Plus de 1000 courtepointes pour honorer les survivants des pensionnats pour Autochtones
Vanessa Génier est l'instigatrice du projet Quilts for Survivors.
Photo : Radio-Canada / Jimmy Chabot
La première chose qui frappe en entrant dans l'atelier du projet Quilts for Survivors à Timmins, c’est le petit espace dans lequel les bénévoles travaillent. Leurs courtepointes apportent du réconfort aux survivants des pensionnats pour Autochtones partout au pays.
Je dirais qu’on a environ 50 demandes [de courtepointes] par jour sur notre site web [...]. Lorsqu’on présente une courtepointe à quelqu’un, l’entourage de cette personne qui a aussi fréquenté les pensionnats en demande une
, affirme Vanessa Génier à la tête de l’organisme à but non lucratif, Quilts for Survivors.
L'organisme basé dans le Nord de l'Ontario se donne pour but depuis un an de confectionner à la main des courtepointes pour tous les survivants des pensionnats qui le désirent.
La demande est si grande qu’au cours du dernier mois, Vanessa Génier a dû quitter son emploi pour mettre tout son cœur dans ce projet qui est né après la découverte de ce qui semble être 215 dépouilles d'enfants à Kamloops.
Je voulais faire quelque chose, mais je ne savais pas ce que je pouvais faire […] J'entendais parler de gens de ma communauté qui faisaient des marches pour sensibiliser les gens, mais je savais que je ne pouvais aider de cette façon étant mère de famille monoparentale de cinq enfants.
Elle raconte que le créateur
lui a donné un don pour faire des courtepointes.
J’ai donc utilisé mon don pour faire des courtepointes et j’allais en faire18 pour les survivants
, s'est-elle dit en juin 2021.
Un an plus tard, grâce au pouvoir des réseaux sociaux, Vanessa a donné 1632 courtepointes à des survivants des pensionnats. Depuis, 900 autres personnes ont fait une demande et attendent de recevoir la leur.
« Les survivants sont vraiment surpris qu’on leur donne. Plusieurs demandent le prix. Je leur dis que c’est gratuit. Ils se sont tout fait prendre, alors de recevoir, ce n’est pas naturel pour eux. »
Vanessa Génier a grandi au sein de la Première Nation crie de Missanabie. Elle saisit bien l'importance de cette offrande.
Ma communauté a toujours honoré ses membres avec des couvertures, faites à la main ou achetées. C’était un signe de respect.
Un projet rassembleur
Le projet lancé par Vanessa a su rassembler toutes sortes de personnes : un homme de Timmins touché par la cause
a même offert gratuitement l’un de ses appartements pour le transformer en maison mère de l’organisme à but non lucratif.
En entrant dans l’appartement, Vanessa nous montre la chambre remplie de tissus qu’elle a reçus par la poste. Des dons en espèces arrivent également de partout sur la planète.
On a eu des dons de l’Australie, des États-Unis, de la Norvège
, précise-t-elle sur les dons en argent qui servent entre autres à payer les envois postaux des courtepointes ou encore de l'équipement spécialisé.
Vanessa ne s’en cache pas : son succès ne serait pas possible sans ses couturières, dispersées aux quatre coins du pays.
Quand j’ai commencé, j’avais dit à Vanessa : ''Je te donne deux jours. Je vais t'aider à en faire un peu.'' Je suis encore ici pour faire ma part d’aider à soulager la misère
, s’émeut Thérèse Longyear qui occupe un emploi dans un magasin de rideaux à Timmins.
Fréquenter Vanessa Génier quotidiennement a été bien plus qu’une simple occasion de bénévolat : les témoignages des survivants qu’elle a rencontrés ont été pour ses aides-couturières une véritable leçon d’histoire sur les pensionnats pour Autochtones.
« Je ne le savais même pas. Ça m’a fait bien mal au cœur. Y’a personne qui devrait passer à travers ce qu’ils ont passé. »
Radio-Canada est aussi allé à la rencontre de Suzanne Gauthier, propriétaire du Quilting Barn à Earlton, dans le Nord-Est de l’Ontario.
Un lundi matin, elles étaient une douzaine à mettre la main à la pâte pour ce projet lancé par Vanessa.
Suzanne et son équipe ne s’attendent à rien en retour, elles le font bénévolement, par passion. Les photos des survivants avec leur offrande ou encore les lettres rédigées à la main les récompensent de leurs efforts.
On voit souvent les témoignages de gens, alors ça nous allume encore plus à travailler là-dessus, chaque minute qu’on peut
, lance Suzanne Gauthier qui est s'est spécialisée dans la finition des courtepointes.