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Moscou et Kiev s’entendent pour créer des couloirs humanitaires

« Je dois parler à Poutine », affirme le président ukrainien Volodymyr Zelensky. L'offensive sera « sans compromis », affirme le président russe Vladimir Poutine. « Le pire est à venir », croit le président français Emmanuel Macron.

Des hommes se serrent la main de part et d'autre d'une table.

Les négociateurs ukrainiens (à gauche) et russes se serrent à la main au début de leur deuxième ronde de pourparlers, jeudi, au Bélarus. À l'avant-plan, à gauche, le ministre ukrainien de la Défense, Oleksiy Reznikov.

Photo : Getty Images / AFP/BELTA/MAXIM GUCHEK

Radio-Canada

Au terme d'une deuxième ronde de pourparlers de paix, Moscou et Kiev se sont entendus jeudi pour établir des couloirs humanitaires devant permettre à des Ukrainiens coincés dans certaines villes attaquées de fuir les affres de la guerre.

La deuxième session de négociations est terminée. Malheureusement, il n'y a pas encore les résultats escomptés pour l'Ukraine. Il n'y a qu'une solution pour organiser des couloirs humanitaires, a écrit sur Twitter Mikhaïlo Podoliak, conseiller du président ukrainien Volodymyr Zelensky et membre de la délégation.

La seule chose que je peux dire, c'est que nous avons discuté en détail des aspects humanitaires, parce que beaucoup de villes sont actuellement encerclées. La situation avec la nourriture, les médicaments, les possibilités d'évacuation est dramatique.

Une citation de Mikhaïlo Podoliak, négociateur ukrainien

Les discussions, tenues à Belovejskaïa Poucha, une localité bélarusse proche de la frontière avec la Pologne, n'ont cependant pas permis de conclure un cessez-le-feu et les bombes continuent entre-temps de s’abattre sur plusieurs villes ukrainiennes, dont Kiev, Kharkiv et Marioupol.

Selon une déclaration ensuite lue par M. Podoliak, Moscou et Kiev vont mettre en place ces couloirs humanitaires non seulement pour l'évacuation de la population civile, mais aussi pour l'acheminement de médicaments et de vivres vers les zones où les combats sont les plus violents.

Guerre en Ukraine

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Un véhicule blindé est en feu, un corps gît dans la rue.

Cela inclut la possibilité d'un cessez-le-feu temporaire pendant la période d'évacuation, dans les secteurs où elle a lieu.

Le chef de la délégation russe, Vladimir Medinski, a quant à lui indiqué que les pourparlers avaient porté sur les questions humanitaire, militaire et de règlement politique futur du conflit. Selon lui, il y a une compréhension mutuelle sur certains points. Il a confirmé la création de couloirs humanitaires.

La question principale qui a été résolue aujourd'hui est celle du sauvetage des civils qui se sont retrouvés dans la zone des affrontements. [...] Je crois que c'est un progrès important.

Une citation de Vladimir Medinski, négociateur russe
Gros plan de Vladimir Medinski.

Le chef de la délégation russe, Vladimir Medinski, à son arrivée pour la deuxième ronde de pourparlers.

Photo : Getty Images / Belta/AFP/MAXIM GUCHEK

Dans un avenir très proche, les parties prendront toutes les mesures nécessaires pour que les gens puissent sortir en toute sécurité de ces zones, il n'y a rien de plus important, a abondé un autre membre de la délégation russe, le député Léonid Sloutski.

Dans un tweet confirmant la reprise des pourparlers, publié quelques heures plus tôt, M. Podoliak, avait annoncé que la délégation ukrainienne souhaitait obtenir un cessez-le-feu immédiat, un armistice et des couloirs humanitaires pour l'évacuation des civils des villes et villages détruits ou constamment bombardés.

Le programme au minimum : des couloirs humanitaires. Le reste sera selon les circonstances, avait aussi indiqué sur Facebook David Arakhamia, leader parlementaire du parti du président Zelensky et membre de la délégation ukrainienne.

David Arakhamia et Mikhaïlo Podoliak, devant un hélicoptère.

Le député ukrainien David Arakhamia a publié sur sa page Facebook une photo où on le voit en compagnie du conseiller présidentiel Mikhaïlo Podoliak, avant leur décollage en hélicoptère.

Photo : Facebook/David Arakhamia

Dans une vidéo publiée tôt jeudi matin, le président Zelensky avait indiqué que son gouvernement faisait tout ce qu’il pouvait pour établir de tels corridors afin de mettre les civils à l’abri des bombes, notamment à Kiev, à Kharkiv et dans d’autres villes du sud, mais aussi pour faire entrer du matériel médical dans les villes attaquées.

Le conseil municipal de Marioupol avait aussi admis qu’il tentait de créer un tel corridor humanitaire pour que les habitants puissent quitter la ville, bombardée depuis plusieurs jours et maintenant assiégée par l’armée russe.

