Les multiples impacts du boycottage des artistes russes

Le concert du jeune pianiste Alexander Malofeev, prévu en août 2022 à l'Orpheum de Vancouver, a été annulé par crainte de manifestations.
Photo : FACEBOOK/ALEXANDER MALOFEEV / Liudmila Malofeeva
De Paris à Berlin, en passant par New York ou encore Montréal, les prestations de bon nombre d'artistes russes ont été annulées à la suite de l'invasion de l’Ukraine par le Kremlin. À Vancouver, c’est un concert de l’artiste russe Alexander Malofeev, prévu en août 2022, qui a été récemment été annulé.
Pour Alexia Bloch, professeure et directrice du département d'anthropologie de l'Université de Colombie-Britannique (UBC) à Vancouver, c’est un message fort qui montre que nous sommes cohérents avec les sanctions internationales
à l'encontre de la Russie plutôt qu’une exclusion.
Selon elle, le but à court terme n’est pas d’exclure les artistes russes du paysage culturel, mais d’utiliser un moyen efficace pour mettre fin à la guerre.
Avant de commencer à penser aux échanges culturels qui peuvent, en fait, créer la paix dans le monde, il y a beaucoup de choses à faire
, explique Alexia Bloch.
Elle souligne cependant déplorer l’annulation des prestations d’artistes russes. Une situation qu’elle dit regrettable
pour les Canadiens qui n'auront pas l'occasion d'entendre d'artistes et de musiciens russes qui sans l’invasion de l’Ukraine par le Kremlin auraient été en tournée au Canada.
Le boycottage d'artistes met souvent à mal leur image
Un boycottage à long terme des artistes russes serait terrible
, lance le doyen de la faculté des Arts de l’UBC , Gage Averill. Ce serait une tragédie
.
Selon lui, le boycottage d’artistes met souvent à mal leur image auprès des publics.
C'est souvent rendre un mauvais service aux artistes que de les cataloguer de cette façon et d'exercer des boycottages culturels, dit Gage Averill. Mais nous sommes dans une situation différente avec la guerre
.
J'espère que les organisations culturelles qui annulent des événements sont très claires sur le fait qu’ils annulent l'événement en raison, par exemple, des sensibilités de la communauté autour de la guerre et de la guerre civile
, poursuit-il.
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Gage Averill explique également que l’isolement des artistes russes de l’espace culturel international peut aussi mener certains à prendre cela comme un mauvais signal
, ce qui n’est pas le cas. Et il ajoute qu’il est important la responsabilité des comportements d'un gouvernement sur ces citoyens.
Nous devrions tous veiller à faire la différence entre les cibles légitimes d'un boycottage ou d'une censure, et les personnes innocentes
.
Ces propos font écho a ceux d’Alexia Bloch qui est attristée par les récents actes de dégradation d’une église orthodoxe et d’un centre culturel russe à Vancouver.
Nous devons constamment revenir sur le fait que les individus ne sont pas les mêmes que les États et que ceux qui ont la citoyenneté russe ne soutiennent pas automatiquement cette guerre
, précise-t-elle
Ouvrir le dialogue
L'une des choses que nous pouvons faire est de continuer à soutenir les artistes locaux d'origine russe, et nous ne devrions pas du tout nous en écarter
, conseille Alexia Bloch.
Il faut selon elle, se rappeler que le Canada est un état de droit qui respecte les individus et ne tolère pas le racisme ou les actes de violence juste à cause de leur pays d'origine
.
Alexia Bloch précise également qu’il est important de dialoguer autour des questions difficiles qui entourent cette guerre
Je pense que tout espace où nous pouvons créer ce dialogue est très important
, dit-elle.
J'espère vraiment qu'il y aura un moment où nous pourrons commencer les échanges culturels comme une forme d'ouverture vers l'après-guerre. Les artistes font toujours partie de cela, ils établissent des liens et créent d'autres façons de voir le monde
.