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La crise climatique au service du recrutement de l’armée

Le centre de recrutement des Forces armées canadiennes à Ottawa.

Il y a plus de 10 000 postes à pourvoir dans les Forces armées canadiennes, selon la plus récente estimation.

Photo : La Presse canadienne / Justin Tang

Les Forces armées canadiennes (FAC) sont aux prises avec une pénurie de main-d'œuvre sans précédent. Il manque environ 10 000 militaires, soit environ 10 % de l'effectif total. Pour attirer des milliers de recrues, la ministre de la Défense se tourne vers un nouveau combat : la lutte contre les changements climatiques, qui fait office d'argument de vente auprès des recrues potentielles.

Le Collège militaire royal de Saint-Jean-sur-Richelieu, au Québec.

Le Collège militaire royal de Saint-Jean est le seul établissement post-secondaire du Québec à former de futurs officiers des FAC. (Archives)

Photo : Radio-Canada

Nous sommes samedi matin. Rien n'est laissé au hasard au Collège militaire royal de Saint-Jean-sur-Richelieu (CMR) : cet établissement militaire ouvre ses portes à tous les curieux qui pourraient être tentés par une carrière au sein de l’armée. Les groupes qui défilent sur le campus sont principalement composés de jeunes en quête d’un projet pour poursuivre leurs études.

Au milieu du groupe, un homme sort du lot. Il s'agit de David Guité, 39 ans, qui rêve d'entrer au Collège et de devenir militaire.

Moi, ça m'impressionne depuis que je suis tout petit. C'est un rêve de petit garçon.

Une citation de David Guité
David Guité sourit pour la photo.

Ce ne sont pas les missions de guerre qui motivent David Guité à s'enrôler.

Photo : Radio-Canada

David Guité a décroché avant la fin du secondaire et a fait carrière dans le domaine de la construction. Il a maintenant quitté son emploi et a déménagé avec sa conjointe de sa grande maison en Gaspésie pour occuper un petit appartement à Saint-Hubert en attendant de finir ses études et de s'enrôler dans l'infanterie.

[...] Aller aider des sinistrés, participer au sauvetage de familles prises dans des régions qui n’ont pas d'aide, j'aimerais ça pas mal plus que la guerre.

De nombreuses occasions

C'est le type de recrues qui arrive à point nommé pour la ministre de la Défense, Anita Anand. Il y a plusieurs raisons pour lesquelles on peut choisir les Forces, par exemple l’ouragan Fiona ou les feux de forêt. Tout le monde, les jeunes et les plus vieux, veut avoir des possibilités, répond la ministre lorsqu’on lui demande comment elle compte s’y prendre pour rendre l’armée plus attrayante.

En 2010, les FAC ont lancé l'opération LENTUS, dont la raison d'être consiste à répondre aux besoins de la population canadienne lors de catastrophes naturelles, comme cela a récemment été le cas lors du passage de l'ouragan Fiona.

Deux soldats regardent les débris laissés par la tempête post-tropicale Fiona.

Des membres des Forces armées canadiennes de St. John's constatent les ravages causés par l'ouragan Fiona à Burnt Island, à Terre-Neuve. (Archives)

Photo : La Presse canadienne / Frank Gunn

D’ailleurs, les soldats sont de plus en plus souvent amenés à participer à des missions d’aide dans le cadre de cette opération qui a donné lieu à 38 déploiements, dont sept en 2021.

Mission à redéfinir

La lutte contre les changements climatiques semble être sur toutes les lèvres lorsqu’il est question de recrutement. La majore générale Lise Bourgon, qui a pour mission de regarnir les rangs des Forces armées, n'hésite pas à dire que l’aide aux sinistrés lors de catastrophes naturelles est une des raisons d’être de l’organisation, tant au pays qu’à l’étranger. Elle-même se remémore son expérience à remplir des sacs de sable lors d’inondations à Halifax comme un des souvenirs les plus satisfaisants de sa carrière militaire.

Les FAC misent également sur un nouveau programme spécialisé en sécurité climatique qui verra le jour en 2024 au Collège militaire royal de Saint-Jean-sur-Richelieu. C'est une combinaison des sciences climatiques avec de la géopolitique, explique Bruno Charbonneau, directeur du Centre sur la gouvernance sécuritaire et de crise (CRITIC) au Collège militaire royal de Saint-Jean-sur-Richelieu.

Lui-même a étudié au Collège dans les années 1990. [À l’époque], l’argument de vente était l'idée du soldat de la paix. C'était l'âge d'or des missions de maintien de la paix, raconte-t-il.

Bruno Charbonneau, professeur au Collège militaire royal de Saint-Jean.

Bruno Charbonneau, professeur au Collège militaire royal de Saint-Jean

Photo : Radio-Canada

Bruno Charbonneau croit que la réponse à la crise climatique doit aujourd'hui faire partie de l'argument de vente des Forces armées. C'est inévitable qu'on va faire des intéressés. En tout cas, du point de vue d'Ottawa, le fait qu'ils approuvent le programme reflète aussi les besoins des Forces canadiennes tels qu'il les perçoivent eux-mêmes.

L'importance de l'armée

Et les besoins ne se limitent pas aux opérations en territoire canadien. Lors de son sommet en 2021, l’OTAN s’est positionnée comme l’organisation internationale désireuse d'établir l'ordre du jour en matière de sécurité climatique.

Le Canada a alors annoncé son intention d'être l'hôte d'un centre d'excellence en la matière. Ce centre, qui sera basé à Montréal, doit ouvrir ses portes l’an prochain. Si on met tout ça ensemble, je pense qu'on pourrait revoir, penser ou repenser ainsi que redéfinir pour ajuster la mission des Forces, ajoute-t-il.

Le général à la retraite Andrew Leslie, qui a été chef d'état-major de l'armée de terre et qui a siégé comme député libéral à Ottawa, est sceptique face à ce virage. Depuis plusieurs années, il est très critique à l’endroit des gouvernements qui promettent des déploiements ou l’envoi d’équipement militaire sans assurer la pérennité des ressources humaines et militaires.

Au gouvernement libéral, ce sont des pacifistes. Ils ne comprennent pas l'utilité des Forces.

Une citation de Andrew Leslie, général à la retraite et ancien député fédéral libéral

Selon lui, la guerre en Ukraine doit servir de rappel au gouvernement quant à l’importance de son rôle de force de défense. Le rôle fondamental de l'armée canadienne et de toutes les armées de l'OTAN, comme on le voit aujourd'hui avec ce qui se passe en Europe, c'est d'être prêtes à se battre contre un ennemi.

Mission no 1 : recruter

Plus tôt ce mois-ci, le chef d'état-major des Forces armées canadiennes, le général Wayne Eyre, a ordonné à ses troupes de faire du recrutement une priorité, et ce, même au détriment d'autres activités jugées non essentielles.

Une nouvelle campagne de recrutement sera lancée au début de 2023. En moyenne, le ministère de la Défense nationale dépense de six à huit millions de dollars par année pour mener des campagnes de promotion liées au recrutement dans les FAC.

Avec la collaboration de Marie Chabot-Johnson

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