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L’accès à l’information accuse des retards inquiétants au Québec, selon la Commission

Des documents copieusement caviardés sont consultés par une femme.

Au Québec, le délai de traitement moyen d'une demande d'accès à l'information est de 24 jours, soit plus que ce que prévoit la loi, selon une étude menée auprès de 33 organismes.

Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers

Au Québec, les réponses aux demandes d'accès à l'information excèdent fréquemment les délais prescrits par la loi, « un problème important », selon la Commission d'accès à l'information, qui a mené une étude auprès d'une trentaine d'organismes.

Rendu public cette semaine, le rapport collige les données fournies par 33 organismes : ministères, municipalités, hôpitaux et services de police. L'étude couvre la période 2018-2021, soit avant et durant la pandémie de COVID-19.

La Commission y dresse 25 constats. Le premier va comme suit : le délai de traitement moyen d'une demande d'accès à l'information – hors pandémie – est de 24 jours. C'est plus que ce que prévoit la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels.

À compter de la date de réception d'une demande, un organisme dispose de 20 jours civils pour fournir une réponse.

Un délai supplémentaire de 10 jours civils maximum est possible, auquel cas l'organisme doit en aviser le demandeur par écrit.

Il ne s’agit pas d’un délai supplémentaire automatique, prévient la Commission, pour qui le portrait qui émerge de cette étude a de quoi inquiéter.

Bien des organismes affichent un délai de traitement moyen supérieur à 20, voire à 30 jours, qui se traduit par un dépassement du délai de 20 jours pour environ 30 % des demandes.

Une citation de Avoir accès en temps utile : portrait des délais de traitement des demandes d’accès au Québec

Le cancre du groupe est le ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur (MEES) : 80 % des demandes d'accès y ont été traitées hors délai. Le Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) de l'Est-de-l'Île-de-Montréal et l'Hôpital général juif le suivent de près.

Jean-François Roberge, ministre de l'Éducation dans le précédent gouvernement de François Legault, est désormais responsable de l’Accès à l’information et de la Protection des renseignements personnels. Contacté par Radio-Canada.ca, le cabinet de M. Roberge affirme qu'il prendra le temps d'analyser l'étude et l'ensemble des recommandations.

Les retards dans l’obtention de documents comportent de réelles répercussions sur la population, précise la Commission. Par exemple, une indemnisation d’assurance peut être retardée à cause d’un rapport d’accident manquant; le public peut être informé tardivement d’un problème environnemental en raison d’un délai dans le traitement de la demande d’un journaliste.

Pour assurer le respect des délais légaux de réponse, la Commission d'accès à l'information réitère la recommandation, faite en 2011 au gouvernement du Québec, de prévoir des conséquences pour les organismes qui traînent la patte.

Elle recommande aussi qu'un organisme ait le fardeau de démontrer les circonstances exceptionnelles en vertu desquelles il n'a pu répondre dans le délai de rigueur prévu.

Autre recommandation faite au gouvernement de la Coalition avenir Québec (CAQ) : améliorer la reddition de comptes en matière d'accès à l'information.

Des 3000 organismes assujettis à la Loi sur l'accès, seuls les ministères et les organismes gouvernementaux doivent annuellement rendre des comptes sur le traitement des demandes d'information.

D'autres catégories d'organismes en sont exemptées : les centres hospitaliers, les établissements scolaires, les villes et les ordres professionnels.

Or, la transparence peut témoigner de la santé d'une société démocratique, dit la Commission qui recommande que tous les organismes publics (assujettis à la loi) soient obligés de lui fournir des données. Et ce, dans une base de données unique. Car, pour le moment, les données disponibles sont disparates et difficiles à comparer, ce qui complique la tâche pour évaluer l'état du système d'accès à l'information.

Une bonne nouvelle dans ce flot de critiques : le quart des organismes ayant participé à l'étude affiche une bonne performance en matière de respect des délais. Ils ont en commun d'avoir instauré la gestion numérique de leurs documents, d'avoir structuré leurs processus, d'avoir de bonnes pratiques de communication et d'avoir nommé un responsable des demandes d'accès qui a une position stratégique au sein de l'organisme.

Une pile de documents caviardés.

« Bien des organismes affichent un délai de traitement moyen supérieur à 20, voire à 30 jours, qui se traduit par un dépassement du délai de 20 jours pour environ 30 % des demandes », selon l'étude intitulé « Avoir accès en temps utile : portrait des délais de traitement des demandes d’accès au Québec ».

Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers

Un nombre historique de demandes de révision

La Commission a reçu un nombre historique de demandes de révision pour motif d’absence de réponse dans les délais légaux. Depuis deux ans, celles-ci représentent près du tiers de l’ensemble des recours de ce type.

En clair, lorsqu'un demandeur n'obtient pas de réponse d'un organisme dans les délais légaux, cela équivaut à un refus, selon la loi. Il peut donc déposer une demande de révision auprès de la Commission dans les 30 jours civils à compter de l'expiration du délai de réponse.

La Commission envoie alors une lettre à l'organisme en cause, lui enjoignant de produire sa réponse. Dans la très grande majorité des cas, cette réponse est transmise peu après, sans démarche supplémentaire.

Effets néfastes de la pandémie

En matière de dépassement des délais de réponse, la pandémie n'a rien arrangé, notamment en raison du passage au télétravail qui a eu un impact majeur sur le traitement des demandes.

Pendant la première année de la crise sanitaire, les délais de traitement ont augmenté chez environ la moitié des organismes publics, et particulièrement chez ceux qui traitent un grand volume de demandes.

Globalement, le délai de traitement moyen s’est approché de 30 jours; le tiers des organismes [soit deux fois plus que les années précédentes] ont aussi déclaré un délai de traitement moyen dépassant les 30 jours.

Bien qu’elle reconnaisse également le problème de complexité croissante des demandes mentionné par les organismes, qui n’est pas nécessairement dû à la pandémie, la Commission estime qu’il leur appartient de faire les démarches nécessaires pour éviter le dépassement des délais.

Une citation de Avoir accès en temps utile : portrait des délais de traitement des demandes d’accès au Québec

Une loi qui date

Considérée comme avant-gardiste au moment de son adoption en 1982, la loi a grand besoin d'une refonte, selon la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) qui la réclame instamment. Les problèmes constatés par la Commission existent depuis de nombreuses années, déplore la journaliste Marie-Ève Martel, vice-présidente de la FPJQ, dans l'infolettre hebdomadaire de la Fédération.

L'amélioration de la loi, et conséquemment du système québécois d'accès à l'information, est d'abord et avant tout une question de volonté politique. Malheureusement, l'accès à l'information est souvent relayé bien bas dans la liste des priorités.

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