•  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  

Le vaccin de Medicago rejeté par l’OMS : Ottawa n’abandonne pas la partie

Une fiole du vaccin medicago

Le reportage d'Amélie Desmarais

Photo : La Presse canadienne / Medicago

Le vaccin de Medicago contre la COVID-19 est rejeté par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en raison des liens de l'entreprise avec le cigarettier Philip Morris, actionnaire minoritaire de l'entreprise de Québec. Ottawa, qui a investi 173 millions de dollars dans le projet, assure que la partie n'est toutefois pas perdue.

On regarde des pistes de solutions parce que comme vous imaginez [Medicago] est une société qui a évolué avec le temps, a expliqué le ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie, François-Philippe Champagne en mêlée de presse vendredi, réagissant ainsi à la nouvelle d'abord rapportée par The Globe and Mail.

La pharmaceutique a grandement prospéré depuis que le cigarettier Philip Morris International (PMI) est devenu actionnaire en 2008, souligne le ministre fédéral.

Ça a commencé avec la recherche et développement, puis un partenariat avec l’Université Laval. Et là, bien, c’est maintenant la société qu’elle est aujourd’hui.

Une citation de François-Philippe Champagne, ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie

Medicago a été avertie ces dernières heures par courriel de la décision préliminaire de l'OMS. L'entreprise mentionne également être en attente d’une lettre officielle avec des informations complémentaires. L'efficacité du vaccin n'est toutefois nullement en cause, assure-t-elle.

Lorsque Medicago aura reçu [la lettre de l'OMS] et revu le rationnel de cette décision, elle sera en mesure de continuer ses discussions sur les prochaines étapes avec ses partenaires et investisseurs, déclare l'entreprise québécoise qui ne souhaite pas commenter davantage.

Medicago espérait voir son vaccin – le Covifenz – utilisé par l'OMS dans le cadre de son initiative de vaccination internationale COVAX.

Depuis 2005, l'OMS a toutefois une politique très stricte en ce qui a trait aux accords conclus avec des entreprises ayant un lien fort avec l'industrie du tabac ou les armements.

Vendredi après-midi, le ministre de la Santé, le député de Québec Jean-Yves Duclos, a précisé qu'il travaille avec Medicago et l'OMS pour garantir qu'il soit possible d'aller au-delà de cette décision.

M. Duclos souhaite que les Canadiens aient accès au vaccin, tout comme les autres pays à l'international.

Les dons internationaux du Canada en péril

Si la tendance se maintient, la décision de l’OMS risque toutefois d’avoir un impact négatif sur la capacité du Canada à respecter ses engagements en matière de dons internationaux de vaccins. Le Canada s'est engagé à fournir 200 millions de doses de vaccins d’ici la fin de 2022, dont celles de Covifenz.

Le gouvernement fédéral n'a cependant pas l'intention de laisser tomber son partenaire. Sans vouloir se mêler des affaires internes de l'entreprise, François-Philippe Champagne appelle la pharmaceutique québécoise à trouver rapidement des solutions pour amener l'OMS à reconsidérer sa position. La vente des parts de Philip Morris pourrait notamment changer la donne.

Vous savez, l’actionnariat de ces grands groupes-là, ça varie souvent avec le temps. Si vous regardez même l’évolution de Medicago, ç’a évolué avec les années. Moi, je pense que ça va évoluer encore.

Une citation de François-Philippe Champagne, ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie
Des techniciennes dans les laboratoires Medicago, portant des vêtements de laboratoire et entourées de plantes.

Des techniciens dans les laboratoires Medicago de Durham, en Caroline du Nord.

Photo : La Presse canadienne / Gabriel Rancourt / Gracieusuté Medicago

Une mauvaise décision d'Ottawa?

M. Champagne défend par ailleurs la décision d'Ottawa d'avoir parié sur une pharmaceutique qui possède des liens avec l'industrie du tabac.

Si vous vous replacez en 2020 quand la pandémie a commencé, est-ce que c’était le vaccin de Medicago? Est-ce que c’était celui de Novavax? Celui de Pfizer? Celui de Moderna? Alors à l’époque c’était de dire on va investir dans les sept familles de vaccins qui existent dans le monde et comme ça, bien, on pourra dépendant de l’évolution de la pandémie être bien préparé.

