Le patrimoine ukrainien protégé dans un nuage informatique

L'Université de l'Alberta souhaite protéger les données numériques de l'Ukraine menacées par l'invasion des forces armées russes.
Photo : Radio-Canada / Samuel Danzon-Chambaud
L'Institut canadien d'études ukrainiennes (CIUS), de l’Université de l’Alberta, a récemment contribué au lancement d'une initiative offrant un espace de stockage informatique en nuage gratuit et sécurisé aux archivistes, bibliothécaires, scientifiques et autres institutions en Ukraine.
Après avoir mûrement réfléchi à la meilleure façon d'aider ses confrères et consoeurs universitaires face à l’invasion russe, la directrice du CIUS, Natalia Khanenko-Friesen, et son équipe ont décidé de mettre en place une équipe de secours des archives ukrainiennes.
Nous sommes vraiment inquiets pour nos collègues et les travaux qu’ils poursuivent dans la partie orientale de l’Ukraine, là où l’avancée des forces armées russes est la plus importante.
Natalia Khanenko-Friesen dit avoir entendu parler d’archives et de musées détruits ou vandalisés.
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De la culture à la désinformation
Malgré un accès ouvert à toutes les universités et à tous les établissements scolaires, toutes disciplines confondues, cet espace d’archives en ligne a avant tout une dimension culturelle, souligne Mme Khanenko-Friesen.

Natalia Khanenko-Friesen s'inquiète pour ses collègues de l'autre côté de l'Atlantique et espère pouvoir leur apporter du soutien.
Photo : Fournie par Natalia Khanenko-Friesen
Notre initiative est due à la peur que, non seulement les collections soient perdues, mais aussi que l’histoire et le patrimoine culturel soient anéanties.
En effet, à l'approche de l'invasion, le président russe, Vladimir Poutine a réaffirmé que l’Ukraine n'était pas une véritable nation, mais une création artificielle détachée de la Russie par ses ennemis.
Cette déclaration inexacte inquiète les universitaires.
Ainsi, pour faire face à la désinformation, l’Institut canadien d'études ukrainiennes a aussi mis en place une série de vidéos (Nouvelle fenêtre) Le saviez-vous
(en anglais) afin de répondre aux questions entourant le conflit. Par la suite, il souhaite lancer une initiative basée sur l’analyse des médias, selon sa directrice.
Une leçon tirée du passé
Frank Sysyn est professeur d’histoire et directeur de l’Institut canadien d'études ukrainiennes au bureau de Toronto. Selon lui, la numérisation et le partage des données sont cruciaux pour les futurs universitaires et permettraient une meilleure compréhension de l’Ukraine, mais aussi de sa région en général.
Il rappelle que, au début de sa carrière dans les années 1970, l’Union soviétique limitait l’accès à ses archives. C’est l’émergence d'états postsoviétiques plus ouverts qui a permis aux universitaires de se plonger dans des informations qui, jusque-là, étaient inaccessibles.
Cela a été extrêmement important afin de développer autrement nos connaissances historiques et culturelles
, dit-il.
En effet, selon lui, ceux qui allaient auparavant en Russie afin d’étudier l’Union soviétique, notamment à travers des fichiers secrets de la police, se sont par la suite arrêtés en Ukraine ou dans les Pays baltes pour consulter les archives.
Le professeur d’histoire craint que cette source d’informations ne tombe sous le contrôle du régime de Vladimir Poutine. Des documents importants qui pourraient alors redevenir inaccessibles ou même être détruits.
On doit regarder de l’avant et être sûr qu’ils seront préservés quoiqu’il arrive.
Nous pensons tous à Sarajevo, à la destruction de la merveilleuse bibliothèque de Bosnie, et à la nécessité plus tard d'essayer de recréer cette bibliothèque avec ce qu’il en restait.
Le groupe de travail inclut l’Institut canadien d'études ukrainiennes ainsi que le Kule Folklore Centre de l’Université de l’Alberta et d’autres organismes de recherche canadiens.
Avec des informations de Stephen David Cook