Mettre sa vie sur pause dans l’attente d’une chirurgie pour l’endométriose

Keana Casault étudie pour travailler dans l'industrie du Tourisme. Elle craint que son endométriose ait un impact sur ses études.
Photo : Radio-Canada / Ben Nelms
Une Britanno-Colombienne souffrant d’endométriose dénonce les délais d’attente causés par la pandémie pour certaines chirurgies. Keana Casault vit avec une douleur extrême et incessante depuis près de 10 ans.
Plus d’un million de femmes au Canada vivent avec l’endométriose, une maladie chronique inflammatoire qui survient lorsque des tissus similaires à l’endomètre se retrouvent à l’extérieur de l’utérus. Il n’y a pas de traitement curatif pour cette maladie qui peut, dans les cas les plus graves, endommager des organes ou causer l'infertilité.
Sur une échelle de 10, si je vous dis que ma douleur se situe à 5, c’est [l'équivalent] d'un 10 pour ceux qui n’ont pas l’endométriose
, souligne Keana Casault.
La douleur chronique dicte le quotidien de la jeune femme de 25 ans qui se demande constamment, si elle est en mesure de faire ses courses, de prendre une douche, de promener son chien ou d’aller en classe.
À 17 ans, Keana Casault a subi une intervention chirurgicale sans succès. Puis, pendant des années, elle a suivi des traitements d’hormones qui n’ont pas aidé avec la douleur. Puisqu’elle a déjà été opérée, il y a huit ans, elle n’est pas considérée comme prioritaire pour une nouvelle intervention en Colombie-Britannique.
Keana Casault a donc décidé d’aller chercher de l’aide en Ontario auprès du gynécologue-obstétricien Mathew Leonardi. Le chirurgien au McMaster University Medical Centre affirme que le temps d’attente pour les femmes, comme Keana Casault, est sans précédent.
Parce que ces chirurgies sont considérées comme non urgentes, les femmes qui souffrent d’endométriose doivent mettre leur vie sur pause, dit-il.
« La douleur est intense au point où vous avez de la difficulté à réfléchir. Vous avez l’impression que vous allez vous évanouir. Vous ne pouvez pas sortir du lit. Vous ne pouvez pas marcher. Vous ne pouvez même pas aller à la salle de bain. »
Un manque de financement et d’expertise qui ne date pas d’hier
D’après le Dr Mathew Leonardi, le manque de financement pour la recherche en gynécologie ou la rémunération des gynécologues-obstétriciens date depuis bien avant la pandémie.
L’endométriose est diagnostiquée chez 10 % des personnes ayant un utérus au Canada. Les femmes atteintes de la maladie peuvent attendre de 5 à 10 ans avant de recevoir un diagnostic et les traitements appropriés.
Selon la Dre Catherine Allaire, qui dirige la clinique d'endométriose et de douleurs pelviennes au BC Women's Hospital, il est très difficile de recevoir un diagnostic. En plus des délais liés aux chirurgies, il y a un manque d’accès aux médecins de famille et aux services d’imagerie médicale.
Le Dr Mathew Leonardi et la Dre Catherine Allaire sont également d’avis que des facteurs sociétaux ralentissent le diagnostic.
« C’est une maladie dont le symptôme principal est la douleur. La douleur peut souvent être ignorée chez les femmes ou les personnes LGBTQ+. »
Le Dr Mathew Leonardi ajoute également que seulement un pour cent des chirurgiens au pays se spécialise en endométriose.
Les deux docteurs, comme le groupe EndoAct Canada, demandent plus de financement pour la recherche en gynécologie. Le groupe exige aussi qu’Ottawa mette en place un programme national sur l’endométriose pour sensibiliser les Canadiens et offrir de meilleurs services aux femmes qui souffrent de cette maladie.
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Dans un courriel, le ministre fédéral de la Santé, Jean-Yves Duclos, affirme qu’il s’engage à améliorer l’accès aux services de santé sexuelle et reproductive sans mentionner l’endométriose ou les traitements pour cette maladie.
Avec les informations d'Eva Uguen-Csenge