Rose Naggar-Tremblay, Révélation Radio-Canada 2022-2023

Rose Naggar-Tremblay, Révélation 2022-2023
Photo : Radio-Canada
Contralto à la voix sobre et veloutée, qui se balade entre le chant classique et la chanson française
Rose Naggar-Tremblay est une contralto et autrice-compositrice-interprète polyvalente, remarquée pour la richesse de son timbre et l’intelligence de son interprétation. En 2017, elle intègre la distribution de La Cenerentola, de Rossini, et l’année suivante, celle de Svadba, d’Ana Sokolovic, à l’Opéra de Montréal. Elle interprète en mars 2019 le rôle de Gertrude Stein dans Twenty-Seven et participe au processus de création de l’opéra La nuit est ma femme (dont un album studio est sorti en 2022). En 2020, elle écrit et compose avec Eric Champagne le cycle Healing, qui renferme cinq mélodies. En 2021, elle écrit le conte musical La vallée des échos, avec lequel elle fait des ateliers de médiation culturelle auprès d'enfants partout à travers le Québec. Après ses débuts en Europe dans le rôle-titre de Carmen à l’Opéra de Sofia en octobre dernier, elle remporte le premier prix d’opéra du Concours international d’art vocal George Enesco à Paris et la bourse Jeune espoir lyrique canadien. Elle met aussi sa voix au service de la musique de chambre en participant à de nombreux concerts. Elle chante notamment comme soliste dans le Messie, de Haendel, le Requiem de Mozart et dans plusieurs cantates de Bach. Au cours des prochaines saisons, elle fera ses débuts en Italie et en Allemagne. Rose prépare également un album de chansons qui paraîtra prochainement.
Voilà pour le résumé biographique. Faites plus ample connaissance avec la Révélation Radio-Canada en consultant le questionnaire ci-dessous.
Décris-nous ta musique en moins de 15 mots.
Chanson française, poésie, romantisme, musique de chambre; entre Poulenc et Piaf, Brahms et Barbara
À quel âge as-tu commencé à faire de la musique?
Aux dires de mes parents, j’ai commencé à chanter avant de savoir parler. J’ai étudié le piano durant mon enfance, avec très peu d’assiduité, mais j’étais passionnée par les sons. J’aimais inventer ma propre musique. Je refusais d’apprendre quoi que ce soit par cœur; j'inventais tout au fur et à mesure. J’ai découvert le chant classique et l’écriture de chansons en même temps, à l’âge de 12 ans. C’est la liberté que je trouvais dans l’écriture qui m’a permis de cultiver la patience et la discipline nécessaires à la musique classique.
Viens-tu d’une famille de musiciens et de musiciennes?
Mon arrière-grand-père était compositeur et dirigeait une harmonie en France. Tous ses fils jouaient des instruments différents avec lui, et ma grand-mère chantait. J’ai souvent idéalisé cette image de la famille lointaine unie par la pratique artistique dans mon enfance. Mon père et moi aimions bien chanter des morceaux de Charlebois, des Beatles ou de Genesis quand j’étais adolescente. Mon frère jouait de la batterie; mon père, la basse ou la guitare; et moi, j’étais au piano. Le seul hic, c’est que je me tannais vite quand je devais lire des accords ou des partitions. Ma mère m’a toujours encouragée dans tous mes élans créatifs. Elle s’arrangeait pour que j’aie accès aux meilleurs profs et instruments pour me développer. Ça n’a pas de prix de grandir avec autant de soutien.
Raconte-nous ton premier concert rémunéré en tant qu’artiste.
Je ne sais plus exactement quel fut mon premier contrat; il me semble presque que j’ai toujours travaillé. En vérité, c’est que j’ai toujours dit oui à tout ce qu’on me proposait. J’ai chanté des services religieux, dans des bars, dans des restaurants, pour des fêtes d’amis; toutes sortes de musiques, dans les meilleures et les pires circonstances… Mon premier contrat à la sortie de l’école a été assez particulier : j’ai fait mes débuts sur la scène de la salle Wilfrid-Pelletier dans le rôle d’une vilaine demi-sœur de Cendrillon dans LaCenerentola, de Rossini, avec l’Opéra de Montréal à peine quatre mois après avoir reçu mon baccalauréat.
Tu as carte blanche pour créer le spectacle de tes rêves. Avec qui souhaites-tu partager la scène?
J’aimerais chanter une adaptation opératique d’Incendies, de Wajdi Mouawad, sur une musique de Kaija Saariaho, dans une mise en scène de Robert Lepage, sous la baguette de Yannick Nézet-Séguin. Mais j’aimerais aussi chanter mes chansons en version symphonique avec l’Orchestre symphonique de Montréal (OSM) sous la baguette de Rafael Payare.
Tu peux faire trois vœux pour l’année à venir; lesquels sont-ils?
- Apprendre à dire non
- Être engagée comme soliste dans des maisons d’opéra de partout dans le monde
- Arriver à lire et à écrire un peu tous les jours
Quel est le premier album que tu as acheté?
Quand j’étais ado, j’écoutais en boucle les albums de Daniel Boucher. Pour moi, c’était la plus grande vedette du monde! Quand je l’ai rencontré à Petite-Vallée et qu’il a saisi toute l’admiration que je lui portais, il s’est assis au piano avec moi pour m’apprendre les accords du Poète des temps gris. C’est l’un des moments décisifs qui m’ont motivée à écrire mes propres chansons. Je voulais faire partie de ce monde-là, où l’on se partage des poèmes et des accords comme des trésors.
Quel est le premier concert auquel tu as assisté? Quel souvenir en gardes-tu?
La première fois que je suis allée à l’Opéra de Montréal pour entendre La flûte enchantée. J’avais 12 ans. À cette époque, je mesurais déjà presque six pieds. J’étais mal dans ma peau, j’avais toujours l’impression de prendre trop de place, de déranger… Je ne savais pas qu’il existait des salles de concert aussi grandes que Wilfrid-Pelletier. Je ne savais pas qu’on pouvait chanter avec autant d’ampleur! Je me souviens d’avoir été apaisée en imaginant que, sur une scène comme celle-là, j’aurais l’air toute petite. Des années plus tard, j’ai compris que sur une scène comme celle-là, je pouvais m'autoriser à être immense.
Quelle chanson ou quelle œuvre musicale aurais-tu aimé avoir écrite ou composée?
Toutes les chansons de Camille. Quelle femme libre, sensible et débordante d’imagination!
As-tu un talent caché? Si oui, lequel?
Je suis capable de retenir mon souffle pendant un peu plus de trois minutes sous l’eau. Ce n'est rien comparativement aux champions d’apnée, mais c’est un atout utile en tant que chanteuse d’opéra.
Nomme-nous une chanson que tu adores écouter et qui nous surprendrait.
J’aime beaucoup Juice, de Lizzo. J’écoute sa musique quand j’ai besoin d’une grosse dose d’énergie.
Si ta musique était de la nourriture, quelle serait-elle?
Un petit bistrot français dans lequel le chef change le menu chaque jour, selon l’humeur du moment. On reconnaît sa signature aux épices variées, et aux généreuses quantités de beurre et de crème, mais ne demandez surtout pas le plat de la veille.
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