Babysitter, le théâtre de Catherine Léger au grand écran

Le film « Babysitter », scénarisé par Catherine Léger, met notamment en vedette Patrick Hivon et Monia Chokri, dans les rôles de Cédric et Nadine.
Photo : Maison 4:3
Avec Babysitter, la scénariste gatinoise Catherine Léger aborde de front – mais avec humour – les thèmes de la misogynie et du féminisme. Réalisé par Monia Chokri, qui y porte aussi le chapeau de comédienne, le long métrage prend l’affiche dans les cinémas dès vendredi.
Après avoir embrassé la joue d’une journaliste en direct à la télévision – geste qui devient viral sur les réseaux sociaux –, le personnage de Cédric (Patrick Hivon) perd son emploi et se lance dans l’écriture d’un livre d’excuses adressées aux femmes. À la maison, son couple bat de l’aile depuis l’arrivée de leur enfant.
Cédric fait une quête d’introspection hyper narcissique pour régler ses problèmes de misogynie, mais ne s’attaque pas à la misogynie du quotidien : il n’aide pas sa femme [Nadine, interprétée par Monia Chokri], avec sa charge mentale, qui a un peu de difficulté avec le bébé
, explique Catherine Léger.
La Gatinoise a adapté sa propre pièce de théâtre pour qu’elle soit transposée des planches au grand écran.
« Ce n’est pas un film pamphlétaire. C’est un film qui regarde de front des personnages qui vivent à une époque qui change, où le féminisme fait partie de toutes les conversations, et qui n’ont pas le choix de changer eux aussi pour s’adapter, même s’ils sont parfois dépassés ou confus. »
Misogynie, féminisme et intimité
Abordés avec humour et légèreté
, les thèmes de la misogynie, du féminisme et de l'intimité du couple sont au cœur de Babysitter.
Comme femme, on n’a pas toujours envie de se battre. Il y a encore plusieurs enjeux et batailles à mener, alors j’ai l’impression qu’on a besoin d’amener cette bataille à un niveau plus large public avec la comédie. Le rire apporte une certaine détente
, souligne Catherine Léger, qui signe le scénario d’un quatrième long métrage, après La déesse des mouches à feu et Charlotte a du fun, entre autres.
L’arrivée de la nounou dans la vie de Nadine et Cédric devient un point central de l’histoire. Cette dernière, que Catherine Léger considère comme étant une « Mary Poppins un peu trash », permet d’incarner les fantasmes un peu clichés qu’on accepte dans l’imaginaire
, mentionne-t-elle.
« Quand tu es confronté à la misogynie de ces fantasmes-là, liés aux femmes qui sont là pour prendre soin, [comme] des infirmières, des babysitters ou des bonnes, ça devient un peu étrange. Je voulais jouer dans l’imaginaire et brasser les cartes. »
Ce personnage suscite également une réflexion sur les rapports de domination entre les genres. À partir du moment où cette femme ne donne pas de prise aux hommes pour qu’ils la traitent comme une fille fragile, ils ne savent plus comment agir avec elle
, ajoute Catherine Léger.
Du théâtre au cinéma
D’abord écrit pour la scène, le texte de Babysitter a dû être adapté pour le grand écran.
Il fallait faire exploser le cadre, d’une certaine façon. La pièce était un huis clos. Ça se passait toujours dans la maison, le salon, la chambre du bébé. Là, il fallait apporter un univers plus riche
, souligne la dramaturge et scénariste, qui a collaboré avec Monia Chokri.
Le long métrage arrive au cinéma cinq ans après la présentation de la pièce dans les salles de théâtre, en 2017. Entre-temps, le contexte a changé, et certains éléments ont été modifiés.
On a changé la prémisse
, fait valoir la Gatinoise. Dans la pièce, la blague était une blague vulgaire. Il n’y avait pas de geste. Finalement, on a changé la faute initiale.
« Quand on a fait le film, c’était arrivé à une journaliste [au Québec], qui faisait un direct à la télé : un gars est arrivé et lui a donné un bisou sur la joue. En France aussi. C’était un phénomène plus mondial. »
À la réalisation, la signature de Monia Chokri a permis d’amener le scénario dans une direction différente, dans un imaginaire beaucoup plus éclaté
, renchérit la scénariste. Monia Chokri, qui porte aussi le chapeau d’actrice dans le film, s'est permis de jouer avec les codes de la comédie d’horreur.
Je pense que cela apporte des nuances quand on joue sur des thèmes difficiles et délicats. En les abordant de manière plus grande que nature, ça crée une distance avec le spectateur, en étant vraiment dans le plaisir du film, mais après, il y a une réflexion qui reste
, conclut Catherine Léger.
Babysitter prend l’affiche dès vendredi.