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D’ex-députés de l’Alliance des gens au pouvoir, « une gifle » pour les francophones

Kris Austin et Blaine Higgs.

Kris Austin était accompagné du premier ministre Blaine Higgs le mercredi 30 mars pour annoncer que l'Alliance des gens du Nouveau-Brunswick était dissoute et que lui et Michelle Conroy se joindraient au Parti progressiste-conservateur.

Photo : Radio-Canada

Au Nouveau-Brunswick, des francophones digèrent mal le passage de deux députés de l’Alliance des gens au Parti progressiste-conservateur. Au moins un membre en règle de ce parti a d’ailleurs claqué la porte à la suite de cette annonce.

Mathieu Gérald Caissie, un ancien candidat dans la circonscription de Baie-de-Shediac, en a fait l’annonce sur Twitter.

Mercredi, le premier ministre Blaine Higgs a annoncé que les deux députés de l’Alliance des gens du Nouveau-Brunswick, Kris Austin et Michelle Conroy, se joignaient au Parti progressiste-conservateur du Nouveau-Brunswick (PCNB).

M. Caissie, qui était jusqu’à récemment le chef de cabinet du ministre Daniel Allain, a indiqué qu’il avait voulu se joindre au Parti pour y défendre les valeurs qui sont chères aux francophones. Il pense que la décision du chef Blaine Higgs d’accepter dans ses rangs les députés Austin et Conroy risque de freiner l’avancement de plusieurs dossiers.

Je pense qu’au sein du Parti, on a besoin des accélérateurs pour la promotion du bilinguisme officiel pour la promotion du français, la culture acadienne, et non des freins. [...] Pour moi, d’être accueilli à bras ouverts par le Parti, c’était une ligne rouge qu’il ne fallait pas franchir, affirme-t-il.

Mathieu Gérald Caissie.

Mathieu Gérald Caissie pense que l'intégration des deux anciens alliancistes va affaiblir la voix des francophones au sein du Parti progressiste-conservateur.

Photo : Gracieuseté

On ne peut pas accepter du jour au lendemain des gens qui sont officiellement contre les destinées du peuple acadien. Le Parti aurait dû réfléchir un peu.

Une citation de Mathieu Gérald Caissie, membre démissionnaire du Parti progressiste-conservateur du Nouveau-Brunswick

L'ex-chef de l'Alliance des gens du Nouveau-Brunswick Kris Austin a indiqué mercredi que puisqu’il n’est plus chef, les décisions finales sur les dossiers qui touchent les langues officielles ne lui reviendront pas. Mais cela ne rassure pas Mathieu Gérald Caissie.

Deux députés ne rejoignent évidemment pas une formation politique sans des discussions préalables. Déjà il faudrait connaître le contenu de ces discussions. Je doute que ces discussions étaient des accélérateurs envers le bilinguisme officiel, affirme M. Caissie.

Une gifle pour les francophones

Selon le politologue de l’Université de Moncton Roger Ouellette, la décision de Blaine Higgs constitue une gifle. Il pense que le Parti aura maintenant beaucoup plus de difficulté à unir politiquement les deux communautés linguistiques.

Il faudra voir comment les francophones du Parti – du moins ce qu’il en reste – vont réagir à ces couleuvres politiques que Blaine Higgs veut faire avaler aux francophones, dit-il.

L’Alliance des gens du Nouveau-Brunswick a souvent pris des positions hostiles à l’égard des dossiers qui touchent les francophones, que ce soit par rapport au bilinguisme dans la fonction publique ou à l’existence même du Commissariat aux langues officielles.

Le président de la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick, Alexandre-Cédric Doucet, se méfie de cette nouvelle association.

Alexandre Cédric Doucet.

Alexandre Cédric Doucet, président de la Société de l'Acadie du Nouveau-Brunswick, se réjouit quand même de la disparition de l'Alliance des gens comme parti politique.

Photo : Zoom

Il y a une grande inquiétude en ce moment dans la communauté acadienne et francophone, dit-il, en ajoutant qu’il a reçu plusieurs messages de francophones du nord de la province à ce sujet.

Il espère toutefois que la dissolution de l’Alliance des gens permettra de mettre un clou dans le cercueil de certaines idées antibilinguisme ou contre la dualité linguistique, mais promet de rester vigilant.

L'Association francophone de municipalités du Nouveau-Brunswick a aussi exprimé ses inquiétudes.

On ne se le cachera pas, c’est inquiétant de voir des gens ayant ouvertement défendu des positions antibilinguisme, et à la limite antifrancophones, se joindre au parti au pouvoir. Ça l’est d’autant plus qu’on est en attente d’action de la part du gouvernement dans le dossier de la révision de la Loi sur les langues officielles, s’inquiète le président de l’AFMNB et maire de Bertrand, Yvon Godin, dans un communiqué.

Des conservateurs veulent se faire rassurants

De son côté, le seul député francophone au sein du caucus conservateur, Daniel Allain, se veut rassurant et rappelle que les nouveaux venus devront respecter la constitution du Parti, qui assure l’égalité des deux communautés linguistiques.

Pour moi il n’est pas question de diluer nos principes en matière de langues officielles.

