Des victimes de prêtres pédophiles veulent être entendues par le pape

L'Église anglicane du Canada va se prononcer sur la reconnaissance du mariage homosexuel.
Photo : Getty Images / Dan Kitwood
Des victimes confirmées et présumées d’agressions sexuelles commises par des membres du clergé au Québec souhaitent profiter de la visite du pape pour lui communiquer leurs souffrances. Elles espèrent qu’une fois informé de la réalité, le souverain pontife fera le nécessaire pour que les congrégations et les diocèses visés par des recours collectifs les indemnisent sans plus tarder.
Les victimes et leurs avocats, Marc Bellemare et Alain Arsenault, reprochent aux représentants locaux du clergé de multiplier les obstacles pour étirer les délais devant les tribunaux. L’objectif serait de réduire au maximum les réparations qu'elles pourraient devoir payer aux plaignants, plusieurs d’entre eux étant rendus à un âge avancé.
Selon Me Alain Arsenault, 2500 victimes de prêtres pédophiles attendent toujours d’obtenir réparation au Québec. Il accuse l’Église de faire traîner sciemment les procédures intentées au civil dans l’espoir de diminuer les indemnités qu’elle pourrait avoir à leur verser.
Oppositions systématiques
La plupart des recours collectifs actuellement en cours font face à des oppositions systématiques et coûteuses de la part des différents diocèses, notamment le diocèse de Québec sous la gouverne de [Gérald] Cyprien Lacroix
, a déploré Me Bellemare jeudi matin lors d’une conférence de presse.
L’ancien ministre de la Justice, son collègue Alain Arsenault et les victimes qu’ils représentent ont écrit une lettre ouverte au pape François pour le mettre au courant de la situation et réclamer des excuses de la part de l'Église catholique.
Il faut que le message se rende au pape. On est persuadés que, vu la couverture médiatique, le pape saura ce qui se passe à Québec et posera des gestes. C'est certain que notre canal de communication, ce n'est pas Cyprien Lacroix
, a indiqué Me Bellemare.
Dans un communiqué publié jeudi matin, le cardinal Lacroix s'est engagé à remettre une copie de la lettre au pape François au cours de sa visite à Québec.
Solidarité
Les avocats et leurs clients ont tenu à préciser que leur sortie dans les médias ne visait aucunement à remettre en question l’attention accordée aux victimes des pensionnats pour Autochtones durant la visite du pape à Québec.
Nous sommes solidaires à 150 % des victimes des pensionnats
, a assuré Marc Bellemare. Cependant, nous ne voulons pas que la condition des victimes de prêtres pédophiles passe sous le radar et que le pape François retourne au Vatican sans avoir été informé de la situation actuelle.
L'avocat de Québec et son collègue Alain Arsenault disent avoir constaté une profonde distorsion entre les déclarations publiques du pape et le comportement de certaines organisations religieuses.
Me Arsenault a soutenu que l’abolition par le pape François, en décembre 2019, du secret pontifical devait aider les victimes de violences sexuelles commises par des membres du clergé à obtenir réparation.
L’avocat affirme que les institutions religieuses du Québec visées par des actions collectives n’ont pas perçu la décision du chef de l’Église catholique comme une invitation à se montrer plus transparentes.
Pas de collaboration
Aujourd'hui, je peux vous dire que, malgré toutes les demandes, aucun document dans aucune action collective n'a été déposé. Le pape dit une chose et il se fait autre chose dans les diocèses et les congrégations
, a dénoncé l’avocat.
Il faut selon lui agir rapidement pour indemniser les victimes d’abus sexuels. Me Arsenault craint que les millions de dollars
dont disposent les congrégations religieuses ne soient pas disponibles éternellement.
Les congrégations religieuses sont assises sur des sommes d'argent importantes et leurs membres ont en moyenne 85 ans et plus, et leur nombre diminue d'année en année. Que vont-ils faire de l'argent qui va leur rester? Est-ce que ça va aller à Rome? Et avant que ça parte pour Rome, est-ce qu'on peut indemniser les victimes du Québec?
, a demandé l’avocat.
Un message qui a été repris par les personnes qui accompagnaient Me Arsenault et Me Bellemare jeudi matin.
Aujourd'hui, je demande au pape François non seulement de s'excuser, mais de réparer concrètement avec l'extrême richesse du Vatican les fautes très graves commises par certains représentants de l'Église catholique
, a dit Gaétan Bégin.
Mettre fin à leur calvaire
L'homme de 81 ans est à l’origine de l’action collective intentée contre le diocèse de Québec pour l’ensemble des agressions sexuelles qui ont été commises par des personnes placées sous son autorité depuis 1940.
Moi, je demanderais tout simplement au pape d'arrêter de faire souffrir les victimes, de mettre fin à leur calvaire et d'ordonner que les victimes soient aidées immédiatement. Ce n'est pas plus compliqué que ça
, a pour sa part indiqué Shirley Christensen.
Il y a une douzaine d'années, la femme de Québec, qui a été agressée à de multiples reprises par le curé Paul-Henri Lachance lorsqu’elle avait entre 6 et 8 ans, s’était rendue jusqu’en Cour suprême pour obtenir la permission de poursuivre son agresseur.