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Changement climatique : des décisions courageuses vont devoir être prises

Michelle MacInnis ramasse des débris.

Michelle MacInnis ramasse des débris sur sa propriété près de Merigomish dans le comté de Pictou en Nouvelle-Écosse.

Photo : La Presse canadienne / Darren Calabrese

Radio-Canada

Chaque événement météorologique extrême force la main des communautés. Elles devront prendre des décisions de plus en plus implacables pour se protéger contre les assauts de la nature, affirme un climatologue interrogé quelques jours après le passage de l’ouragan Fiona sur le Canada atlantique.

Fiona, avec des vents d’ouragan qui ont parfois dépassé les 170 km/h, a secoué samedi l’Île-du-Prince-Édouard, les Îles-de-la-Madeleine, le sud-est du Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve. Elle a causé à travers la région dégâts, dommages, inondations et pannes d’électricité qui devraient persister jusqu’au début octobre.

On tire de plus en plus de leçons d’événements tels que Fiona, a dit Alain Bourque dans une entrevue mercredi au Téléjournal Acadie. Mais c'est comme si les politiques publiques étaient quelque chose comme 10 ans en arrière par rapport à l'ampleur des changements climatiques qui se matérialisent sous nos yeux un peu partout.

Alain Bourque avec des écouteurs, devant un micro dans un studio de radio.

Alain Bourque (archives)

Photo : Radio-Canada / Olivier Lalande

Climatologue et météorologue ayant longtemps travaillé à Environnement Canada, M. Bourque est aujourd’hui directeur général d’Ouranos, un organisme à but non lucratif. Ce consortium basé au Québec se décrit comme un pôle d'innovation et de concertation pour une société plus résiliente et mieux adaptée à un climat en constante évolution.

Chaque tempête de cette envergure alarme les élus, mais on part de loin, dit-il. On prend des décisions de plus en plus courageuses en lien avec la gestion des zones côtières qui sont de plus en plus à risque, mais ce n'est pas encore assez, estime M. Bourque.

La majorité des décideurs ont de la difficulté à imaginer ce qui s'en vient au cours des prochaines décennies, et ça va être pire.

Une citation de Alain Bourque, météorologue et climatologue, directeur général d’Ouranos

Pas de raison pour s'installer près des côtes

Selon Alain Bourque, aussi démoralisant que cela puisse être, il n’y a plus vraiment de raisons rationnelles, en 2022, pour s’installer sur le bord de l’eau, dans une zone inondable. Ou même dans des zones qui ne sont pas à risque, mais qui sont proches des zones à risque, ajoute-t-il.

Il faut prévoir pour un futur qui est déjà à nos portes, prévient-il : C'est évident que les zones qui sont proches à risque vont devenir à risque.

La perception des gens, qui depuis toujours tendent à converger vers les cours d’eau, est tenace, admet-il. Les gens sont habitués à vivre proches des zones côtières, reconnaît M. Bourque.

Des fondations sans leur maison et une roulotte poussée contre un poteau électrique.

À Robichaud, dans Beaubassin-Est, des chalets et des roulottes ont été déplacés sur plusieurs mètres par la tempête.

Photo : Radio-Canada / Pascal Raiche-Nogue

Mais il faut bien réaliser que le passé n'est plus garant du futur. Il va falloir, malheureusement, se méfier de l'océan, qui va gagner la bataille face aux terres fermes.

Une citation de Alain Bourque, météorologue et climatologue, directeur général d’Ouranos

Selon M. Bourque, il importe donc de penser différemment à la façon dont nous occupons le territoire. Il faut repenser les infrastructures, la façon que c'est bâti, les toitures de maison, et cetera, construire plus solide. Chaque province doit faire ses devoirs et revoir, notamment, ses codes du bâtiment, avance-t-il.

Retraits préventifs et relocalisations

Un des énormes défis est la transition en matière de développement économique qui doit s’opérer dans la société, martèle le scientifique.

S’il est possible dans certains cas de construire des infrastructures plus robustes pour résister aux vagues et aux ondes de tempête, on doit se rendre à l’évidence qu’il faut renoncer à certains secteurs précis.

Photo aérienne prise directement au-dessus d'une région côtière. On voit la terre rouge, de l'eau brune et les débris de bâtiments endommagés par l'ouragan.

Vue aérienne de Morell, à l'Île-du-Prince-Édouard, le 27 septembre.

Photo : Radio-Canada / Shane Hennessey

Très bientôt, maintenir des chalets et d’autres structures en zone côtière ne fera pas de sens d’un point de vue économique. Il en coûtera rapidement plus cher pour entretenir des habitations sans cesse assaillies par le temps, et dont la valeur de revente s’effondre.

Dans certains cas, le retrait préventif des résidents de certains secteurs va s’imposer. À défaut de quoi, il faudra malheureusement, dit-il, relocaliser les gens lorsqu’ils auront subi trop de dommages à la suite d’une tempête majeure ou d’un ouragan comme Dorian ou Fiona.

On ne pourra pas juste reconstruire, résume Alain Bourque. Il va falloir parfois prendre la décision de relocaliser.

C'est les payeurs de taxes de l'ensemble des provinces qui vont payer pour ça. Alors il va falloir faire des choix difficiles.

Une citation de Alain Bourque, météorologue et climatologue, directeur général d’Ouranos

Le climatologue comprend que des politiciens soient réticents à prendre des décisions qui pourraient susciter de fortes réactions émotives chez les électeurs. À certains endroits, on s’y résigne néanmoins.

De gros morceaux de bois provenant de deux habitations endommagées par l'ouragan jonchent le sol.

Deux habitations lourdement endommagées à French River, à l'Île-du-Prince-Édouard, le 25 septembre, au lendemain du passage de Fiona.

Photo : La Presse canadienne / Brian McInnis

En Angleterre, par exemple, on a pris des décisions beaucoup plus radicales, de carrément repenser l'aménagement d'un village, pour déplacer le cœur d'un village un petit peu plus à l'intérieur des terres. Changer les routes, aussi. Plutôt que de passer le long des zones côtières avec les routes, plutôt passer à l'intérieur des terres, affirme Alain Bourque.

C'est des discussions qui, je crois, devront devenir de plus en plus incontournables. Tant qu'à les avoir dans 5, 10 ans, aussi bien les avoir dès maintenant. Ça va nous coûter moins cher, et ça va nous permettre de prendre des décisions plus durables, et pour le long terme, conclut-il.

Avec les informations de Karine Godin

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