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Aller combattre en Ukraine, un pensez-y-bien

Une voiture, des arbres et un immeuble en ruines, brûlés par une explosion.

Les bombardements russes ont fait des dommages dans la ville de Brovary, en périphérie de Kiev, le 1er mars.

Photo : Getty Images / GENYA SAVILOV

Les Canadiens qui désirent se rendre en Ukraine pour combattre l’armée russe doivent s’attendre à surmonter de nombreux obstacles avant même d’arriver sur les lignes de front, préviennent des experts.

Barrière de la langue, apprentissage en accéléré du maniement des armes, déplacements dans un pays aux nombreuses infrastructures détruites par les bombardements : répondre à l’appel lancé il y a quelques jours par le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, n’aura rien de simple pour les volontaires canadiens.

Une fois arrivés sur place, ce n'est pas toujours très simple d'intégrer ces individus-là dans des bataillons [...] Ça pose des problèmes de coordination, surtout que ce sont souvent des gens qui n'ont pas d'expérience militaire, fait valoir en entrevue à Radio-Canada Aurélie Campana, professeure titulaire de science politique à l'Université Laval.

Volodymyr Zelensky, en tenue de combat, se tient derrière un lutrin.

Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a invité les étrangers, en particulier les Européens, ayant une expérience de combat à venir lutter contre l'invasion russe de son pays. (Archives)

Photo : via reuters / Service de presse du gouvernement ukrainien

Elle ajoute que les étrangers appelés à combattre aux côtés des forces ukrainiennes risquent d’avoir un choc en arrivant sur le terrain, surtout s’ils n’ont aucune expérience des conflits armés.

C’est tout à fait autre chose

La guerre, en Occident, on la voit à travers un écran de télé, une tablette, un ordinateur ou des jeux vidéo. Quand on arrive sur place, les bruits de la guerre, les images de la guerre, c'est tout à fait autre chose, insiste Mme Campana.

« On l'a vu dans le cas de ceux partis se battre contre ou aux côtés de Daech. Une fois arrivés sur place, ils étaient totalement tétanisés parce qu'ils ne s'imaginaient pas que la guerre, ça pouvait être aussi sale que ça. »

— Une citation de  Aurélie Campana, professeure titulaire de science politique, Université Laval
Aurélie Campana lors d'une entrevue dans un studio de Radio-Canada.

Aurélie Campana affirme que la participation de volontaires étrangers aux conflits armés est fréquente, particulièrement depuis la guerre d'Espagne (1936-1939). (Archives)

Photo : Radio-Canada / Jean-Simon Fabien

Les volontaires ne sont pas forcément issus de l’importante diaspora ukrainienne qu’on retrouve au Canada. Leur profil et leurs motivations peuvent varier grandement d’une personne à l’autre, précise la professeure Campana.

[Certains] ont le goût de l'aventure, d'autres sont d'anciens militaires [qui] se cherchent une nouvelle cause pour laquelle combattre. D'autres vont suivre un ami ou un pair et se dire : "Pourquoi ne pas y aller moi aussi, si j’ai la capacité d'aider", explique-t-elle.

C'est extrêmement brutal

Pour plusieurs, les images diffusées en continu sur Internet, à la télévision et sur les réseaux sociaux montrant des civils fuyant les bombardements ont servi de catalyseur. C’est le cas de Bryson Woolsey, un résident de la Colombie-Britannique qui s’est porté volontaire.

Des gens debout sur une place publique, face à face, tenant ensemble un drapeau de l'Ukraine.

Les rassemblements de solidarité avec l'Ukraine se sont multipliés au Canada depuis l'invasion russe, notamment à Halifax (photo), en Nouvelle-Écosse. (Archives)

Photo : CBC / Haley Ryan

J'ai vu des vidéos d'enfants dans des ambulances être réanimés, des civils qui ont perdu des membres, sous le choc, des soldats qui combattent. Des civils et des appartements sont bombardés. C'est extrêmement brutal et ce n'est pas bien, confie-t-il dans une entrevue en anglais.

