La candidate de Biden à la Cour suprême se défend de tout laxisme face aux pédophiles

La juge désignée de la Cour suprême des États-Unis, Ketanji Brown Jackson, témoigne lors de son audition de confirmation devant le Comité judiciaire du Sénat.
Photo : Getty Images / Chip Somodevilla
La magistrate afro-américaine Ketanji Brown Jackson s'est vigoureusement défendue mardi face aux accusations de laxisme envers les pédophiles, portées par des élus républicains lors de l'examen de sa candidature historique à la Cour suprême.
Après plusieurs heures d'interrogatoire plutôt policé devant le Comité judiciaire du Sénat, le républicain Ted Cruz l'a accusée frontalement d'avoir tout au long de sa carrière milité pour les prédateurs sexuels
.
Il a assuré qu'elle avait, en tant que juge, prononcé des peines inférieures aux réquisitions dans 100 % des dossiers de pédopornographie
qui lui ont été soumis.
En tant que mère, ces affaires m'ont horrifiée
et j'en fais encore parfois des cauchemars
, a-t-elle rétorqué, en laissant percer pour la première fois une pointe d'émotion. Je les ai toujours traitées très sérieusement, comme tous les autres crimes qui m'ont été soumis
, a-t-elle ajouté.
Volant à son secours, l'élu démocrate Chris Coons a cité des dossiers dans lesquels elle a prononcé des sentences de 10 ou 20 ans de prison, réclamées par les procureurs, et a rappelé qu'au niveau national, 70 % des peines prononcées dans ces affaires étaient inférieures aux barèmes.
Cette passe d'armes, dans une audition plutôt monotone, ne devrait pas faire dérailler la candidature de la juge Jackson.
Nommée par le président Joe Biden à la Cour suprême, cette brillante juriste de 51 ans doit obtenir le feu vert du Sénat avant de devenir la première femme noire à siéger au sein de la haute juridiction.
Sauf surprise, elle devrait obtenir les voix suffisantes lors d'un vote en séance plénière au début d'avril et remplacer à la rentrée le juge progressiste Stephen Breyer.
Selon un sondage Politico-Morning Consult, 47 % des Américains souhaitent que sa candidature soit confirmée et seuls 19 % s'y opposent.
Au-delà du symbole, son arrivée ne modifiera pas les équilibres au sein du temple du droit américain, où les conservateurs garderont une solide majorité de six sièges sur neuf.
Pour toutes ces raisons, la plupart des élus républicains ne se battent pas férocement pour contrer sa candidature.
Mais ceux qui nourrissent des ambitions présidentielles ont utilisé son audition pour faire résonner leurs thèmes de prédilection.
Outre son coup d'éclat sur les pédophiles, Ted Cruz a laissé entendre que la juge Jackson soutenait la théorie critique de la race
. Dans l'esprit des conservateurs, cette théorie est enseignée à l'école et oblige les enfants blancs à se voir comme des oppresseurs et les enfants noirs comme des victimes.
La juge évoque la grandeur
de l'Amérique
C'est une théorie académique qui analyse le racisme au niveau institutionnel
et n'est enseignée à mon sens qu'en faculté de droit
, a-t-elle répliqué. Mais je ne l'ai jamais étudiée ni utilisée dans mon travail de juge et je ne le ferai pas si je suis confirmée à la Cour suprême.
D'autres élus républicains lui ont reproché d'avoir défendu des détenus de Guantanamo ou des criminels endurcis quand elle était avocate dans les services d'aide juridictionnelle à Washington de 2005 à 2007. Aux États-Unis, tout accusé a droit à un avocat, a-t-elle répondu : C'est ce qui fait notre grandeur
.
Des membres de ma famille sont sur la ligne de feu, donc je suis très attachée à la sécurité publique
, a-t-elle également souligné, en rappelant que son frère et deux de ses oncles étaient ou avaient été policiers.
Se disant troublé
par le fait que plusieurs associations gauchistes
soutiennent sa candidature, le sénateur républicain Lindsey Graham lui a demandé si elle était militante
.
Non
, a-t-elle répondu. Je n'importe pas mes vues personnelles ou mes préférences
dans mes décisions, a-t-elle martelé à plusieurs reprises.
Sur les sujets politiques, conformément aux usages, elle s'est montrée évasive.
Elle a notamment refusé de se prononcer sur les appels, lancés par plusieurs élus et associations de gauche, à créer de nouveaux sièges au sein de la Cour suprême pour diluer l'influence des magistrats conservateurs. À mon avis, les juges ne doivent pas parler de politique.