Québec interpelle Ottawa sur l’accès aux bancs coquilliers de la Gaspésie

Le ministre du MAPAQ demande à Ottawa des stations d’analyse des eaux pour permettre l’accès aux bancs coquilliers (archives).
Photo : Radio-Canada / Isabelle Larose
Le ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ), André Lamontagne, interpelle la ministre responsable de Pêches et Océans Canada (MPO) sur sa gestion des bancs coquilliers de la Gaspésie.
M. Lamontagne demande la réouverture de stations d'analyse des eaux au Québec. Il serait ainsi possible de déterminer si l'eau dans certaines zones de la région est encore trop polluée pour permettre la réouverture de la pêche dans certains secteurs.
Dans une lettre adressée à son homologue au fédéral, la ministre Joyce Murray, le ministre Lamontagne affirme que le MPO maintient plusieurs sites coquilliers de la Gaspésie fermés bien qu’aucun suivi sur la qualité de l’eau ne soit effectué.
En comparant la situation actuelle avec celle dans les provinces de l’Atlantique, le ministre évoque une situation d’iniquité puisque les prélèvements effectués sur les sites coquilliers seraient beaucoup plus nombreux au Nouveau-Brunswick, par exemple, que dans la Belle Province.
Cette lettre, qui a été envoyée le 26 mai, était toujours sans réponse du ministère fédéral, en date du 10 juin.
S'il y a un enjeu de santé publique, alors on ne veut pas autoriser une pêche qui serait néfaste ultimement pour les consommateurs
, affirme le ministre Lamontagne. Mais pour être capable de déterminer s'il y a un enjeu ou pas, il faut avoir une base scientifique. Auparavant, il y avait des enjeux de détériorations des eaux en raison de pratiques agricoles ou de rejets de certaines municipalités, mais au fil des années il y a des gestes qui ont été posés pour corriger le tir.
Un soutien régional
Le député de Bonaventure, Sylvain Roy, demande la réouverture des bancs coquilliers dans l’Est-du-Québec depuis plusieurs années. Il y a déjà plus de deux ans, il avait demandé, en vain, de nouvelles analyses de l’eau dans certains secteurs qu’il estimait suffisamment propres à la consommation de mollusques.
Selon le député, de nombreux sites pourraient être rouverts s' il y avait un peu plus de volonté du côté de Pêches et Océans Canada
.
Sylvain Roy donne l'exemple d'un site dans sa propre municipalité, Escuminac, qui s'étend jusqu'à Pointe-à-la-Garde. C’est un banc coquillier extraordinaire. Il n’y a aucun égout qui se jette là-dedans, il n’y a aucune source de pollution, mais il n’y a pas de tests qui se font sur la toxicité des mollusques. Donc c'est une interdiction
, déplore-t-il.
Un raccourci bureaucratique
Le Conseil de l’Eau Gaspésie Sud et Fondation Rivières ont récemment rendu publique une étude sur la gestion des eaux usées dans la Baie-des-Chaleurs, qui soutient que le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques devrait en faire davantage dans le dossier.
En effectuant cette recherche, ils en sont arrivés à la conclusion que les surverses et les émissions des stations d’épuration sont une importante source de contamination du secteur.
Nous avons aussi découvert que c’est entre autres sur cette base que Pêches et Océans décide de fermer ou non les zones de pêche et qu’il fonde ses décisions sur des analyses réalisées parfois il y a plus de dix ans
, dénonce André Bélanger, le directeur général de la Fondation Rivières.
Selon M. Bélanger, par manque de budget et d’inspecteurs, le ministère fait moins d’analyses qu’auparavant et procède par hyperprévention en prenant des décisions qui ne sont pas nécessairement représentatives de la qualité réelle de l’eau
.
Rectificatif
La version originale de ce texte a été corrigée à la suite d'une demande de M. Bélanger qui souhaitait nuancer ses propos sur la contamination du secteur par les eaux usées et sur les critères utilisés par Pêches et Océans pour fermer les sites coquilliers. Des nuances ont aussi été apportées quant aux liens entre les décisions de Pêches et Océans et leur représentativité réelle sur la qualité de l’eau.
L’organisme a ainsi eu l’idée de contacter le député Sylvain Roy afin de potentiellement reproduire le protocole d’analyse du MPO pour voir les résultats eux-mêmes.
Si le constat va dans le sens qu’on soupçonne, c’est-à-dire que la qualité est meilleure qu’elle ne le paraît, alors on sera en meilleure position d'interpeller le ministère et de leur dire qu’il serait temps d’investir pour faire de vraies études
, avance M. Bélanger. À l'inverse, si les tests révèlent que l'eau est polluée, l'avis de fermeture de la pêche aux mollusques sera respecté.
Le directeur général de l’organisme ajoute que l'inaction du ministère fédéral ne vient pas d’un manque de volonté, selon lui, mais bien de la lourde machine administrative.
S’ils réalisent des tests avec l’aide de scientifiques locaux, André Bélanger et Sylvain Roy espèrent pouvoir faire monter le dossier en haut de la pile
. Pour l’instant, l’idée a été présentée au ministre André Lamontagne. Ce dernier a démontré un certain intérêt, selon le député de Bonaventure.