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Absolution accordée à un agresseur sexuel : le DPCP fera appel

Simon Houle

Alors que la Couronne réclamait 18 mois de prison, Simon Houle a pu bénéficier d'une absolution conditionnelle.

Photo : Facebook

Radio-Canada

Dans la foulée de l’absolution conditionnelle d’un ingénieur de Trois-Rivières, qui a agressé sexuellement une femme et pris des photos de ses parties intimes durant son sommeil, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) a indiqué mardi qu’il fera appel de la décision.

Nous pouvons tout à fait comprendre le désarroi et la frustration des personnes victimes, a déclaré le ministre de la Justice Simon Jolin-Barrette.

Compte tenu des procédures judiciaires en cours, nous ne ferons pas d'autre commentaire, a-t-il ajouté.

L’absolution conditionnelle a été octroyée à Simon Houle par la Cour du Québec le mois dernier afin de lui permettre de voyager pour son travail et d’éviter d’avoir un casier judiciaire.

En avril 2019, Simon Houle, alors étudiant en génie mécanique à l'Université du Québec à Trois-Rivières, avait agressé sexuellement une de ses amies lors d'une fête dans un appartement. La femme, qui dormait dans une chambre, avait été réveillée par la lumière d'un appareil photo. Elle avait alors senti des doigts dans son vagin. Sa camisole était levée et son soutien-gorge était ouvert. Neuf photos de ses parties intimes ont été retrouvées dans le cellulaire de son agresseur.

Plus de deux ans après, l'ingénieur avait plaidé coupable d'accusations d'agression sexuelle et de voyeurisme. L'employeur de Simon Houle a indiqué, mardi matin, avoir mis fin au lien d'emploi.

Un agresseur sexuel peut-il recevoir une absolution afin de préserver sa carrière? La peine clémente de la Cour du Québec à l'endroit d'un ingénieur de Trois-Rivières est vivement critiquée. Une peine qui révolte des associations de défense des victimes d'actes sexuels en raison du message qu'il envoie. Le DPCP portera la peine en appel. Reportage de Geneviève Garon.

Décision controversée

La décision de la Cour du Québec a provoqué beaucoup de réactions dans les milieux politique, judiciaire et communautaire.

Selon Mélanie Lemay, cofondatrice de l’organisme Québec contre les violences sexuelles, cette décision du juge [Matthieu Poliquin, de la Cour du Québec] nous a permis de prouver qu’il reste du chemin à faire pour faciliter l’accès à la justice à toutes les victimes d’agressions sexuelles.

Elle donne une entrevue à la radio.

Mélanie Lemay est cofondatrice du mouvement Québec contre les violences sexuelles.

Photo : Radio-Canada / Pascal Michaud

Selon elle, les nouveaux tribunaux spécialisés en matière de violence sexuelle ne feront pas en sorte que ce genre de décision ne se reproduira plus, car on vit dans un système qui reste centré sur les droits des agresseurs et leur réhabilitation, alors que la parole des victimes et les conséquences sur leur vie ne sont pas prises en considération.

C'est un jugement extrêmement troublant, selon la députée péquiste Véronique Hivon. Elle s'étonne de certains passages du jugement.

« Après tout le mouvement MoiAussi, après toutes les dénonciations et la sensibilisation qu'on a faites collectivement sur ce fléau des violences sexuelles, de lire à quel point on peut minimiser, dans un jugement de nos tribunaux, ça dépasse l'entendement. »

— Une citation de  Véronique Hivon, députée du Parti québécois

Ce qui a troublé la députée de Joliette, c'est notamment de lire que la durée de l'agression a eu un impact dans la décision du juge, mais aussi qu'une précédente agression par le même homme n'a pas été prise en compte.

Contrairement à Mme Lemay, Véronique Hivon croit que les tribunaux spécialisés permettront d'éviter ce genre d'écueil parce que les juges seront formés en continu sur les réalités toutes spécifiques des agressions à caractère sexuel.

En entrevue à l'émission Midi info, Rachel Chagnon, professeure au Département des sciences juridiques à l'UQAM, a souligné que, dans la détermination d'une peine, l'apparence de justice compte autant que la justice elle-même afin que le public ait confiance dans le système.

« Dans un monde où on reconnaît qu'historiquement on n'a pas été suffisamment sévère, qu'on n'a pas envoyé un message suffisamment clair à l'égard de la gravité des agressions sexuelles, une peine qui apparaît à première vue relativement bienveillante envoie-t-elle le message qu'on veut envoyer? »

— Une citation de  Rachel Chagnon, professeure au Département des sciences juridiques à l'UQAM

Pour la députée libérale de Verdun, Isabelle Melançon, ce n'est pas avec un jugement comme celui-ci qu'on pourra rebâtir la confiance envers le système de justice. En entrevue à RDI, elle s'est dite dégoûtée par la lecture de certains passages du jugement.

Le signal que ça envoie, c'est que si on a un bon emploi, si on est dans la bonne classe sociale, on peut avoir, pas un passe-droit, mais une espèce de considération particulière qui nous permet d'éviter carrément la prison, déplore de son côté Alexandre Leduc, porte-parole de Québec solidaire en matière de justice.

Un jugement qui suscite beaucoup de réactions. Entrevue avec Me Sophie Gagnon, directrice générale de la clinique juridique Juripop.

Avec les informations de Geneviève Garon

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