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Justin Trudeau envisage de renforcer le cadre légal du droit à l’avortement

Le premier ministre du Canada devant les micros et les caméras des journalistes.

Le premier ministre Justin Trudeau a répondu aux questions des journalistes sur le droit à l'avortement au Canada.

Photo : La Presse canadienne / Adrian Wyld

Radio-Canada

L'accès « légal et sécuritaire » à des services d'interruption volontaire de grossesse (IVG) au Canada devrait être protégé, voire renforcé, a plaidé mercredi le premier ministre Justin Trudeau, dans la foulée des débats qui embrasent les États-Unis depuis qu'il a été révélé que la Cour suprême pourrait annuler l'arrêt Roe c. Wade.

On est en train de regarder le cadre légal pour voir comment on peut s’assurer que les droits des femmes vont toujours être respectés, a-t-il lancé, en matinée.

M. Trudeau a chargé les Jean-Yves Duclos (Santé) et Marci Ien (Femmes, Égalité des genres et Jeunesse) d’étudier le dossier rapidement, avec pour objectif d'assurer que, pas seulement maintenant, mais que sous n’importe quel autre gouvernement dans l’avenir, les droits des femmes soient bien protégés.

Le premier ministre réagissait ainsi à l’étonnante fuite de document qui a révélé lundi que la Cour suprême des États-Unis pourrait bientôt annuler l'arrêt Roe c. Wade qui protège le droit à l’avortement à l’échelle fédérale depuis 1973.

Notre gouvernement ne va jamais reculer dans la défense des droits des femmes, ici, à la maison et partout dans le monde, a-t-il assuré.

Aller plus loin?

La lettre de mandat du ministre Duclos lui demande de renforcer le respect de la Loi canadienne sur la santé.

Elle l'enjoint aussi de développer un portail d'information sur les droits en matière de santé sexuelle et reproductive et d'appuyer les organismes dirigés par des jeunes qui répondent aux besoins de ceux-ci en matière de santé sexuelle et reproductive.

Avant la période des questions, mercredi après-midi, M. Duclos est venu expliquer que le gouvernement fédéral a la responsabilité de s'assurer que les principes de la Loi canadienne sur la santé sont compris et acceptés, notamment l'obligation de fournir des services de santé reproductive de manière gratuite et accessible.

La loi est solide, mais les mécanismes de respect de la loi doivent être améliorés, a-t-il déclaré.

Une loi, c'est beau, mais il faut aussi l'appliquer.

Une citation de Jean-Yves Duclos, ministre fédéral de la Santé

Appelé à clarifier ses propres intentions en mêlée de presse, mercredi après-midi, le premier ministre Trudeau a lui aussi évoqué la possibilité de renforcer la protection du droit à l’avortement des Canadiennes, affirmant qu'il n'[écartait] pas la possibilité d'aller plus loin, dans la révision du cadre légal entourant l'avortement.

Lors de la dernière campagne électorale, les libéraux avaient promis d'améliorer l'accès à l'avortement au Canada en réglementant cet accès en vertu de la Loi canadienne sur la santé.

L'avortement « décriminalisé » et non « légalisé » au Canada

Le droit à l’avortement n’est pas protégé par une loi au Canada, mais par la jurisprudence, plus précisément par la décision R. c. Morgentaler rendue par la Cour suprême en 1988.

Le Dr Henry Morgentaler était aux prises avec la justice parce qu’il pratiquait des avortements dans sa clinique privée de Toronto. À l’époque, l’article 251 du Code criminel interdisait à quiconque de procurer l'avortement d'une personne du sexe féminin, en plus d’interdire aux femmes d’arrêter volontairement une grossesse.

Sa cause s’est rendue en Cour suprême, qui a finalement conclu, dans une majorité de cinq juges contre deux, que l’article 251 constitue clairement une atteinte à l’intégrité physique et émotionnelle d’une femme.

