Les mesures pour aider les ex-jeunes de la DPJ insuffisantes, selon un rapport

Même s'ils ont bénéficié d'un programme de transition vers l'âge adulte, des jeunes se retrouvent en situation d'itinérance à leur sortie de la DPJ.
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Le programme de la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) qui prépare les jeunes à quitter le système, lorsqu’ils atteignent 18 ans, ne parvient pas à les protéger suffisamment contre l’itinérance ou le décrochage scolaire, indique un nouveau rapport de recherche.
Nos données montrent que les jeunes vivent des difficultés importantes au sortir de la protection de la jeunesse
, résume Martin Goyette, professeur à l’ENAP et l’un des auteurs du rapport.
Avec son équipe, il s’est intéressé à la trajectoire de vie d’un peu plus de 300 jeunes qui ont bénéficié du Programme qualification jeunesse (PQJ).
Ce programme s’adresse aux adolescents de la DPJ qui demandent un accompagnement afin de les préparer à leurs 18 ans, lorsqu'ils n'auront plus les services du système. Seul un nombre restreint de jeunes y a accès à l’heure actuelle.
En comparant leur cheminement à celui d’autres jeunes de la DPJ qui n’ont pas bénéficié du programme, les chercheurs ont constaté d’importantes différences.
Ils ont découvert que presque 15 % des jeunes ayant bénéficié du Programme qualification jeunesse n’étaient ni au travail ni aux études. Étonnamment, il s’agit d’un taux deux fois plus élevé que chez les jeunes n’ayant pas reçu le soutien offert par le programme.
Les auteurs du rapport ont aussi constaté que les jeunes ayant bénéficié du PQJ étaient plus à risque de subir un épisode d’itinérance à leur sortie du système de protection de la jeunesse que ceux n’ayant pas pris part au programme.
Des résultats qui s’expliquent
Comment des jeunes ayant bénéficié d’un accompagnement peuvent-ils s’en sortir moins bien que ceux qui n’y ont pas eu accès? L’explication est simple : le PQJ s’adresse en priorité aux jeunes qui vivent les plus grandes difficultés.
Par exemple, les participants au programme sont plus nombreux à déclarer avoir des problèmes de santé mentale que les autres enfants de la DPJ en général.
« Si on prend les jeunes qui ont les perspectives les plus sombres [...] il ne faut pas s'étonner que, de l'autre côté de la clôture, lorsqu'ils sortent de placement, ils aient des indicateurs moins favorables. »
D’une certaine manière, le Programme qualification jeunesse atteint donc son objectif, puisqu’il permet d’offrir du soutien aux jeunes qui sont le plus à risque. Le PQJ est une intervention absolument essentielle
, insiste Martin Goyette.
Il constate toutefois l’urgence de trouver d’autres solutions, parce que le PQJ, à lui seul, ne peut pas combler l'ensemble des besoins
en matière de logement, de scolarisation ou d’emploi de ces jeunes qui en arrachent déjà.
Le PQJ ne parvient pas à donner un toit à tous les jeunes sortant du PQJ. De croire que le PQJ peut faire ça est une mauvaise chose, parce qu'il n'est pas possible, compte tenu des moyens qu'il a, de réaliser cet objectif-là
, indique M. Goyette.
Créer de nouveaux programmes
Récemment, le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, Lionel Carmant, a promis d’offrir une meilleure transition vers l’âge adulte aux jeunes de la DPJ.
M. Carmant veut rendre le Programme qualification jeunesse accessible au plus grand nombre de jeunes possible et le bonifier en y ajoutant des services. Or, ce n’est pas la bonne solution, selon le professeur Goyette.
S’appuyant sur les recommandations de la commission Laurent, le professeur Goyette croit que le Québec doit créer de nouveaux programmes pour aider les jeunes à se loger, à se scolariser et à dénicher du travail lorsqu’ils quittent la DPJ.
« On doit véritablement développer, comme dans d'autres juridictions, des programmes importants qu'on appelle des programmes de soutien prolongé postplacement. »
Par courriel, l'attaché de presse du ministre Carmant indique cependant que les intentions gouvernementales restent les mêmes.
Nous continuerons de voir de quelle façon nous pouvons améliorer le programme, écrit Lambert Drainville. L’objectif à long terme serait d’éventuellement être en mesure d’étendre l’accès au plus grand nombre de jeunes possibles.
Il ajoute que la transition vers la vie adulte est une priorité
pour le gouvernement et rappelle qu'un comité a été mandaté pour étudier la révision du PQJ. Les recommandations sont attendues à l'automne. On garde toutes les portes ouvertes pour le futur
, conclut M. Drainville.
Chaque année, environ 2000 jeunes quittent le système de la DPJ parce qu’ils ont atteint l’âge de la majorité.