Vaccin contre la COVID-19 : devriez-vous recevoir une autre dose à l’automne?

Le gouvernement fédéral a acheté 12 millions de doses du vaccin bivalent de Moderna.
Photo : (Evan Mitsui/CBC)
Dose de rappel, vaccins bivalents, délai entre les doses... il est facile de perdre le fil quant au meilleur moment pour recevoir une dose supplémentaire du vaccin contre la COVID-19. Voici huit questions utiles sur la campagne de vaccination automnale.
1. Pourquoi une dose de rappel?
Si le nombre d’infections diminue actuellement au Québec – on estime qu’il y a tout de même plus de 20 000 cas par jour –, le Dr Luc Boileau, directeur national de santé publique du Québec, affirme qu’il s’agit du meilleur moment pour se faire vacciner. La pandémie n’est pas terminée et on anticipe une nouvelle vague d’infections à l'automne.
Ça baisse, mais ça va remonter. On vit le retour à l’école et au travail; la météo va changer, on va être plus souvent à l’intérieur; on a plus de risques de contagion
, a-t-il souligné en entrevue au Téléjournal avec Patrice Roy.
Selon le Dr Boileau, il faut profiter de cette accalmie pour aller chercher sa dose de rappel. Quand on arrive avec une nouvelle vague, il peut être trop tard [pour recevoir sa dose de rappel]. Ça prend quelques jours avant d'avoir un rendez-vous, puis de développer son immunité.
Le Dr Donald Vinh, microbiologiste-infectiologue au Centre universitaire de santé McGill, ajoute que chaque personne qui se fait vacciner aidera à diminuer les répercussions d’une vague à l'automne.
André Veillette, immunologiste et membre de l'Institut de recherches cliniques de Montréal, rappelle que le vaccin continue d’être très efficace pendant plusieurs mois pour réduire les complications sévères et les hospitalisations. Par contre, cette immunité diminue avec le temps. Une dose de rappel permet au système immunitaire de rétablir un niveau d’anticorps suffisant pour compenser la baisse d’immunité.
De plus, si la protection contre une infection n’est pas très élevée, elle n’est pas nulle, tient à préciser André Veillette. C’est vrai que c’est partiel, la protection contre les infections, mais si on peut diminuer de 30 à 50 % les infections, c’est moins de personnes infectées en bout de ligne
, dit-il.
Enfin, il ajoute que le vaccin semble diminuer les risques de développer la COVID longue
, soit des symptômes à long terme de la maladie : Le meilleur traitement qu’on a contre la COVID longue, c’est d’éviter d’être infecté.
2. Combien de doses sont vraiment nécessaires?
Si les gens parlent de troisième ou de quatrième dose, depuis la mi-août, la santé publique du Québec a choisi de simplifier ses recommandations.
Désormais, on conseille aux gens de recevoir une dose de rappel cinq mois après la dose précédente, et ce, peu importe le nombre de doses de rappel reçues jusqu'à maintenant.
Par conséquent, si vous avez reçu votre dernière dose avant le mois d’avril, il est de nouveau temps de retrousser votre manche.
Si vous avez eu une infection de COVID-19, il est recommandé d’attendre trois mois avant de recevoir une dose de rappel. Ainsi, les Québécois infectés au printemps, et même au début de l’été, sont désormais admissibles à une nouvelle dose.
C’est plus clair comme message
, souligne André Veillette.
3. Les jeunes peuvent-ils recevoir une dose de rappel?

