CODA sacré meilleur film des Oscars, et 6 prix pour Dune, de Denis Villeneuve
L'équipe de CODA a remporté l'Oscar du meilleur film.
Photo : Reuters / MARIO ANZUONI
Dune, de Denis Villeneuve, a été le film le plus récompensé de la 94e cérémonie des Oscars, avec six statuettes. Toutefois, l'Oscar du meilleur film lui a échappé. C'est CODA, adapté du film français La famille Bélier, qui a été sacré meilleur film devant Le pouvoir du chien, coproduit par le Québécois Roger Frappier, pourtant longtemps donné pour favori.
Nommé 10 fois, Dune a reçu 6 Oscars dans les catégories du meilleur montage, de la meilleure musique originale, du meilleur son, de la meilleure photographie, des meilleurs effets visuels et de la meilleure direction artistique. Ce dernier prix a été remis au Québécois Patrice Vermette et à Zsuzsanna Sipos.
Denis, merci beaucoup de nous avoir autorisés à rêver
, a déclaré Patrice Vermette, qui a remercié le réalisateur québécois d'être un très bon ami pour lui.
Et un merci à Jean-Marc Vallée, aussi mon ami
, a-t-il ajouté en référence au cinéaste québécois mort à Noël. Le nom et le visage de Jean-Marc Vallée sont d'ailleurs apparus à l'écran lors de l'hommage rendu par les Oscars aux personnes disparues au cours de l'année.
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Le triomphe de CODA
Toutefois, les Oscars du meilleur scénario adapté et du meilleur film ont échappé à Dune, car c'est CODA qui a été couronné dans ces deux catégories.
Ce film indépendant à petit budget – 15 millions de dollars américains, contre 165 millions pour Dune – sur la vie compliquée d'une famille dont tous les membres sont sourds sauf une fille a donc déjoué les pronostics, faisant mordre la poussière à de nombreux poids lourds en compétition.
Il permet à Apple TV+ de devenir la première plateforme de diffusion en continu à l'emporter aux Oscars dans la catégorie phare du meilleur long métrage. CODA a atterri sur Apple TV+ à l'issue d'une âpre bataille de surenchères, qui a atteint le montant record de 25 millions de dollars américains, après le succès du film lors de sa présentation au festival indépendant de Sundance.
La possibilité que CODA vienne créer la surprise s'était renforcée ces derniers temps. Ce film positif s'est avéré réconfortant en cette période de pandémie et de guerre, et il a remporté successivement le prix du syndicat des acteurs américains (SAG Awards) puis celui de l'association des producteurs (PGA).
Le film mérite d'être là où il est dans cette période dans laquelle on vit. C'est un film important, un film qui fait du bien, qui touche les gens et les rassemble avec ses valeurs humaines
, avait déclaré plus tôt cette semaine, à l'AFP, le producteur de CODA, le Français Philippe Rousselet.
Autre prix pour CODA : celui du meilleur second rôle masculin pour l'acteur américain Troy Kotsur, sourd de naissance.
L'artiste âgé de 53 ans est entré ainsi dans l'histoire en devenant le premier acteur masculin sourd à remporter un Oscar grâce à ce rôle, tout en humour et sensibilité, de père de famille grognon, mais aimant. Troy Kotsur, qui a dédié sa victoire à la communauté des personnes sourdes et handicapées
, a été applaudi en langue des signes par les personnalités invitées à la cérémonie des Oscars lorsqu'il est venu chercher son prix sur scène.
Marlee Matlin est la seule autre artiste sourde à avoir eu un Oscar, pour Les enfants du silence, en 1987.
C'est l'actrice et chanteuse Liza Minnelli qui a remis, avec Lady Gaga, l'Oscar du meilleur film à CODA dans une séquence émouvante. Diminuée et en fauteuil roulant, Liza Minnelli, 76 ans, est apparue tout sourire : Je suis si heureuse d'être là.
Jane Campion oscarisée
La Néo-Zélandaise Jane Campion, la réalisatrice du Pouvoir du chien (The Power of the Dog), a gagné l'Oscar de la meilleure réalisation. Il s'agit du seul prix de la soirée pour ce film coproduit par le Québécois Roger Frappier alors qu'il était en tête des nominations avec 12 mentions.
C'est la deuxième fois que Jane Campion remporte un Oscar. Elle avait reçu le prix du meilleur scénario original en 1994 pour La leçon de piano (The Piano).