C’est clair qu’on veut l’avoir ce vaccin-là dans notre portfolio parce qu’évidemment la COVID-19 maintenant on voit ça plus en arrière, mais l’idée c’est de se préparer pour les 20-30 prochaines années.

Une citation de François-Philippe Champagne, ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie
François-Philippe Champagne à la période de questions à la Chambre des communes.

Le ministre fédéral de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie, François-Philippe Champagne.

Photo : La Presse canadienne / PATRICK DOYLE

Approuvé par Santé Canada

Le vaccin de Medicago a été autorisé par Santé Canada le 24 février pour les personnes de 18 à 64 ans.

Produit en partenariat avec la pharmaceutique GSK, le vaccin Covifenz est fabriqué à partir de plantes, un concept novateur.

Selon les essais cliniques de Medicago, il est efficace à 100 % contre les formes graves de la COVID-19 et les résultats préliminaires laissent présager une efficacité optimale contre le variant Omicron.

Le vaccin devrait être offert au pays à partir de la mi-mai, selon Santé Canada.

C’est sûr qu’on veut trouver une piste de solutions pour garder Medicago et leur permettre de vendre le vaccin non seulement chez nous parce qu’il a été homologué au Canada, mais à travers le monde, comment le ministre Champagne.

Le Dr Matthew Oughton, spécialiste des maladies infectieuses et professeur adjoint au Département de médecine de l’Université McGill, espère également un dénouement positif pour Medicago.

Le vaccin de Medicago est l’un des vaccins que le Canada s’est engagé à distribuer dans le cadre de ses engagements [...] Sans l’approbation de l’OMS, ça va être beaucoup plus difficile d’acheminer le vaccin dans les pays à faibles revenus et à revenus intermédiaires, a indiqué le Dr Oughton dans une entrevue en anglais accordée au réseau CBC.

Il a rappelé que 85 % de la population de ces pays n’avait pas encore reçu une seule dose de vaccin contre la COVID-19.

Un homme protégé travaille avec des plantes dans une usine.

Le vaccin de Medicago est fait à base de protéines de plantes. (Archives)

Photo : Gracieuseté : Medicago

Actionnaire minoritaire

Malgré l'efficacité du vaccin de Medicago, le Dr Oughton croit que le refus de l’OMS de l’approuver n’est pas une surprise en soi.

Le rejet de l’OMS n’est pas basé sur la science du vaccin, mais par le fait que Medicago est financé par une compagnie de tabac, Philip Morris International.

Une citation de Le Dr Matthew Oughton, spécialiste des maladies infectieuses

La semaine dernière, l'organisation onusienne avait annoncé la suspension du processus d'approbation du vaccin de Medicago en raison de ses liens avec le cigarettier, qui ne datent pas d'hier.

En octobre 2008, le géant de l’industrie du tabac Philip Morris International (PMI) a investi 16 millions de dollars dans la pharmaceutique québécoise.

Cinq ans plus tard, Mitsubishi Tanabe Pharma Corporation a acheté toutes les actions ordinaires de Medicago en circulation, sauf celles qui appartenaient à PMI, une transaction d'environ 357 millions de dollars.

L'entreprise japonaise détient désormais 79 % de la pharmaceutique, et Philip Morris 21 %.

Avec la collaboration de Christian Noël, Jean-François Blanchet, Kate McKenna et Louis Gagné

Vous souhaitez signaler une erreur?Écrivez-nous (Nouvelle fenêtre)

Vous voulez signaler un événement dont vous êtes témoin?Écrivez-nous en toute confidentialité (Nouvelle fenêtre)

Vous aimeriez en savoir plus sur le travail de journaliste?Consultez nos normes et pratiques journalistiques (Nouvelle fenêtre)

Infolettre ICI Québec

Une fois par jour, recevez l’essentiel de l’actualité régionale.

Formulaire pour s’abonner à l’infolettre d’ICI Québec.