Une citation de Daniel Allain, ministre des Gouvernements locaux

Le ministre Allain souligne que son rôle de seul député francophone sera d’autant plus important maintenant, mais il ne croit pas que l’adhésion de Kris Austin et Michelle Conroy sera un problème. Il pense que les actions du gouvernement seront jugées au moment opportun par les électeurs.

La francophonie aura besoin de nous évaluer, dit Daniel Allain.

Claude William, président du Parti progressiste-conservateur du Nouveau-Brunswick, le 17 août 2020.

Claude William, président du Parti progressiste-conservateur du Nouveau-Brunswick (archives).

Photo : Radio-Canada

Même son de cloche du côté du président du Parti progressiste-conservateur Claude Williams.

On est ouverts à tous ceux et celles qui veulent joindre notre parti à condition qu'ils adhèrent et respectent la constitution qui s'y rattache. [Kris Austin et Michelle Conroy] ont pris une carte de membre. Alors par principe, ils acceptent les valeurs et les principes de la constitution, dit-il.

Les députés de l'Alliance ont-ils changé?

Toutefois, dans une entrevue en anglais au réseau CBC, jeudi matin, Kris Austin et Michelle Conroy ne tiennent pas exactement le même discours.

Michelle Conroy dit qu'elle maintient ses positions. Mes valeurs et mes croyances sont toujours intactes, dit-elle, jeudi matin.

La nouvelle députée progressiste-conservatrice est donc toujours en accord avec la fusion des régies de santé et l’abolition du commissariat aux langues officielles.

Michelle Conroy, lors d'une mêlée de presse à Fredericton au Nouveau-Brunswick.

Michelle Conroy est la députée de Miramichi au Nouveau-Brunswick.

Photo : Radio-Canada

Les partis d'opposition à l'Assemblée législative estiment qu’il y a un double discours.

On a les membres du gouvernement comme le ministre Allain qui disent que les deux députés vont respecter les principes d’égalité. Mais de l’autre côté, les deux députés disent qu’ils ne vont jamais renier à leur principe et à leur position historique. Donc qui dit vrai, se demande le chef libéral Roger Melanson.

Lors de la période de questions, Roger Melanson a interpellé le premier ministre pour lui demander si M. Austin aurait un portefeuille dans un avenir proche. Blaine Higgs a répondu qu’aucune promesse n’avait été faite.

Il essaie de réparer les pots cassés. Ils essaient de nous vendre ça comme une bonne nouvelle, ajoute pour sa part le député vert Kevin Arseneau.

Pas une première historique

Si l’intégration de deux députés en fait sourciller plus d’un, le politologue Roger Ouellette rappelle qu’il ne s’agit pas d’une première dans l’histoire du Parti progressiste-conservateur.

En 1995, le Parti progressiste-conservateur était divisé après la défaite douloureuse de Richard Hatfield aux mains de Frank McKenna. Le COR Party, qui forme l’opposition officielle en 1991, va être victime de ses querelles internes et Dennis Cochrane, qui était alors chef du Parti progressiste-conservateur, a voulu amener dans le Parti des députés COR. Ça a déplu à un certain Jean Gauvin et celui-ci avait démissionné avec fracas du Parti, rappelle-t-il.

Bernard Lord, lorsqu’il a pris les rênes du Parti, a fermé la porte aux voix dissonantes au bilinguisme officiel et les conservateurs ont pu faire des gains importants dans les régions francophones avec l’élection de députés comme Madeleine Dubé (Edmundston Saint-Basile), Claude Williams (Kent-Sud), Paul Robichaud (Lamèque-Shippagan-Miscou), Jeannot Volpé (Madawaska-les-Lacs), Percy Mockler (Restigouche-La-Vallée), Rose-May Poirier (Rogersville-Kouchibouguac) et Claude Landry (Tracadie-Sheila). En tout, ils étaient neuf francophones au caucus. Huit ont été réélus en 2010.

Le ministre des Finances Blaine Higgs (au centre), accompagné du sous-ministre des Finances, Michael Ferguson (à gauche), et du ministre des Transports, Claude Williams (à droite).

En 2011, il y avait huit députés francophones élus dans le gouvernement conservateur. Sur cette photo, Blaine Higgs, alors ministre des Finances, est accompagné de Claude Williams, qui était ministre des Transports (archives).

Photo : Radio-Canada

L’embellie sera courte. Aux élections générales de 2014, seule Madeleine Dubé est réélue pour le PCNB. En 2018, le seul candidat conservateur à être élu est Robert Gauvin, qui démissionnera en cours de mandat. En 2020, Daniel Allain est aussi le seul francophone à obtenir un siège.

Selon Roger Ouellette, les ponts seront difficiles à rebâtir avec la communauté francophone et il doute que Blaine Higgs soit le chef pour y parvenir.

Ce ne sont pas les francophones qui ont tourné le dos au Parti progressiste-conservateur, c’est le gouvernement de Blaine Higgs qui a tourné le dos aux francophones, conclut-il.

Avec des informations de l'émission La matinale, de Pascal Raiche-Nogue et d'Alix Villeneuve.

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