Un premier Oscar pour Will Smith et... une gifle
Will Smith a remporté l'Oscar du meilleur acteur pour son rôle dans La méthode Williams (King Richard), où il incarne le père entraîneur des championnes de tennis Serena et Venus Williams.
Je veux m'excuser auprès de l'Académie des Oscars
, a lancé en pleurs l'acteur, qui a provoqué un peu plus tôt un moment de stupeur dans la salle après être monté sur scène pour gifler l'humoriste Chris Rock qui venait de faire une blague sur le crâne rasé de son épouse, Jada Pinkett Smith, atteinte d'alopécie, une chute importante des cheveux.
L'amour vous fait faire des choses folles
, a déclaré Will Smith après avoir reçu son trophée.
Will Smith a giflé Chris Rock, alors qu'il effectuait une présentation sur scène lors des Oscars.
Photo : Reuters / BRIAN SNYDER
Jessica Chastain est elle aussi repartie avec son premier Oscar, celui de la meilleure actrice, pour sa métamorphose dans le film L'incroyable histoire de Miss Tammy Faye (The Eyes Of Tammy Faye).
Chaque jour de tournage, l'actrice de 45 ans a dû revêtir pour ce rôle un lourd attirail fait de prothèses, de postiches et de maquillage pour reproduire les traits et le style clinquant de Tammy Faye Bakker, chanteuse de gospel devenue sur le tard pasteure et militante pour les droits LGBT.
Ariana DeBose primée pour West Side Story
La cérémonie a également récompensé l'actrice américaine Ariana DeBose, qui a décroché l'Oscar du meilleur second rôle féminin pour sa reprise du personnage d'Anita dans West Side Story, revisité par Steven Spielberg. C'est la première fois qu'une femme de couleur ouvertement queer obtient un Oscar.
L'actrice de 31 ans succède ainsi dignement à la légendaire Rita Moreno, originaire comme elle de Porto Rico, qui avait déjà reçu en 1962 un Oscar pour le rôle d'Anita dans la version originale du film. Je vous suis si reconnaissante, votre Anita a ouvert la voie à des milliers d'Anita comme moi
, a-t-elle lancé à la vedette de 90 ans qui l'applaudissait dans la salle.
La magie Disney a une nouvelle fois opéré, puisque Encanto, la fantastique famille Madrigal, célébration de la Colombie, de sa culture et de ses traditions, a remporté le prix du meilleur film d'animation.
Du côté des documentaires, c'est Summer of Soul, film du musicien hip-hop Ahmir « Questlove »Thompson sur un concert mémorable et pourtant oublié à Harlem en 1969, surnommé le « black Woodstock », qui a été primé.
Et Drive My Car, film-fleuve de trois heures du Japonais Ryusuke Hamaguchi, s'est illustré dans la catégorie du meilleur film international. Inspiré de trois nouvelles du recueil Des hommes sans femmes du célèbre romancier Haruki Murakami, le film raconte l'histoire d'un acteur et metteur en scène de théâtre hanté par la mort de son épouse.
Trio féminin à l’animation
Cette année a aussi marqué le retour de personnes en chair et en os à la barre du gala après plusieurs années sans animateur ni animatrice. Amy Schumer, Wanda Sykes et Regina Hall se sont partagé cette mission.
Cette année, l'Académie a embauché trois femmes pour présenter la soirée, car c'est toujours moins cher qu'un homme
, a plaisanté Amy Schumer.
Du côté des prestations musicales, Beyoncé a ouvert le bal avec une spectaculaire interprétation de la chanson de La méthode Williams, en direct depuis le court de tennis de Los Angeles où les championnes Venus et Serena Williams ont fait leurs débuts sportifs.
La distribution d’Encanto : la fantastique famille Madrigal (Encanto) a chanté Don’t Talk About Bruno, grand succès de la dernière année.
Et c'est Billie Eilish et son frère Finneas O'Connell qui ont décroché l'Oscar de la meilleure chanson originale pour No Time to Die, la chanson-thème du dernier James Bond. La cérémonie a été l'occasion de souffler les 60 bougies du tout premier James Bond, Dr No, sorti en 1962.
