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Moscou accélère son processus de russification des régions du sud ukrainien

Le Parlement russe adopte à toute vapeur le projet de loi permettant aux Russes de plus de 40 ans de s'engager dans l'armée.

Vue aérienne de la ville, incluant une statue qui la surplombe. Des véhicules militaires sont visibles.

Vue aérienne de la ville de Kherson, la première ville d'envergure occupée par la Russie au début de la guerre. La ville comptait jadis plus de 250 000 habitants, mais beaucoup ont fui depuis.

Photo : Getty Images / AFP/ANDREY BORODULIN

Le président russe Vladimir Poutine a signé mercredi un décret permettant aux habitants des régions de Zaporijia et de Kherson d’obtenir un passeport russe via une procédure simplifiée, franchissant une nouvelle étape en vue de la russification du sud de l’Ukraine.

Si la région de Kherson a été rapidement conquise par l’armée russe au début de la guerre, celle de Zaporijia n’est pas encore entièrement tombée. La capitale de la région, aussi appelée Zaporijia, demeure notamment sous contrôle ukrainien.

Le décret présidentiel approuvé par le maître du Kremlin élargi en fait une disposition qui s’appliquait depuis 2019 aux habitants des républiques prorusses autoproclamées de Louhansk et Donetsk qui ont vu le jour lors de la guerre de 2014.

Des passeports russes ont déjà été délivrés à quelque 800 000 résidents de ces deux territoires, dont Moscou a formellement reconnu l’indépendance tout juste avant d’envahir l’Ukraine. Des combattants des deux territoires font aujourd’hui la guerre aux côtés de la Russie.

L'annonce a été rapidement fustigée par le ministère ukrainien des Affaires étrangères, qui a dénoncé une violation flagrante de l'intégrité territoriale du pays.

« L'octroi forcé de passeports aux Ukrainiens à Kherson et Zaporijia est une nouvelle preuve de l'objectif criminel de la guerre de la Russie contre l'Ukraine. »

— Une citation de  ministère des Affaires étrangères de l'Ukraine, dans un communiqué
Notre     dossier Guerre en Ukraine

D’autres mesures de russification de la région de Kherson ont déjà été annoncées. Lundi, par exemple, les nouvelles autorités municipales installées par Moscou ont annoncé que le rouble russe y avait désormais cours légal.

La monnaie ukrainienne, la hryvnia, y est toujours acceptée, mais le chef adjoint de la nouvelle administration militaro-civile de Kherson, Kirill Stremooussov, a dit espérer que la région passe entièrement au rouble d’ici la fin de l’année.

Il y a deux semaines, le même homme avait affirmé qu’il demanderait formellement au président Poutine d’intégrer la région de Kherson en tant que sujet à part entière de la Fédération de Russie, et que toute la base juridique devant le permettre serait prête avant la fin de l'année.

Des gens regroupés autour de hérissons tchèques manifestent dans une rue.

Depuis le début de l'occupation russe, des citoyens de Kherson ont manifesté leur mécontentement, comme le montre cette photo prise le 18 mars. Plusieurs de ces manifestations ont été réprimées sans ménagement par les autorités prorusses.

Photo : La Presse canadienne / AP/Olexandr Chornyi

Le gouvernement ukrainien, qui promet de libérer Kherson, a longtemps avancé que Moscou comptait organiser un référendum bidon pour justifier un rattachement à la Russie, mais M. Stremooussov a depuis fait savoir qu’il n’en serait rien, puisque la communauté internationale n'avait pas reconnu le référendum de rattachement de la Crimée à la Russie, en 2014.

La région de Kherson est essentielle à la Russie pour approvisionner en eau la péninsule de la Crimée, annexée en 2014. Sa conquête permet aussi de constituer un pont terrestre reliant la Crimée à la région séparatiste prorusse de Donetsk et à la Russie.

En occupant la région de Kherson, toute la portion nord-est de Zaporijia et la ville de Marioupol, la Russie prive aussi l’Ukraine de tout accès à la mer d’Azov. L’accès de l’Ukraine à la mer Noire n’est plus que théorique, étant donné le blocus naval de l’armée russe.

Des hommes plus âgés dans l'armée russe

Le Parlement russe a approuvé mercredi le projet de loi permettant aux Russes de plus de 40 ans et aux étrangers de plus de 30 ans de s'engager dans l'armée.

Les députés de la Douma, la chambre basse du Parlement russe, ont approuvé le projet de loi à toute vapeur, en procédant aux trois lectures réglementaires au cours d'une seule séance.

La chambre haute, le Conseil de la Fédération, a donné son accord peu après et le président Vladimir Poutine devrait la signer incessamment pour lui donner force de loi.

Un soldat russe au milieu d'une rue. En arrière-plan, des gens marchent dans une rue. Des immeubles de logements carbonisés sont visibles.

Un soldat russe en patrouille dans Marioupol, le 12 avril.

Photo : Getty Images / AFP/ALEXANDER NEMENOV

Cette loi est considérée comme un moyen pour les forces armées russes d'élargir le recrutement, les pertes humaines subies depuis le début de la guerre étant vraisemblablement élevées.