Nous n’avons ni électricité, ni eau, ni chauffage, a écrit le conseil. Marioupol demeure sous le feu des armes. Les femmes, les enfants et les personnes âgées souffrent. On est en train de détruire notre pays. C’est un génocide du peuple ukrainien, s’est indigné le conseil.

Ils ont détruit les ponts, détruit les trains pour nous empêcher de sortir nos femmes, enfants et vieillards. Ils nous empêchent de nous approvisionner. Ils cherchent à imposer un blocus, comme à Leningrad.

Une citation de Vadym Boïtchenko, maire de Marioupol, sur Telegram

Une troisième ronde de négociations devrait avoir lieu au début de la semaine prochaine, aurait aussi indiqué Mikhaïlo Podoliak, selon des propos rapportés par l'agence officielle du Bélarus, Belta.

Le chef de la diplomatie russe prévient, comme Vladimir Poutine, que la Russie se battra jusqu'au bout pour atteindre ses objectifs. Entre-temps, les sanctions économiques des gouvernements et des entreprises continuent de tomber. Le reportage de notre correspondante en Russie Tamara Alteresco.

Zelensky veut parler à Poutine

Lors d'une conférence de presse tenue avant la fin de ces pourparlers, le président Zelensky a dit vouloir négocier directement avec son homologue russe Vladimir Poutine.

Je dois parler à Poutine [...], car c'est le seul moyen d'arrêter cette guerre, a-t-il déclaré, se disant ouvert et prêt à aborder toutes les questions avec le président russe. Il faut parler sans condition, sans rancœur, comme des hommes.

Volodymyr Zelensky, en tenue kaki, devant des drapeaux ukrainiens.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, en conférence de presse, jeudi, à Kiev.

Photo : Getty Images / AFP/SERGEI SUPINSKY

M. Zelensky a aussi interpellé son homologue qui a ordonné l'invasion de son pays il y a une semaine : Tu veux quoi de nous? Pars de notre terre!

Assieds-toi avec moi [...], mais pas à 30 mètres comme avec [Emmanuel] Macron ou [Olaf] Scholz. Je suis un gars normal, je ne mords pas!

Une citation de Volodymyr Zelensky, président de l'Ukraine

Il se moquait ainsi de la très longue table à laquelle le président russe reçoit ses hôtes russes comme étrangers du fait du protocole sanitaire draconien pour le protéger de la COVID-19.

Le président ukrainien a appelé les Occidentaux à accroître leur soutien à l'Ukraine, martelant que si son pays était défait par la Russie, elle s'attaquerait au reste de l'Europe de l'Est pour arriver jusqu'au mur de Berlin.

Si nous disparaissons, que Dieu nous protège, ensuite ce sera la Lettonie, la Lituanie, l'Estonie, etc. Jusqu'au mur de Berlin, croyez-moi, a-t-il dit. Selon lui, le Kremlin pourrait avoir pour objectif de reconstruire toute la sphère d'influence européenne de l'ex-URSS.

Il a aussi appelé les Occidentaux à imposer une zone d'exclusion aérienne au-dessus de son pays. Et si vous n'avez pas la force pour fermer le ciel, alors donnez-moi des avions!, s'est-il exclamé.

Interrogé sur les pourparlers alors en cours au Bélarus, Volodymyr Zelensky a estimé qu'il y avait des choses sur lesquelles il faut trouver des compromis pour que les gens cessent de mourir.

Mais il y a des choses sur lesquelles il est impossible de trouver des compromis. Nous ne pouvons pas tout simplement partir en disant : "oui, ce pays est à vous, l'Ukraine fait partie de la Russie". C'est impossible. Ce n'est pas la peine de nous le proposer.

Une citation de Volodymyr Zelensky, président de l'Ukraine

M. Zelensky a malgré tout souligné l'importance d'un dialogue diplomatique. Chaque parole est plus importante qu'un tir, a-t-il conclu.

Un homme blessé sur une civière entouré de secouristes.

Des ambulanciers paramédicaux prennent en charge un homme blessé par un bombardement dans un quartier résidentiel de Marioupol, dans le sud-est du pays, où un hôpital de maternité a été converti pour soigner les blessés.

Photo : Associated Press / Evgeniy Maloletka

Le pire est à venir, craint Macron

La perspective d'une entente entre Kiev et Moscou apparaît toutefois lointaine, si l'on en croit les propos rapportés par le Kremlin et l'Élysée dans la foulée d'une nouvelle discussion entre les présidents russe et français, Vladimir Poutine et Emmanuel Macron.

Au terme de cette discussion d'une heure et demie, M. Macron croit que le pire est à venir dans ce conflit, qui a déjà fait des centaines de morts de part et d'autre, entraîné d'importants dégâts matériels et poussé plus d'un million d'Ukrainiens à fuir leur pays.

