Le nouveau concept stratégique de l’OTAN épingle la Russie comme principale menace

L'armée russe a exhibé son matériel militaire à l'occasion du Jour de la Victoire, qui souligne sa victoire sur l'Allemagne nazie, le 9 mai dernier, à Moscou.
Photo : Getty Images / AFP/ALEXANDER NEMENOV
- François Messier
L’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) a adopté mercredi à Madrid un nouveau concept stratégique qui identifie la Russie comme « la menace la plus significative et la plus directe » à la paix transatlantique, et la Chine comme un « défi » aux « intérêts », aux « valeurs » et à leur « sécurité ».
Ce changement de concept stratégique de l’Alliance transatlantique, le premier depuis le sommet de Lisbonne, en 2010, témoigne d’une modification draconienne de l’approche du groupe de 30 pays qui s’explique par l’invasion de l’Ukraine par la Russie et la montée en puissance de la Chine.
Ce précédent concept stipulait que l’OTAN comptait établir un véritable partenariat stratégique
avec la Russie, qui s’appuyait sur le respect des principes démocratiques
et de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale de tous les États de la zone euroatlantique
. Il ne faisait aucune mention de la Chine.
Douze ans plus tard, les alliés concluent plutôt que Moscou cherche à établir des sphères d’influence et un contrôle direct par la coercition, la subversion, l’agression et l’annexion
en utilisant des moyens conventionnels, informatiques et hybrides contre nous et nos partenaires
.
Sa posture militaire coercitive, sa rhétorique et sa volonté avérée de poursuivre des objectifs politiques sapent l'ordre international fondé sur la règle de droit.
L'OTAN affirme néanmoins que l'OTAN ne cherche pas un affrontement et ne pose aucune menace à la Russie
.
Les relations entre Moscou et l'OTAN se sont considérablement crispées après la guerre de 2014 en Ukraine, qui s'est notamment soldée par l'annexion de la Crimée par Moscou. L'OTAN n'avait cependant pas modifié son concept stratégique pour autant.
L'Alliance transatlantique souligne par ailleurs que la Chine emploie un large éventail d'outils politiques, économiques et militaires afin d'accroître son influence internationale [...] tout en restant opaque sur ses intentions, sa stratégie et son renforcement militaire
.
Elle souligne également les cyberattaques mal intentionnées
, la désinformation
et la rhétorique de confrontation
de Pékin, ainsi que sa volonté de contrôler des secteurs technologies et industriels clés, des infrastructures critiques, ainsi que des matériaux stratégiques et les chaînes d'approvisionnement
.
La Chine n'est pas un adversaire, mais nous devons prendre en compte les conséquences pour notre sécurité quand nous (la) voyons investir lourdement dans de nouveaux équipements militaires
et tenter de contrôler des infrastructures essentielles comme les réseaux 5G
, a expliqué le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, en ouverture du sommet des dirigeants des 30 pays membres.
Kiev ravi, Moscou irrité
Le chef de la diplomatie ukrainienne, Dmytro Kouleba, a salué la position lucide
de l'OTAN sur la Russie. Aujourd'hui à Madrid, l'OTAN a prouvé qu'elle pouvait prendre des décisions difficiles, mais essentielles
, a-t-il écrit sur Twitter.
Invité quelques heures plus tôt à s'exprimer devant les dirigeants de l'Alliance en visioconférence, le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait demandé un soutien militaire et financier accru pour permettre à l'Ukraine de résister face à l'artillerie russe
.
Les pays membres de l'Alliance ont d'ailleurs annoncé un nouveau plan d'aide à Kiev passant par la livraison d'équipements militaires non létaux
et visant à améliorer les défenses
ukrainiennes contre les cyberattaques.
L'épouvantable cruauté de la Russie provoque d'immenses souffrances humaines et des déplacements massifs, touchant de manière disproportionnée les femmes et les enfants. [La Russie porte] l'entière responsabilité de cette catastrophe humanitaire.
L'Ukraine peut compter sur nous aussi longtemps qu'il le faudra
, a assuré le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, en conférence de presse.
Les dirigeants de l'OTAN ont également confirmé mercredi le processus d'adhésion de la Suède et de la Finlande, rendue possible par la levée du veto turc mardi soir. Avec ce développement, l'élargissement de l'Alliance n'est plus qu'une formalité.
Le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Riabkov, a vertement critiqué cette décision, qui fait en sorte que l'OTAN se retrouve aux portes de la Russie le long de la frontière de 1340 kilomètres qui la sépare de la Finlande.
Nous considérons l'élargissement de l'alliance comme étant profondément déstabilisateur pour les affaires internationales. Cela ne renforce ni la sécurité de ceux qui élargissent, ni celle de ceux qui adhèrent, ni celle encore de ceux qui considèrent l'alliance comme une menace.
Le sommet de Madrid consolide le cap d'un endiguement agressif de la Russie par le bloc
atlantique, a-t-il ajouté.
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Avec les informations de Agence France-Presse
- François Messier