Une statuette pour le Canadien Ben Proudfoot
Deux Canadiens étaient en lice dans la catégorie du meilleur court métrage documentaire : Ben Proudfoot, pour son film The Queen of Basketball, ainsi que Geoff McLean, pour Audible. Et c'est Ben Proudfoot qui a gagné.
Les autres représentants et représentantes du Canada en nomination – Tamara Deverel, Shane Vieau, Luis Sequeira ou encore J. Miles Dale – n'ont finalement pas mis la main sur une statuette dorée.
Une minute de silence pour l'Ukraine
Une minute de silence a été demandée en hommage à l'Ukraine, envahie par la Russie. Pendant ce bref instant de recueillement, des écrans ont diffusé des messages invitant les gens à envoyer de l'aide, énumérant des besoins essentiels de la population ukrainienne tels que de la nourriture, des soins médicaux ou des couvertures.
Nous vous demandons d'aider l'Ukraine par tous les moyens possibles
, disait l'un des messages.
Parmi les vedettes de retour sur le tapis rouge d'Hollywood après deux ans de pandémie, certaines, comme Jamie Lee Curtis ou Samuel L. Jackson, avaient ajouté à leur costume ou à leur robe de soirée un ruban bleu portant l'inscription WithRefugees
(avec les personnes réfugiées
) pour exprimer leur solidarité avec la population ukrainienne chassée par le conflit. Jason Momoa arborait sur scène une pochette bleu et jaune aux couleurs de l'Ukraine.
Les lauréats et lauréates dans les principales catégories :
Meilleur film
Belfast
CODA
Don’t Look Up : déni cosmique (Don’t Look Up)
Conduis mon char (Drive My Car)
Dune
La méthode Williams (King Richard)
Le parc des merveilles (Licorice Pizza)
Ruelle de cauchemar (Nightmare Alley)
Le pouvoir du chien (The Power of the Dog)
West Side Story
Meilleure réalisation
Kenneth Branagh, Belfast
Ryusuke Hamaguchi, Conduis mon char (Drive My Car)
Paul Thomas Anderson, Le parc des merveilles (Licorice Pizza)
Jane Campion, Le pouvoir du chien (The Power of the Dog)
Steven Spielberg, West Side Story
Meilleur acteur
Javier Bardem, Being the Ricardos
Benedict Cumberbatch, Le pouvoir du chien (The Power of the Dog)
Andrew Garfield, tick, tick… BOOM!
Will Smith, La méthode Williams (King Richard)
Denzel Washington, Macbeth (The Tragedy of Macbeth)
Meilleure actrice
Jessica Chastain, L'incroyable histoire de Miss Tammy Faye (The Eyes of Tammy Faye)
Olivia Colman, Poupée volée (The Lost Daughter)
Penélope Cruz, Mères parallèles (Madres Paralelas)
Nicole Kidman, Being the Ricardos
Kristen Stewart, Spencer
Meilleur acteur dans un second rôle
Ciaran Hinds, Belfast
Troy Kotsur, CODA
Jesse Plemons, Le pouvoir du chien (The Power of the Dog)
JK Simmons, Being the Ricardos
Kodi Smit-McPhee, Le pouvoir du chien (The Power of the Dog)
Meilleure actrice dans un second rôle
Jessie Buckley, Poupée volée (The Lost Daughter)
Ariana DeBose, West Side Story
Judi Dench, Belfast
Kirsten Dunst, Le pouvoir du chien (The Power of the Dog)
Aunjanue Ellis, La méthode Williams (King Richard)
Meilleur film international
Conduis mon char (Drive My Car), Japon
Flee, Danemark
La main de Dieu, Italie
L’école du bout du monde, Bhoutan
Julie (en 12 chapitres), Norvège
Meilleur film d’animation
Encanto : la fantastique famille Madrigal (Encanto)
Flee
Luca
Les Mitchell contre les machines (The Mitchells vs. the Machines)
Raya et le dernier dragon (Raya and the Last Dragon)
Meilleur documentaire
Ascension
Attica
Flee
L’été de la soul (Summer of Soul)
Writing With Fire
Meilleur scénario original
Belfast
Don’t Look Up : déni cosmique (Don’t Look Up)
La méthode Williams (King Richard)
Le parc des merveilles (Licorice Pizza)
Julie (en 12 chapitres)
Meilleur scénario adapté
CODA
Conduis mon char (Drive My Car)
Dune
Poupée volée (The Lost Daughter)
Le pouvoir du chien (The Power of the Dog)