Anthony Walker, un humoriste ontarien de 29 ans qui possède une formation d'infirmier, s’est également senti interpellé après avoir vu les images de l’invasion russe. Le Canadien se trouve déjà à la frontière entre l'Ukraine et la Pologne, où il prodigue des soins en attendant de pouvoir participer aux combats.

Le major général à la retraite des Forces armées canadiennes Richard Blanchette déconseille pour sa part à ses concitoyens d’aller se battre en Ukraine, surtout s’ils n’ont aucune formation militaire.

Je ne recommanderais à personne de se lancer dans un tel théâtre d'opérations, mais si vous vous mettez dans la peau de ces gens qui défendent leur ville, qui défendent leur pays, qui défendent leur honneur [...] on ne peut que saluer ce courage dont nous sommes témoins actuellement, affirme-t-il en entrevue à l’émission D'abord l'info.

Une image satellite montrant des dizaines, voire des centaines de véhicules.

Une image satellite montre que la fin d'une imposante colonne russe se trouvait ce matin près d'Ivankiv, à environ 80 km de Kiev, la capitale.

Photo : Associated Press

Appui extraordinaire

Outre les ressortissants étrangers prêts à répondre à l’appel du président Zelensky, l’ampleur de la mobilisation internationale visant à soutenir l’Ukraine et à dénoncer l’invasion de la Russie surprend Richard Blanchette.

C’est extraordinaire de voir l’appui international qui survient actuellement, qui s’organise, qui s’orchestre et qui continue à prendre de l’ampleur. C’est tout à fait renversant et c’est relativement encourageant, commente le major général à la retraite.

Un combattant de la Défense territoriale ukrainienne examine un véhicule.

Des Canadiens souhaitent se rendre en Ukraine pour aider le pays à lutter contre l'armée russe. (Archives)

Photo : afp via getty images / SERGEY BOBOK

De son côté, le gouvernement du Canada recommande à ses citoyens d’éviter tout voyage en Ukraine en raison du conflit armé avec la Russie.

Si vous êtes en Ukraine, vous devriez vous abriter dans un endroit sécurisé, à moins que vous ne puissiez quitter le pays en toute sécurité, conseille Affaires mondiales Canada.

Un choix personnel, dit la ministre

Invitée à dire si elle déconseillait aux Canadiens d’aller se battre en Ukraine, la ministre de la Défense nationale, Anita Anand, a indiqué mercredi qu’il s'agissait d’un choix personnel.

C’est un choix indépendant et chaque personne doit choisir l’étape prochaine [elle]-même [...] Ce n’est pas un problème, a-t-elle répondu en français.

Les ministres de la Défense ukrainien et canadienne passent en revue des soldats ukrainiens.

La ministre de la Défense nationale, Anita Anand, qui s'est rendue en Ukraine quelques semaines avant l'invasion de la Russie (photo), dit comprendre les Canadiens qui souhaitent participer au conflit. (Archives)

Photo : Reuters / Gleb Garanich

Un peu plus tard, la ministre a affirmé en anglais qu’elle comprenait réellement [I truly understand] le choix des Canadiens qui souhaitent participer au conflit, en particulier ceux qui ont des origines ukrainiennes.

Je vais dire que c’est un choix personnel que les Canadiens font pour eux-mêmes et que notre travail, en tant que gouvernement, est de leur fournir de l’information sur la gravité de la situation sur le terrain, en Ukraine [traduction libre], a précisé Anita Anand.

Une des valeurs très importantes du Canada est que nous sommes un pays libre, un pays dans lequel sont respectés les choix personnels que chaque personne fait, a renchéri la vice-première ministre Chrystia Freeland en français. La responsabilité du gouvernement est de donner de l'information précise, d'être certain que les gens qui font des choix dangereux, qu'ils savent que ce sont des choix dangereux.

Avec des informations de Camille Carpentier, de Marc-André Masson, de Katherine Brulotte et de Louis Blouin

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