L'anticipation du président (Macron) est que le pire est à venir compte tenu de ce que lui a dit le président Poutine.

Une citation de Extrait de la déclaration de l'Élysée

Selon l'Élysée, le maître du Kremlin a fait part de sa très grande détermination à poursuivre son offensive, dont le but est de prendre le contrôle de toute l'Ukraine, un pays d'environ 45 millions d'habitants qui a obtenu son indépendance en 1991, dans la foulée de l'effondrement de l'Union soviétique.

D'après la présidence française, M. Poutine a affirmé que l'opération de l'armée russe se développait selon le plan prévu par Moscou et qu'elle allait s'aggraver si les Ukrainiens n'acceptaient pas ses conditions.

Le président français Emmanuel Macron pose devant le palais de l'Élysée.

Le président français Emmanuel Macron.

Photo : Reuters / Philippe Wojazer

Toujours selon l'Élysée, le président Macron a déclaré au président russe qu'il commettait une erreur grave sur le régime ukrainien, qui n'est pas nazi. Tu te racontes des histoires, tu recherches des prétextes, lui a-t-il dit, a rapporté la présidence française, en l'invitant à ne pas se mentir.

Nous allons durcir les sanctions contre la Russie, a par ailleurs réaffirmé la présidence, en estimant qu'il s'agissait d'un outil très puissant comme on le voit dans l'effondrement du rouble.

Après cet entretien téléphonique à la demande de Vladimir Poutine, Emmanuel Macron s'est entretenu avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky, qui lui a réaffirmé que son pays ne se rendrait pas et qu'il n'était pas envisageable de négocier avec un pistolet sur la tempe.

Le Kremlin a pour sa part indiqué que le président russe a informé Emmanuel Macron de son intention de poursuivre sans compromis son offensive contre les nationalistes en Ukraine et a menacé d'ajouter des exigences supplémentaires à sa liste déjà longue de demandes envers Kiev.

M. Poutine a déjà indiqué qu'il souhaitait obtenir la démilitarisation, la dénazification et une déclaration de neutralité de la part des autorités ukrainiennes.

Dans un précédent entretien avec le président Macron, il a aussi évoqué la reconnaissance de la souveraineté russe sur la Crimée, territoire ukrainien qu'il a annexé en 2014 sans que cela soit reconnu par la communauté internationale.

Dans une allocution diffusée plus tard à la télévision russe, Vladimir Poutine a assuré que l'opération militaire en Ukraine se déroule selon le plan, martelant que Moscou cherche à combattre des néonazis pour sauver Russes et Ukrainiens, qui ne sont, selon lui, qu'un seul peuple.

Depuis quelques jours déjà, des services de renseignements occidentaux laissent entendre que l'offensive russe ne semble pas se dérouler comme prévu, montrant notamment du doigt le long convoi de véhicules militaires russes qui apparaît être bloqué au nord-ouest de Kiev.

Sergueï Lavrov.

Sergueï Lavrov, ministre russe des Affaires étrangères.

Photo : Getty Images / GEORG HOCHMUTH

Selon le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, la cause d’un cessez-le-feu sera également portée par la France au Conseil de sécurité de l'ONU, par le dépôt d'un projet de résolution exigeant l’arrêt des hostilités. La Russie dispose cependant d’un droit de veto au Conseil, droit qu’elle a utilisé la semaine dernière pour battre une résolution condamnant son invasion de l’Ukraine.

Les États-Unis vont eux aussi soutenir des efforts diplomatiques de Kiev pour obtenir un cessez-le-feu avec Moscou, même si c’est beaucoup plus difficile d’y parvenir quand les tirs résonnent et les chars avancent, a déclaré le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken.

Lavrov souffle le chaud et le froid

L'échange entre MM. Macron et Poutine avait été annoncé en direct dans la matinée par le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, lors d'une conférence de presse en ligne.

La France a une tradition assez ancienne d'être intermédiaire dans les conflits, a-t-il fait remarquer, en soulignant que Moscou serait ravi si la France réussissait dans cette mission.

M. Lavrov a soufflé le chaud et le froid dans cette conférence de presse, soulignant d'une part qu’il n’avait aucun doute quant à la possibilité de trouver une solution à la crise ukrainienne, mais en évoquant d'autre part la perspective d'un conflit nucléaire.

Tout le monde sait qu'une troisième guerre mondiale ne peut être que nucléaire, mais j'attire votre attention sur le fait que c'est dans l'esprit des politiques occidentaux, pas dans celui des Russes.

Une citation de Sergueï Lavrov, ministre des Affaires étrangères de la Russie

De son côté, le responsable du département russe de la coopération européenne au ministère des Affaires étrangères, Sergei Ryabkov, a affirmé que Moscou maintient des contacts avec Washington, principalement à travers ses ambassades.

Avec les informations de Agence France-Presse, Reuters, New York Times et BBC

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