Le cauchemar des passagers handicapés à bord des avions

James Glasbergen, de Kitchener, en Ontario, demande aux compagnies aériennes et aux régulateurs de permettre aux passagers handicapés de rester assis dans leur fauteuil roulant en vol.
Photo : CBC/Ryan Patrick Jones
Des personnes qui dépendent des fauteuils roulants pour se déplacer et le secrétaire américain aux Transports affirment qu'il est temps de rendre les voyages en avion plus accessibles pour permettre aux personnes handicapées une expérience de vol plus équitable.
Pour des raisons de sécurité, les réglementations fédérales actuelles exigent que les passagers en fauteuil roulant s'assoient dans les sièges d'avion et la plupart des appareils de mobilité doivent être rangés dans la soute avec les bagages des voyageurs.
James Glasbergen, de Kitchener, connaît cette procédure, mais la redoute à chaque fois qu'il prend l'avion.
Et lorsqu’il est monté à bord d'un vol d'Air Transat au départ de Toronto pour Londres le 30 juin afin de voir les Rolling Stones en concert, ses inquiétudes se sont avérées justifiées : le personnel de la compagnie aérienne l'a laissé tomber dans l'allée lors de son transfert vers son siège. Il s'en est suivi une lutte de plus de trois minutes pour relever et installer l'homme de 90 kg dans son siège.
Il n'y avait pas assez de place m'installer dans le siège et ils m'ont laissé tomber
, se souvient M. Glasbergen, un ancien agent de voyage de 46 ans qui est paralysé à la suite d'un accident de voiture survenu en 1992.
« Tout d'un coup, mon corps a heurté le sol avec un grand bruit sourd. »
Après deux tentatives infructueuses, un agent de bord et un autre passager sont intervenus et le groupe a réussi à l’asseoir.
Ça va au-delà de la frustration et du choc. Je suis en colère
, reprend James Glasbergen, qui ajoute que ce n'était pas la première fois qu'il se retrouvait au sol.
Il n'y a absolument aucune dignité pour les personnes handicapées qui ont besoin d'assistance.
Il appelle les compagnies aériennes et les régulateurs à trouver un moyen de permettre aux utilisateurs de fauteuils roulants de rester assis dans leurs appareils de mobilité personnels lorsqu'ils voyagent, comme c'est le cas dans les bus et les trains.
Si on peut faire voler un hélicoptère sur Mars, on peut faire en sorte de voyager en fauteuils roulants en toute sécurité
, suggère-t-il.
Problèmes de transfert, fauteuils roulants endommagés
Air Transat s'est excusée et assure avoir pris contact avec son passager pour discuter de la façon d'améliorer les futures expériences de voyage, a affirmé le transporteur dans un courriel transmis à CBC
.Les services de transfert au sol sont gérés par un tiers. Nous enquêtons activement sur cet incident pour éviter qu'il ne se reproduise
, écrit la porte-parole Marie-Christine Pouliot.
Melissa Graham, une résidente de Toronto à la mobilité réduite, dit que s'asseoir dans un siège d'avion est un défi pour son corps.
Elle soutient également que son fauteuil roulant a subi deux bris lors de ses déplacements entre Toronto et Winnipeg avec WestJet durant la fin de semaine de la fête du Canada.
Mme Graham a remarqué à son arrivée à Winnipeg que l'un des garde-boue de son fauteuil roulant électrique s'était cassé, tandis que le dossier sur lequel elle s'appuie pour se soutenir et garder l'équilibre a été endommagé lors du vol de retour.
WestJet confirme que Mme Graham a une demande de réclamation pour dommages à l'étude et que son fournisseur de services la contactera pour la résoudre.
C'est incroyablement frustrant. Ça rend le transport aérien très stressant
, témoigne Melissa Graham.
J'ai pris l'avion six fois depuis décembre dernier, et je n'ai pas eu un seul vol où j'ai pu me sentir complètement à l'aise.
L'Office des transports du Canada (OTC), l'organisme fédéral de réglementation du transport aérien, affirme avoir reçu 247 plaintes liées à l'accessibilité aérienne en fauteuil roulant au cours des cinq dernières années. Dix-huit concernaient des dommages aux fauteuils roulants, tandis que 214 concernaient l'assistance aux personnes à mobilité réduite.
Mais ces données ne comprennent que les plaintes adressées au régulateur et non celles que les passagers ont faites directement à une compagnie aérienne.
La réglementation oblige par ailleurs les compagnies aériennes à s'assurer que le personnel correctement formé effectue les transferts en fauteuil roulant et rembourse aux passagers le coût de la réparation ou du remplacement des appareils de mobilité endommagés pendant le transport.
Bien que les données spécifiques au Canada ne soient pas disponibles, les plus grandes compagnies aériennes des États-Unis ont perdu ou endommagé au moins 15 425 fauteuils roulants entre la fin de 2018 et juin 2021, indiquait l’année dernière The Washington Post, citant des données du département américain des Transports.
Selon l’OTCFederal Aviation Administration (FAA) des États-Unis; des normes que le Canada suit.
, aucun design d'avion ou d'appareils d'aide à la mobilité qui permettrait aux personnes de rester dans leur fauteuil roulant n'a été entièrement testé et certifié pour répondre aux normes de sécurité aérienne de laSi les fauteuils roulants et un système de retenue pour fauteuil roulant à utiliser dans la cabine recevaient une certification, nous examinerions si une modification réglementaire est appropriée
, déclare l’OTC dans un communiqué.
Progrès aux États-Unis
Un coup de pouce pourrait bientôt venir du sud de la frontière.
La semaine dernière, le secrétaire américain aux Transports, Pete Buttigieg, a déclaré que son département travaillerait dans les mois et les années à venir
sur une règle qui permettrait aux passagers de rester dans leur fauteuil roulant pendant leur vol.
En septembre dernier, un comité d'experts convoqué par le Transportation Research Board (TRB) des États-Unis a conclu une étude préliminaire sur les systèmes qui utilisent des sangles similaires à une ceinture de sécurité ou à un autre mécanisme pour fixer un fauteuil roulant au plancher d'un avion.
L’étude montre que la plupart des avions de ligne en service ont une porte d'embarquement principale assez large pour la plupart des fauteuils roulants personnels, et que l'intérieur des modèles les plus courants, le Boeing 737 et l'Airbus A320, ne nécessiteraient que des modifications mineures
pour créer une zone où un fauteuil roulant pourrait être sécurisé.
Le comité n'a identifié aucun problème
, indique l'étude, qui remettrait en question la faisabilité technique d'un système de fixation des fauteuils roulants en cabine
.
L’OTC
dit être au courant de l'étude et surveiller la question, mais ajoute que des recherches supplémentaires sont nécessaires.