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COVID-19 : des milliers d’employés de la santé infectés ont des symptômes après trois mois

Une étude de l’INSPQ prévient que la qualité des soins de santé pourrait être affectée en raison du nombre très élevé de travailleurs aux prises avec le syndrome post-COVID-19.

Des infirmières, vues de dos, marchent dans le corridor d'un hôpital.

De nouvelles formations accélérées en santé sont offertes en Estrie.

Photo : Getty Images

Une nouvelle étude sur le syndrome post-COVID-19, communément appelé « COVID longue », montre que 40 % des travailleurs de la santé infectés au Québec lors des premières vagues de la pandémie ont eu des symptômes pendant au moins 12 semaines et que le tiers d'entre eux ont signalé des troubles cognitifs persistants.

Dans le cadre de cette étude, produite en collaboration avec l’Institut national de la santé publique du Québec (INSPQ) mais non révisée par des pairs, on a contacté plus de 6000 travailleurs de la santé québécois infectés entre juillet 2020 et mai 2021. Leurs symptômes ont été comparés à une cohorte de quelque 4300 travailleurs de la santé qui n’avaient pas été infectés.

On a demandé à ces travailleurs de dire s’il avaient un ou plusieurs des 15 symptômes suivants et de quantifier leur gravité (légère, modérée ou intense) : fatigue, fièvre, essoufflement, toux, respiration sifflante, douleurs, maux de tête, difficulté à marcher, perte d'odorat, perte de goût, douleurs articulaires ou musculaires, douleurs abdominales, diarrhée, mal de gorge et écoulements nasaux.

Selon les données recueillies, 46 % des travailleurs de la santé infectés (2746 personnes) mais non hospitalisés rapportaient des symptômes après quatre semaines et 40 % après 12 semaines (653). Parmi ceux qui ont été hospitalisés, 76 % rapportaient des symptômes après quatre semaines (90) et 68 %, après 12 semaines (27).

Près de 10 % des travailleurs qui avaient des symptômes après quatre semaines ont confirmé être toujours en arrêt de travail; 73 % ont dit qu’ils étaient retournés travailler même s’ils n’étaient pas rétablis.

Près de 20 % des travailleurs de la santé non hospitalisés rapportaient au moins un symptôme grave après quatre semaines. Parmi ceux qui ont été hospitalisés, 35 % rapportaient au moins un symptôme grave après 12 semaines.

Parmi les symptômes les plus fréquents, on compte la fatigue, la perte d’odorat, des difficultés respiratoires, des problèmes cognitifs, des maux de tête ainsi que des douleurs musculaires et arthritiques.

Presque tous les travailleurs infectés ont rapporté une fatigue post-COVID-19; 84 % estiment que cette fatigue est modérée; 28 % disent qu’elle est intense.

Plus de 30 % des travailleurs non hospitalisés qui avaient des symptômes après un mois ont signalé des difficultés de concentration, 20 % ont parlé d'oublis fréquents ou de difficultés d’organisation et 10 % ont dit qu'ils perdaient souvent des objets. Les symptômes persistants chez les travailleurs non hospitalisés étaient deux ou trois fois plus fréquents que chez les travailleurs non infectés.

Lors d'une hospitalisation en raison de la COVID-19, le sexe féminin et l'âge étaient associés à un risque plus élevé de souffrir de symptômes persistants.

Selon la définition médicale établie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), une personne atteinte du syndrome post-COVID-19 doit présenter des symptômes qui persistent au moins trois mois et qui ne peuvent pas être expliqués par un autre diagnostic. Le syndrome peut survenir quelle que soit la gravité initiale de l'infection. Les symptômes peuvent apparaître après un rétablissement initial (généralement après trois mois) ou peuvent n’être jamais disparus après une infection initiale. Ils peuvent également fluctuer ou réapparaître au fil du temps.

Ce syndrome est associé à environ 200 symptômes touchant au moins 10 organes, y compris le cerveau, le cœur, les poumons et les vaisseaux sanguins.

Seulement 4 % des travailleurs analysés avaient été vaccinés avant leur infection. Il est donc encore difficile de conclure avec certitude l’impact de la vaccination sur le syndrome post-COVID-19, écrivent les auteurs, puisque cette cohorte n’a pas été suffisamment étudiée. Parmi un petit groupe qui a été vacciné avant l'infection, le risque d’avoir des symptômes après quatre semaines était légèrement moins élevé, mais le risque d’avoir des symptômes après 12 semaines était à peu près le même.

La prévalence, les facteurs de risque et le pronostic du syndrome post-COVID-19 sont encore mal connus, ajoutent les auteurs de l’étude, selon lesquels le fardeau de cette nouvelle maladie a un impact non seulement sur la vie de ces travailleurs mais aussi sur le réseau de la santé.

Avec autant de travailleurs de la santé infectés depuis le début de la pandémie de COVID-19, les impacts sur la prestation de soins de santé de qualité pourraient être profonds si le dysfonctionnement cognitif et d'autres symptômes graves du syndrome post-COVID persistaient de manière professionnellement invalidante à plus long terme, écrivent les auteurs.

Malgré quelques limitations à cette étude énumérées par les auteurs, ceux-ci précisent que, contrairement à des études précédentes, leur analyse fait une distinction entre les personnes hospitalisées et non hospitalisées. Ils notent que cette étude montre le fardeau élevé des séquelles de la COVID-19 chez les adultes non hospitalisés.

Les auteurs avertissent par ailleurs qu’il n’est pas possible de déterminer avec cette étude si la même prévalence se retrouve dans la population générale. Selon l’OMS, de 10 à 20 % des patients infectés présentent des symptômes pendant plus de trois mois.

Oui, il y a certains biais de sélection, mais méthodologiquement parlant, cette étude est de haute qualité, estime Simon Décary, chercheur au Laboratoire de recherche sur la réadaptation axée sur le patient de l'Université de Sherbrooke, qui étudie le syndrome post-COVID-19. Il ajoute que l'échantillonnage est très grand et que l'analyse est rigoureuse. De plus, les infections ont été confirmées par des tests PCR, ce qui dissipe tout doute quant au fait que les personnes interviewées aient réellement été infectées par la COVID-19.

La Dre Anne Bhéreur, qui souffre elle-même de symptômes intenses associés à ce syndrome après avoir été infectée en décembre 2020 dans le milieu de soins palliatifs où elle travaillait, dit pour sa part qu'elle est atterrée de voir qu’on est très loin des estimations les plus prudentes [sur le syndrome post-COVID-19]. Si certaines de ces personnes ont des symptômes persistants légers, elle rappelle que des impacts cognitifs peuvent avoir des répercussions sur la qualité du travail d'un employé de la santé.

Les données sont suffisamment solides pour dire qu’on a un problème significatif, croit la Dre Bhéreur.

Selon Simon Décary, ces données montrent qu’il faut agir rapidement pour aider ces personnes non seulement à récupérer mais aussi à réintégrer leur emploi ainsi que pour atténuer les risques que d’autres travailleurs de la santé souffrent de symptômes persistants. Je ne sais pas quelles décisions les autorités vont prendre, mais elles ont les données pour prendre des décisions.

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