Forcer une femme, sous la menace d’une sanction criminelle, à mener le fœtus à terme, à moins qu’elle ne remplisse certains critères indépendants de ses propres priorités et aspirations, est une ingérence profonde à l’égard de son corps et donc une atteinte à la sécurité de sa personne, notait-on.

Depuis, l'avortement est décriminalisé au Canada, mais sa pratique et son accès ne sont pas enchâssés dans une loi fédérale.

Le Dr Morgentaler se tient devant une bannière pro-choix.

Henry Morgentaler, médecin canadien et militant pro-choix

Photo : Radio-Canada

Faudrait-il légiférer pour protéger le droit à l'avortement? Le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, a invité à la prudence sur cette question, mercredi. Créer un cadre, ça veut dire que des gens dans l'avenir pourraient vouloir resserrer le cadre alors que d'autres voudraient l'élargir, a-t-il prévenu.

Mardi, une motion bloquiste réitérant le libre choix de la femme de se faire avorter ou non a été défaite aux Communes, faute du consentement unanime des députés.

La leader parlementaire adjointe bloquiste, Christine Normandin, a affirmé par la suite avoir entendu des "non" assez retentissants du côté des banquettes conservatrices.

La bataille de l'accès

Le fait qu’aucune loi fédérale ne régisse le droit à l’avortement fait toutefois en sorte que l'accès à de tels services demeure inégal un peu partout au pays.

Au Nouveau-Brunswick, par exemple, le gouvernement de Blaine Higgs limite l’accès à l’avortement chirurgical à trois établissements de la province : les deux hôpitaux de Moncton et l'hôpital de Bathurst.

Selon le chef néo-démocrate Jagmeet Singh, le gouvernement fédéral devrait accroître le financement des services d'avortement – une idée qui empiéterait sur les compétences des provinces.

Il devrait aussi inclure maintenant, tout de suite les contraceptifs dans le régime d'assurance-médicaments universel qui doit être adopté d'ici la fin de 2023 en vertu de l'entente entre le NPD et les libéraux.

Le gouvernement libéral, actuellement, se concentre sur le financement d'études pour regarder la réalité de l’accès [à l'avortement], qui n’est pas pareil partout au pays, a expliqué Justin Trudeau mercredi matin.

Motus et bouche cousue chez les conservateurs

Parmi les députés et sénateurs conservateurs qui se rendaient au caucus de leur parti, mercredi, la quasi-totalité a évité les questions des journalistes sur l'avortement. Ils avaient reçu une note, mardi, leur demandant d'éviter de commenter la nouvelle provenant des États-Unis.

Le sénateur Pierre-Hugues Boisvenu a été l'un des rares à s'arrêter. Il a indiqué que le dossier est mort, c'est réglé et que si Jean Charest est élu chef conservateur, ces fantômes-là vont rester dans le placard.

À ce sujet, il estime que le meneur dans la course à la direction du parti, Pierre Poilievre, ne peut pas se situer dans une zone grise et doit dire clairement s'il est pro-vie ou pro-choix.

Je pense que des chefs, dans le passé, ont tenté cette stratégie de vouloir plaire à maman [et] à papa, mais ça [ne] marche pas. Il va falloir que M. Poilievre mette ses culottes et se prononce.

Une citation de Pierre-Hugues Boisvenu, sénateur conservateur

Pierre Poilievre a déclaré, mardi soir, que s'il est élu chef et premier ministre, son gouvernement n'introduira ni n'adoptera aucune loi restreignant l'avortement. Il n'a cependant pas précisé s'il permettrait à ses députés de présenter de tels projets de loi.

Les conservateurs ont tenté de restreindre le droit à l’avortement par le passé. Un projet de loi déposé par le gouvernement de Brian Mulroney en 1991 voulait limiter ce droit aux femmes dont la santé était en danger en raison de la grossesse. Il a été refusé par le Sénat.

Avec l’arrivée au pouvoir de Stephen Harper, en 2006, différents projets de loi d'initiative parlementaire touchant directement ou indirectement la question de l’avortement et du fœtus ont été déposés. Ils ont tous été infructueux.

Avec les informations de La Presse canadienne

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