La Vérif : à quel point perd-on des terres agricoles au Québec?

De 2016 à 2020, plus de 9500 hectares ont disparu, selon les données de la Commission de protection du territoire agricole.
Photo : Radio-Canada / Josianne Thériault
Trois chefs de parti sont allés à la rencontre des membres de l’Union des producteurs agricoles mercredi. La cheffe libérale Dominique Anglade promet d’améliorer la protection du secteur agricole et de freiner l'étalement urbain. Or, perd-on vraiment autant de territoires agricoles que l’affirme Mme Anglade?
En point de presse, la cheffe libérale a affirmé : On n'a qu'à regarder les cinq dernières années, puis on a constaté qu'on a perdu 10 000 hectares en termes de territoire agricole.
Elle a raison. Le Québec a perdu plus de 9500 hectares de terres agricoles entre 2016-2017 et 2020-2021, selon les données de la Commission de la protection du territoire agricole (CPTAQ). C’est l’équivalent de près de 16 000 terrains de football.
Ces terres ont notamment été utilisées pour construire des maisons, des commerces et des industries, ce qui a contribué à l'étalement urbain.
L'exploitation des ressources naturelles, ou la construction de routes et de systèmes de transport, comme le Réseau express métropolitain (REM), en ont aussi grugé une partie.
On constate toutefois un ralentissement dans le rythme de ces terres dézonées.
En 2008, plus de 5000 hectares ont été retranchés. Depuis 2016, c’est sous la barre des 2000 hectares annuellement.
Si des terres sont retirées de la zone agricole, d’autres s’y rajoutent aussi tous les ans. Ainsi, la superficie protégée a légèrement augmenté dans les dernières années.
Toutefois, de l’avis de l’Union des producteurs agricoles et d’experts, ces terres ne sont pas d'aussi bonne qualité que celles qui disparaissent.
Superficie agricole
En ce moment, plus de 6,3 millions d’hectares de terres agricoles sont protégés au Québec. Cependant, ce total inclut des terres en friche, ou encore des forêts privées.
Il y a beaucoup d’espaces qui sont négligés par l’agriculture, qui n’ont pas vraiment beaucoup de potentiel en agriculture
dans cette superficie totale, déplore le professeur retraité du Département de géographie de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) et spécialiste en aménagement et en développement territorial Benoît Vachon.
D’ailleurs, seulement la moitié des terres protégées est réellement cultivée au Québec, et seulement 2 % de la superficie de la province est cultivable.
De l’avis de l’expert, la CPTAQ fait preuve d’un certain laxisme, surtout pour les meilleures terres agricoles – qui sont concentrées dans les plaines du Saint-Laurent –, pour satisfaire des besoins de développement urbain.
Et, au contraire, dans les régions plus éloignées – comme la Gaspésie ou le Bas-Saint-Laurent –, la situation est inversée. Il est plus difficile d’obtenir une dérogation de zones agricoles érigées sur des sols moins fertiles, constate Benoît Vachon, ce qui est un frein au développement régional. Il attribue cette situation à une présence moins importante des promoteurs immobiliers.
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Avec la collaboration d'Olivier Bachand et de Nathalie Lemieux