Sortir de la pauvreté coûte encore plus cher en 2022 au Québec
L'IRIS affirme qu'en 2022 au Québec, il faut entre 25 128 $ et 34 814 $ pour permettre à une personne vivant seule d'atteindre un niveau de vie digne et sans pauvreté. (Archives)
Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers
L’augmentation effrénée de l’inflation et la flambée des coûts de l’essence observées au cours de la dernière année ont fait grimper de façon importante le niveau de revenu à atteindre pour vivre dignement et hors de la pauvreté au Québec.
C’est du moins le constat que dresse l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS), qui dévoile jeudi sa huitième étude annuelle portant sur le revenu viable au Québec, un concept élaboré par l’Institut afin de déterminer ce qu’il en coûte pour vivre dignement, sans craindre de tomber dans la pauvreté à la première occasion.
Le revenu viable, c'est une mesure de sortie de pauvreté puis de vie digne. On tient compte des dépenses nécessaires pour atteindre un certain niveau de vie viable [dont] le logement, le transport [et] l'alimentation, mais on inclut aussi une marge de manœuvre pour pouvoir faire des choix [et] faire face à des imprévus
, explique en entrevue à Radio-Canada Julia Posca, chercheuse à l’IRIS .
L’Institut y voit un indice complémentaire, mais surtout plus juste et exhaustif que la mesure du panier de consommation (MPC), qui s’intéresse à la seule couverture des besoins de base.
7 villes étudiées
Comme il le fait déjà depuis quelques années, l’IRIS
a établi le revenu viable de trois types de ménage dans sept localités québécoises.Pour atteindre un niveau de vie digne et sans pauvreté au Québec en 2022, l’Institut calcule qu’un ménage constitué d’une personne seule a besoin d’un revenu après impôts et transferts oscillant entre 25 128 $ et 34 814 $, selon son lieu de résidence.
Si le revenu viable d'une personne vivant seule a connu des augmentations relativement modestes de 2,75 % à Montréal et de 2,84 % à Saguenay, il a bondi de 5,16 % à Gatineau et de 6,76 % à Sept-Îles.
Ces disparités s’expliquent en partie par les coûts de transport. Pour une ville comme Sept-Îles, où le transport en commun ne permet pas d’effectuer ses déplacements vers l’école, la garderie ou le travail aussi bien qu’à Montréal, par exemple, l’IRIS
inclut dans son calcul du revenu viable les dépenses associées à la possession d’une voiture.Dépendance à l'automobile
Avec un prix de l’essence qui a franchi la barre des 2 $ le litre dans plusieurs localités du Québec, avoir un véhicule coûte encore plus cher en 2022 que l’année précédente.
Les coûts d'énergie ont augmenté et ç’a fait augmenter le niveau du revenu viable, particulièrement pour les personnes qui habitent dans des villes où il y a une grande dépendance à l'automobile
, précise Julia Posca.
C’est sans compter les hausses de prix touchant les autres produits de consommation. Rappelons que l’inflation a atteint 6,7 % en mars au Canada, du jamais-vu en plus de 30 ans.
Selon l’IRIS
, l’influence du prix de l’essence sur le revenu viable milite en faveur d’investissements additionnels dans les transports en commun.« Développer le transport en commun demeure une mesure efficace pour lutter contre les coûts de la vie, particulièrement dans les villes où ce [type de] transport est mal développé. »
L’IRIS
estime que son étude sur le revenu viable montre qu’il est impossible, pour une personne seule, de vivre décemment avec les prestations d’aide sociale (10 673 $), de solidarité sociale (15 017 $) ou de solidarité sociale de longue durée (18 161 $).Chèque de 500 $
Le versement ponctuel de 500 $ offert par le gouvernement Legault aux personnes touchant des revenus jusqu’à 100 000 $ ne permet pas aux bénéficiaires de ces aides d'atteindre un revenu jugé viable.
Si le gouvernement souhaitait vraiment lutter contre la pauvreté, il faudrait augmenter de manière substantielle ces aides-là
, fait valoir Julia Posca.
Le même constat s’applique aux personnes qui travaillent à temps plein (35 heures par semaine) au salaire minimum.
Manque à gagner
Ce dernier a beau être récemment passé de 13,50 $ à 14,25 $ l’heure au Québec, il ne permet pas d’atteindre un revenu annuel supérieur à 24 174 $.
Pour que les plus petits salariés puissent vivre dignement, l’IRIS
évalue que le salaire minimum devrait atteindre au moins 18 $ l’heure.Là encore, ce serait insuffisant pour arriver à boucler ses fins de mois dans les villes où le revenu viable est plus élevé.
Avec des informations de David Rémillard