Le département d’État américain accuse les Russes de crimes de guerre en Ukraine

Le secrétaire d'État américain, Antony Blinken, a précisé dans un communiqué que Washington s'appuyait sur des informations publiques et en provenance des services du renseignement pour établir que des membres des forces russes ont commis des crimes de guerre.
Photo : Reuters / Saul Loeb
Le gouvernement américain a établi que des membres des forces russes ont commis des crimes de guerre en Ukraine, a déclaré le secrétaire d'État américain, Antony Blinken.
Aujourd'hui, je peux annoncer que, sur la base des informations actuellement disponibles, le gouvernement américain estime que des membres des forces russes ont commis des crimes de guerre en Ukraine.
M. Blinken a précisé dans un communiqué que Washington s'appuyait sur des informations publiques et en provenance des services du renseignement.
Nous avons vu de nombreux rapports crédibles d'attaques aveugles et d'attaques visant délibérément des civils ainsi que d'autres atrocités
, a-t-il ajouté en précisant qu'une cour de justice serait ultimement responsable de déterminer la culpabilité dans des affaires spécifiques
.
La semaine dernière, le président Biden avait déclaré que M. Poutine était un criminel de guerre. M. Blinken avait par la suite affirmé qu’il s’agissait également de sa conviction personnelle.
Joe Biden est arrivé à Bruxelles pour le sommet d'urgence de l'OTAN qui se tient jeudi.
Expulsion de diplomates
Par ailleurs, Moscou a décidé d'expulser des diplomates américains en représailles à l'expulsion par Washington de 12 membres de la mission diplomatique russe auprès de l'ONU, a indiqué mercredi le ministère russe des Affaires étrangères dans un communiqué. Le 23 mars, une note avec la liste des diplomates américains déclarés "persona non grata" a été remise au responsable de la mission diplomatique américaine, qui a été convoqué au ministère russe des Affaires étrangères.
La partie américaine s'est vu notifier de manière ferme que tout acte hostile des États-Unis contre la Russie fera l'objet d'une riposte résolue et adéquate.
Au début de mars, les États-Unis avaient expulsé 12 diplomates en les accusant d'espionnage
. L'ambassadeur russe à Washington, Anatoli Antonov, avait alors dénoncé une démarche hostile
américaine.

Le ministre polonais de l'Intérieur, Mariusz Kaminski
Photo : Associated Press / Mindaugas Kulbis
Pour sa part, la Pologne a expulsé mercredi 45 espions russes qui se faisaient passer pour des diplomates
, a annoncé mercredi le ministre polonais de l'Intérieur, Mariusz Kaminski.
Nous démantelons le réseau des services spéciaux russes dans notre pays
, a-t-il précisé sur Twitter.
Les accusations d'espionnage sont sans fondement
, a affirmé l'ambassadeur russe, qui a aussi mentionné que la Russie se réservait le droit de prendre des mesures de rétorsion.
Les trois pays baltes et la Bulgarie avaient pris des mesures similaires le 18 mars. La Lituanie, la Lettonie et l'Estonie ont déclaré 10 diplomates russes persona non grata en solidarité avec l'Ukraine
, tandis que la Bulgarie a expulsé le même nombre de membres de l'ambassade russe.
L'OTAN se renforce à l'Est
Alors que les leaders de l’OTAN se préparent pour leur rencontre jeudi, le secrétaire général de l’organisation, Jens Stoltenberg, a annoncé l'envoi de renforts militaires sur son flanc oriental ainsi qu'une aide accrue à l'Ukraine pour faire face aux cyberattaques russes et à une éventuelle attaque chimique, biologique ou nucléaire.