« Aujourd'hui, en particulier, nous devons renforcer les forces armées et aider le ministère de la Défense. Notre commandant suprême fait tout pour que nos forces armées gagnent, et nous devons l'aider. »

— Une citation de  Viatcheslav Volodine, président de la Douma

Les forces russes ont subi des pertes importantes lors des combats en Ukraine. La Défense russe a indiqué le 25 mars que 1351 soldats avaient été tués en Ukraine et 3825, blessés. Aucune mise à jour n'a été offerte depuis.

Kiev affirme avoir tué plus de 29 200 soldats, un chiffre invérifiable, tandis que des services de renseignements occidentaux croient que les pertes sont de l'ordre de 12 000 à 15 000.

Vladimir Poutine serre la main d'un homme portant un pyjama bleu dans une chambre d'hôpital. Un autre homme est au garde-à-vous.

Le président russe Vladimir Poutine a rendu visite mercredi pour la première fois à des soldats russes blessés en Ukraine.

Photo : Reuters / Spoutnik

Une dette remboursée en roubles

La Russie remboursera sa dette en roubles, a indiqué mercredi le ministère russe des Finances, après que les États-Unis ont décidé de mettre fin à partir de mercredi à une exemption lui permettant de payer en dollars.

Étant donné que le refus de prolonger cette licence rend impossible de continuer à honorer la dette extérieure en dollars, les remboursements se feront en devise russe avec la possibilité de les convertir ensuite en devise originale via le National Settlement Depository (NSD) qui servira d'agent-payeur, a-t-il indiqué dans un communiqué. Le NSD est l'organisme russe chargé du dépôt des titres financiers échangés dans le pays.

« La situation actuelle n'a rien de commun avec la situation de 1998, quand la Russie n'avait pas assez de fonds pour rembourser ses dettes. Aujourd'hui nous avons l'argent, et la volonté de payer est là aussi. »

— Une citation de  Anton Silouanov, ministre des Finances de la Russie, cité dans le communiqué

Cette situation créée artificiellement par un pays inamical n'aura pas d'effet sur la vie des Russes, a aussi assuré le ministre.

Mardi, le Trésor américain a annoncé avoir décidé de mettre fin à partir de 0 h 01 mercredi, heure de Washington, à une exemption permettant à Moscou de payer ses dettes en dollars. En place depuis le début des sanctions occidentales contre la Russie, cette exemption avait permis à Moscou d'échapper au défaut de paiement.

La mesure de Washington prend effet deux jours avant la prochaine échéance de paiement pour Moscou, qui porte sur un peu plus de 100 millions de dollars d'intérêts sur deux obligations. Selon le Wall Street Journal citant l'agence de presse russe officielle Tass, ces paiements auraient déjà été effectués.

Outre l'échéance du 27 mai, le gouvernement russe doit encore honorer 12 paiements d'ici la fin de l'année.

Une levée des sanctions pour éviter une crise alimentaire mondiale?

Le ministre adjoint des Affaires étrangères de la Russie, Andreï Roudenko, a exigé mercredi une levée des sanctions visant Moscou comme condition pour éviter la crise alimentaire mondiale qui se dessine en raison de la guerre.

La résolution du problème alimentaire passe par une approche coordonnée, impliquant notamment la levée des sanctions qui ont été instaurées contre les exportations russes et les transactions financières, a déclaré M. Roudenko, cité par les agences de presse russes.

Il a également exigé le déminage par Kiev des ports de la mer Noire pour que les navires puissent exporter les céréales. Selon le diplomate russe, la Russie est prête à assurer un couloir humanitaire aux bateaux.

Des membres d'une équipe de déminage à l’œuvre pour détruire un missile non explosé en Ukraine.

Des membres d'une équipe de déminage à l’œuvre pour détruire un missile non explosé dans un champ près du village de Grygorivka, dans la région de Zaporijia (archives)

Photo : Getty Images / DIMITAR DILKOFF

Le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kouleba a dénoncé cette offre. C'est un chantage manifeste. On ne peut pas trouver un meilleur exemple de chantage dans les relations internationales, a-t-il fustigé au Forum économique mondial à Davos en Suisse.

Le ministre britannique de la Défense, Ben Wallace, a aussi rejeté cette idée. Les céréales sont pour tout le monde. La Libye, le Yémen, des gens partout dans le monde comptent sur ces céréales pour se nourrir, a-t-il dit, avant d'appeler la Russie à faire la bonne chose, au nom de l'humanité.

Réputée pour ses terres très fertiles, l'Ukraine était avant l'offensive le quatrième exportateur mondial de maïs et en passe de devenir le troisième exportateur de blé. Mais le conflit a bouleversé sa production agricole ukrainienne et ses capacités d'exportation, suscitant le risque d'une grave crise alimentaire mondiale.

Les exportations de céréales et d'engrais produits en Russie, autre grande puissance agricole, ont également été fortement perturbées par les sanctions occidentales, qui renforcent la menace de pénuries.

Moscou a par ailleurs été accusé d'avoir dérobé des stocks de céréales ukrainiennes dans les zones conquises par son armée. Je démens cela fermement. Nous ne volons personne, a déclaré mercredi Andreï Roudenko.

Avec les informations de Agence France-Presse, et Reuters

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