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La colocation intergénérationnelle pour briser l’isolement pendant la pandémie

Nick et Ken sont assis et sourient.

Nick Brown-Hernandez, 27 ans, et Ken Earle, 83 ans, ont décidé d'habiter ensemble malgré les risques de la pandémie.

Photo : Radio-Canada

Des agences qui facilitent la colocation entre des aînés et des étudiants universitaires ont constaté une hausse marquée du nombre d’aînés qui voulaient un colocataire étudiant depuis le début de la pandémie. Selon des experts, la raison est simple : pour plusieurs personnes âgées, l’isolement social pose un plus grand risque qu’attraper le virus.

Ken Earle habite dans son appartement à Hamilton depuis plus de 10 ans. Son chez-soi est accueillant, avec une horloge qui sonne chaque quart d’heure et des plantes un peu partout, qu’il déménage sur le balcon pendant l’été.

Ken sourit.

Ken Earle a accepté d'accueillir Nick Brown-Hernandez en novembre 2021, juste avant la première vague du variant Omicron.

Photo : Radio-Canada

À 83 ans, Ken a beaucoup d’histoires à raconter. Et depuis le mois de janvier, c’est un étudiant de 27 ans qui a la chance de les entendre : Nick Brown-Hernandez, qui est à la maîtrise à l’Université McMaster.

On fait toutes sortes de choses ensemble. On prend notre café ensemble, on soupe ensemble, on écoute des films… mais les films ne sont pas aussi intéressants que ses histoires, lance Nick en riant.

« On s’entend vraiment bien. Nous avons pris le risque et nous avons été très chanceux. »

— Une citation de  Nick Brown-Hernandez, étudiant à l’Université McMaster

En novembre 2021, juste avant la première vague du variant Omicron, Nick se cherchait un logement à Hamilton pour la session d’hiver en personne à l’Université McMaster.

Nick sourit.

Nick Brown-Hernandez est un étudiant à la maitrise à l'Université McMaster.

Photo : Radio-Canada

C’était très difficile pour moi de trouver un logement, puisque tout le monde cherchait en même temps, dit-il.

Dans ses recherches, il a trouvé le programme Symbiosis, qui jumelle les aînés de Hamilton avec des étudiants pour une colocation de durée variable. Pour sa part, Ken Earle avait participé au programme auparavant, mais la pandémie ne l’a pas empêché d’accueillir Nick.

C’est certain que j’étais un peu réticent, je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre. Est-ce que j’allais devoir me battre pour qu’il porte son masque? Heureusement, on s’entend très bien, explique Ken.

« C’est difficile quand on est plus vieux, puisqu’on devient invisible dans la société. On devient donc plus isolé. C’est difficile de se faire des amis. »

— Une citation de  Ken Earle

Ken ajoute qu’avec la pandémie, plusieurs de ses amis sortent moins parce qu’ils ont peur du virus. Il les comprend, mais pour lui, c’est important de continuer d’être social et de rencontrer des gens.

Ce programme me permet de rencontrer des gens et de créer de nouveaux liens d’amitié, constate-t-il.

Une hausse de demande de colocations

Et Ken n’est pas le seul qui a voulu briser son isolement social pendant la pandémie.

Selon des organismes qui facilitent ce type de jumelage, il y a eu une hausse marquée de demandes de colocations de la part des aînés pendant la pandémie.

La fondatrice du programme Symbiosis, Soumeya Abed, explique qu’elle était très surprise d’avoir eu une augmentation de candidatures d’aînés au début de la pandémie, surtout puisqu’en temps normal, elle recevait beaucoup plus de demandes des étudiants.

Soumeya Abed, Symbiosis de l'Université McMaster de Hamilton, en plan rapproché. Elle sourit, elle a les yeux gris-verts, les cheveux poivre et sel bouclés remontés en queue de cheval. Elle a des boucles d'oreilles en spirale argentées.

Soumeya Abed, Symbiosis de l'Université McMaster de Hamilton

Photo : Radio-Canada

Je demandais aux aînés s’ils avaient des appréhensions ou s’ils avaient peur que les étudiants amènent le virus chez eux. Ils me disaient tous qu’ils prendraient les précautions nécessaires et ils étaient prêts à prendre le risque, dit-elle.

Soumeya Abed ajoute qu’au début de la pandémie, certaines personnes voulaient que les étudiants fassent les courses puisqu’ils avaient peur. D’autres voyaient moins leurs enfants, et voulaient avoir quelqu’un à la maison.

Mais selon elle, une raison qui revenait, c’était l’isolement social causé par la pandémie.

« Une des raisons qui explique la hausse de candidatures d’aînés, je pense, c’est l’isolement, c'est la solitude ressentie pendant la pandémie. Il y avait un désir d’avoir quelqu’un chez soi. »

— Une citation de  Soumeya Abed, fondatrice du programme Symbiosis

Même son de cloche du côté de la compagnie Canada HomeShare, qui opère à travers le pays et jumelle aussi des aînés avec des étudiants.

Selon la porte-parole de l’organisme, Jackie Tanner, ils ont vu un exode d’étudiants en mars 2020, puisque les cours ont commencé à se donner en ligne. Au même moment, le nombre d’aînés qui étaient prêts à accueillir des étudiants a augmenté.

La peur d’attraper la COVID-19 était moindre que la réalité de l’isolement social. Ils savaient qu’il allait avoir un plus grand risque d’attraper le virus, mais ils souffraient déjà de l’isolement, donc pour eux, ça en valait la peine, explique-t-elle.

À lire aussi :

L’isolement social : un risque réel

Le professeur en psychologie de l’Université de Toronto à Scarborough, le Dr Steve Joordens, confirme que l’isolement social est un risque réel, surtout pour les personnes âgées.

Steve Joordens sourit à la caméra.

Le Dr Steve Joordens est professeur en psychologie à l'Université de Toronto Scarborough.

Photo : Radio-Canada

La pandémie nous a forcés à voir l'importance des liens sociaux grâce à leur absence dans nos vies, dit-il.

« Au début de la pandémie, quand j’ai entendu le terme "distanciation sociale", ça m’a fait peur. On avait besoin de plus de liens sociaux, pas de distance. »

— Une citation de  Dr Steve Joordens, professeur en psychologie de l’Université de Toronto, Scarborough

Le psychologue ajoute que cette tendance démontre que la santé émotionnelle est tout aussi importante que la santé physique.

Nos besoins émotionnels peuvent parfois même prendre le dessus sur des risques pour la santé physique à des moments où nous avons vraiment besoin de connexion, explique le Dr Joordens.

De leur côté, la colocation de Ken et Nick finira à la fin avril, alors que la session de Nick va se terminer. Chacun d’entre eux voudrait participer au programme à nouveau puisqu’ils ont tous deux trouvé un ami pour la vie.

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