Des soldats américains sont arrivés en Lettonie afin de renforcer la présence de l'OTAN dans sa zone proche de l'Ukraine en raison du conflit armé avec la Russie.
Photo : Getty Images / AFP / GINTS IVUSKANS
La Bulgarie, la Roumanie, la Hongrie et la Slovaquie bénéficieront de l’arrivée de quatre nouveaux groupements tactiques, ce qui portera à huit le nombre de groupements tactiques déployés en Europe de l'Est.
Au total, l'OTAN compte désormais 40 000 soldats placés directement sous sa direction, qui s'ajoutent aux 100 000 soldats américains déployés en Europe et aux forces des autres États membres, a-t-il précisé.
Nous sommes déterminés à faire tout ce que nous pouvons pour soutenir l'Ukraine. Mais l'OTAN n'est pas partie au conflit [et] n'enverra pas de troupes en Ukraine.
En ce qui concerne les menaces de guerre chimique, biologique ou nucléaire, le secrétaire général n’a pas voulu entrer dans les détails avant la rencontre de jeudi.
Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a par ailleurs affirmé sur CNN que Moscou n'utilisera l'arme nucléaire en Ukraine qu'en cas de menace existentielle contre la Russie.
Nous avons une doctrine de sécurité intérieure; cela est public, vous pouvez y lire toutes les raisons pour l'utilisation des armes nucléaires. Et s'il s'agit d'une menace existentielle pour notre pays, alors elles peuvent être utilisées en accord avec notre doctrine
, a-t-il dit.
Le premier ministre britannique, Boris Johnson, a annoncé la livraison de 6000 missiles antichars supplémentaires à l’Ukraine. Le Royaume-Uni avait déjà fourni plus de 4000 de ces armes, dont des NLAW et des Javelin, ainsi que des missiles portatifs Starstreak.
M. Johnson a également annoncé une aide de 25 millions de livres (plus de 41 millions de dollars canadiens) pour l’armée ukrainienne. Cela s’ajoute à 400 millions de livres (plus de 663 millions $ CA) en aide économique et humanitaire. Le gouvernement britannique versera aussi 4,1 millions de livres (6,8 millions $ CA) au BBC World Service, le service international du diffuseur public, pour lutter contre la désinformation en Russie et en Ukraine
.
Marathon diplomatique
Le président américain Joe Biden et le premier ministre canadien Justin Trudeau participeront au sommet de l'OTAN ainsi qu’à une réunion des chefs d’État et de gouvernement du G7.
Les attentes sont grandes en prévision de ces rencontres qui ont pour but de présenter un front uni et de renforcer la pression sur les Russes.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky.
Photo : La Presse canadienne / AP/Bureau de la présidence ukrainienne
Les alliés ont déjà rejeté les demandes du président de l’Ukraine, Volodymyr Zelensky, d’établir une zone d’exclusion aérienne au-dessus de l’Ukraine ainsi que celles de fournir des avions de combat à Kiev.
Ils tentent de renforcer les défenses ukrainiennes sans entrer directement en conflit avec Moscou.
Selon Reuters, les Américains tentent notamment de convaincre la Turquie d’envoyer ses systèmes de défense antimissile S-400 russes à l’Ukraine.
Il sera également question d’ajustements à long terme
en ce qui concerne la présence de l’OTAN en Europe de l’Est ainsi que d’une action commune pour renforcer la sécurité énergétique de l'Europe
, selon le conseiller à la sécurité nationale de la Maison-Blanche, Jake Sullivan.
La Commission européenne planche sur la mise en marche d’un plan pour réduire sa dépendance au gaz russe en le remplaçant notamment par du gaz naturel liquéfié du Qatar et des États-Unis.
De nouvelles sanctions contre la Russie sont également sur la table, a précisé M. Sullivan. Ces sanctions, qui devraient être annoncées jeudi, concernent à la fois des personnalités politiques
et des oligarques
, a-t-il déclaré lors d'un échange avec la presse à bord d'Air Force One.
Les États-Unis ont déjà rallongé à plusieurs reprises la liste de personnalités russes dont ils gèlent les avoirs et auxquelles ils interdisent toute activité financière ou économique impliquant des personnes ou des entreprises américaines. Dans certains cas, l'entrée sur le territoire américain leur est interdite.
Le président russe Vladimir Poutine en fait partie, mais pas un des plus célèbres oligarques russes, le milliardaire Roman Abramovitch, propriétaire du club de foot de Chelsea.
En revanche, M. Abramovich est déjà visé par des sanctions de l'Union européenne et du Royaume-Uni.
Jake Sullivan a également soutenu que les pays du G7 allaient lancer une initiative
pour s'assurer que la Russie ne puisse pas contourner les sanctions qui lui ont déjà été imposées.
Appels à l’exclusion du G20
Les États-Unis ont indiqué qu'ils consulteraient leurs alliés sur la possibilité d’exclure la Russie de certaines organisations internationales, y compris le G20, dont la rencontre doit se tenir en novembre à Bali, en Indonésie.
L'ambassade russe en Indonésie a indiqué que le président Vladimir Poutine avait été invité et avait l’intention d’y participer.
La Chine s'est prononcée contre une telle exclusion. La Russie est un important pays membre [du G20], aucun membre n'a le droit d'expulser un autre pays
, a dit estimer un porte-parole de la diplomatie chinoise, Wang Wenbin.
La Russie avait été suspendue du G8 après l'annexion de la Crimée en 2014.

Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov.
Photo : Reuters
En ce qui concerne les négociations russo-ukrainiennes, Moscou a accusé les États-Unis de les entraver.
Les négociations sont difficiles, la partie ukrainienne change constamment sa position. Il est difficile de se débarrasser de l'impression selon laquelle nos collègues américains les tiennent par la main
, a déclaré le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, dans un discours devant des étudiants.
Il a reproché aux Occidentaux d'abreuver l'Ukraine en armes
, destinées à garder le plus longtemps possible
les deux pays en situation de combat
.
M. Lavrov s'est dit frappé
par l'ampleur des sanctions occidentales adoptées à l'encontre de Moscou et a dit estimer qu'elles étaient destinées à supprimer la Russie en tant qu'obstacle à un monde unipolaire
.
Tout ceci n'est pas à propos de l'Ukraine mais à propos de l'ordre mondial, que les États-Unis veulent dominer.
Du côté humanitaire, M. Lavrov va rencontrer jeudi à Moscou Peter Maurer, le chef du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), selon ce qu’a déclaré le ministère des Affaires étrangères.
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Avec les informations de Agence France-Presse, Reuters et Associated Press