Les enfants de 6 mois et plus peuvent se faire vacciner contre la COVID-19 (archives).
Photo : Radio-Canada / Guillaume Croteau-Langevin
Des formules pédiatriques sont offertes aux enfants âgés de 6 mois à 11 ans (deux doses à huit semaines ou plus d’intervalle). Les doses sont réduites et adaptées pour eux. Les doses de rappel ne sont pas encore offertes aux jeunes de moins de 5 ans.
Pour les 5 à 17 ans, Québec recommande une dose de rappel pour les jeunes qui sont à risque élevé de complications (troubles du cœur, des poumons, du foie, du rein ou du sang; diabète; obésité; problèmes respiratoires; etc.).
Par contre, il faut noter que tout jeune de 5 à 17 ans qui souhaite obtenir une dose de rappel peut le faire cinq mois après la dernière dose de base. Rappelons que les jeunes n’ont pas besoin d'un consentement parental à partir de 14 ans.
Le Dr Vinh rappelle que si les enfants ont généralement moins de complications liées à une infection de COVID-19, ils peuvent être très malades et développer des symptômes persistants.
Parmi les 65 000 personnes hospitalisées au Québec depuis le début de la pandémie, plus de 5100 d'entre elles avaient moins de 30 ans, dont 3 % (1888 personnes) étaient âgées de 0 à 9 ans; 1,12 % (730 personnes), de 10 à 19 ans; et 5 % (2529 personnes), de 20 à 29 ans.
Le Comité sur l’immunisation du Québec (CIQ) recommande par ailleurs que les personnes de moins 30 ans choisissent le vaccin original comme dose de rappel, en raison d’un risque (très minime) de myocardites avec le vaccin de Moderna.
Les jeunes de moins de 30 ans qui préfèrent obtenir le vaccin bivalent de Moderna pourront toutefois le recevoir, dit la Dre Caroline Quach-Thanh, présidente du CIQ.
Le Dr Vinh rappelle que Moderna a réduit la dose, ce qui a réduit les risques de myocardites. De plus, les données montrent que les risques de myocardites sont considérablement moins élevés lors d’une deuxième et d’une troisième dose.
4. Le vaccin bivalent est-il plus efficace?
Santé Canada a autorisé la semaine dernière une nouvelle mouture du vaccin de Moderna comme dose de rappel. Les vaccins contre la COVID-19 offerts jusqu'à présent ciblaient uniquement la souche originelle du virus, tandis que le vaccin bivalent Spikevax de Moderna est conçu pour mieux reconnaître le sous-variant Omicron BA.1.
Il faut noter que les Québécois auront le choix entre le vaccin d’origine et le vaccin bivalent pour leur dose de rappel.
La Dre Quach-Thanh explique que le vaccin bivalent augmente de 1,6 fois le nombre d’anticorps neutralisants, comparativement au vaccin d’origine. Par contre, elle précise que la réponse immunitaire contre les sous-variants BA.4 et BA.5 (les sous-variants les plus présents partout dans le monde) n'est pas aussi élevée.
Ce n’est pas le jour et la nuit entre le vaccin d’origine et le vaccin bivalent, mais ça semble être plus bénéfique. Mais je conseille aux gens d’aller chercher l’un ou l’autre, de prendre celui qu’on leur offre
, dit André Veillette.
5. Devrait-on attendre le vaccin bivalent contre le sous-variant BA.5?
Non. Si les États-Unis ont récemment annoncé qu’ils offriraient un vaccin bivalent basé sur le sous-variant BA.5, ces quatre experts affirment qu’il vaut mieux prendre une dose de rappel maintenant.
Il ne faut pas attendre un vaccin spécifique. Il faut prendre un vaccin pour être protégé pour faire face à la prochaine vague quand elle va arriver.
D’abord, il est difficile de dire à quel moment ce nouveau vaccin bivalent sera offert. Les compagnies pharmaceutiques n’ont pas encore fourni les données à Santé Canada pour approbation.
De plus, le Dr Donald Vinh rappelle qu’il y a encore peu de données concernant ce vaccin bivalent avec le sous-variant BA.5.
Ce vaccin [contre le BA.5] n’a pas encore été testé chez des humains; on fait des extrapolations, explique le Dr Vinh. Je ne prendrais pas de risques pour attendre ce nouveau vaccin. Les gens courent le risque de ne pas être bien vaccinés quand la vague va remonter à l'automne.
Il ajoute que, de toute façon, la prochaine vague pourrait ne pas être causée par le BA.5.
6. Une infection de COVID-19 est-elle l’équivalent d’une dose de vaccin?

Il est toujours possible de se procurer une boîte d'autotests par mois dans les pharmacies du Québec.
Photo : La Presse canadienne / Jeff McIntosh
Le Dr Donald Vinh et André Veillette sont catégoriques : ne croyez pas que votre infection à la COVID-19 vous protégera de longues périodes.
Le Dr Vinh explique que l’immunité conférée par une infection varie de personne en personne et dure beaucoup moins longtemps que celle que procure un vaccin. Surtout chez les personnes asymptomatiques et les personnes non adéquatement vaccinées, une infection, ce n’est vraiment pas l’équivalent d’une dose. L’immunité diminue très rapidement.
C’est pourquoi il est recommandé de respecter un intervalle de trois mois après l’infection avant de recevoir une autre dose de vaccin.
7. Aura-t-on besoin d’une dose supplémentaire plus tard dans l’année?
Difficile à dire, disent les experts.
Tout dépendra du variant en circulation à l’automne. L’arrivée d’un nouveau variant qui échappe à l’immunité vaccinale et qui est plus dangereux pourrait venir brouiller les cartes, rappelle André Veillette.
Le Dr Vinh précise que les données préliminaires du nouveau vaccin bivalent (BA.1) semblent montrer que l’immunité diminue beaucoup moins rapidement avec lui qu’avec le vaccin original.
Ça pourrait se traduire dans une protection plus longue [que cinq mois], dit-il. Mais il n’y a pas de données qui suggèrent que l’immunité va durer un an… Si les États-Unis parlent déjà de vacciner les gens une fois par année, comme on le fait pour la grippe, il n'y a pas encore de preuve scientifique [que le vaccin bivalent protégera pendant un an]. C’est plausible, mais ce n’est pas démontré.
8. Pourquoi autant de Québécois boudent-ils la dose de rappel?
Moins du quart des Québécois ont reçu une dose de vaccin contre la COVID-19 au cours des cinq derniers mois.
Au Québec, seulement 21 % des personnes admissibles ont reçu une quatrième dose; un peu plus de 50 % ont reçu trois doses.
Selon Simon Bacon, chercheur en science comportementale médicale à l'Université Concordia, les messages gouvernementaux des derniers mois ont faussé la perception du public. Les gens ne pensent plus que c’est un problème; on leur dit que ce n’est pas si grave; on enlève les restrictions [...] De plus, le gouvernement a beaucoup dit, au début, "prenez deux doses et tout sera réglé". Les gens sont allés chercher leurs deux doses. Mais là, ils disent : "J’ai fait ma part. Je ne veux pas une autre dose".
Il croit qu’il sera difficile de convaincre les gens d’aller chercher une nouvelle dose, mais il espère que l’arrivée du nouveau vaccin bivalent convaincra certaines personnes de le faire.
Le gouvernement doit absolument mieux expliquer pourquoi cette dose de rappel est à ce point importante et pourquoi chaque personne vaccinée aide à protéger la communauté, affirme M. Bacon.
On dit que les gens doivent gérer leur risque, mais pour le faire, on doit leur donner les informations nécessaires pour prendre une décision éclairée.
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