convention collective de ces travailleurs de l'éducation est échue depuis le 31 août.
Plusieurs soutiens au syndicat
Plusieurs ont toutefois témoigné leur soutien aux syndiqués.
Les travailleuses de l’éducation, qui font à peine quelques dollars de plus que le salaire minimum, on veut leur enlever le droit d’aller en grève. Un droit pour lequel tous les travailleurs et travailleuses de l’Ontario ont travaillé très fort. Quand il y a un conflit, la travailleuse n’a pas beaucoup de choix si ce n’est retirer son travail
, a déclaré en Chambre la députée néo-démocrate de Nickel Belt, France Gélinas.
La Fédération des enseignants-enseignants des écoles secondaires de l'Ontario, qui représente 60 000 travailleurs en Ontario, dénonce aussi une atteinte aux droits
des syndiqués, mais précise être toujours en négociation avec le gouvernement pour sa propre convention collective.
L’Association canadienne des libertés civiles affirme que la clause dérogatoire n’a pas été prévue à cet effet. C’est un mauvais usage, un flagrant irrespect des droits individuels et c’est dangereux pour notre démocratie constitutionnelle
, peut-on lire dans son communiqué.
Déjà vu?
L'ancien gouvernement libéral de Dalton McGuinty avait imposé en 2012-2013 un contrat de travail aux enseignants qui refusaient d'accepter un gel salarial.
Après une contestation judiciaire de la loi 115, les syndicats d'enseignants avaient toutefois obtenu gain de cause devant la Cour supérieure en 2016.