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Parler de la guerre aux enfants, ou comment « rassurer sans entrer dans les détails »

Voici des conseils d'experts psychologues en cinq points.

Un enfant devant un écran d'ordinateur.

Il faut protéger les enfants des images de guerre diffusées à la télévision et sur Internet, soulignent des experts en psychologie.

Photo : iStock / jovan_epn

La guerre en Ukraine a envahi la couverture de tous les médias. La sidération et l’inquiétude des adultes peuvent aussi se communiquer aux enfants. Comment les préserver des angoisses liées à cette actualité? Pour aider les enfants à aborder les questions que soulève ce conflit, des chercheurs en psychologie prodiguent leurs conseils.

Répondre à leurs questions

L’essentiel, c’est d’abord de sonder les questionnements des enfants et leurs inquiétudes, souligne Jean-François Bureau, professeur titulaire à la Faculté des sciences sociales de l'École de psychologie de l'Université d'Ottawa.

Votre enfant vous interroge sur la guerre? Renvoyez-lui la question en lui demandant ce que lui pense comprendre des événements. La stratégie rhétorique peut mettre en lumière des angoisses latentes, explique ce professeur.

Certains jeunes ne comprennent pas où ça se passe, leur crainte c’est de voir les soldats débarquer chez eux, illustre le responsable d'un Laboratoire de recherche sur les relations enfants-parents et leur environnement.

Il préconise de ne pas aborder le sujet, encore moins ses implications tragiques, quand l’enfant ne le demande pas. Mais si la question des morts est soulevée, alors si, mais en expliquant que [la guerre] se passe entre soldats, que les enfants et les familles ne sont pas visés.

Quant aux demandes de précisions plus complexes, mieux vaut ne pas s'y dérober et jouer franc-jeu, conseille de son côté Andrès Cardenas, psychologue pédiatrique. C'est correct de dire à l'enfant je ne sais pas. On va chercher ensemble.

Minimiser l’exposition aux médias

Les images de guerre diffusées en boucle par les médias s’adressent à un public adulte, rappelle Jean-François Bureau. On ne sait pas quel effet ces images auront sur l’enfant, prévient-il.

En outre, le plus jeune public ne saura pas décoder le langage employé dans les reportages, ajoute la psychologue Laura Armstrong. Ils peuvent penser que la situation est bien pire que ce qu’elle est vraiment et que la guerre va les atteindre, cite-t-elle en prenant l’exemple de patients adolescents qu'elle a récemment rencontrés.

Leurs parents regardent beaucoup les actualités, ce qui augmente leurs peurs et ça se répercute sur les enfants, observe la praticienne.

Est-ce qu’on peut limiter l’accès que les enfants ont à ces images-là? Oui, c’est souhaitable.

Une citation de Laura Armstrong, psychologue clinique et professeure agrégée à l’école de counseling, de psychothérapie et de spiritualité à l’Université Saint-Paul à Ottawa

Il ne s’agit pas de cacher ce qui se passe ni de mentir, nuance M. Bureau, mais plutôt d’occulter le détail qui n’est pas nécessaire. Et éviter de laisser son enfant devant le flot d’informations en continu diffusées à la télévision. Des images difficiles pour un adulte, c’est sûr qu’elles le seront pour l’enfant, avec en plus de l’incompréhension de leur côté, ajoute-t-il.

Et si l’enfant a été exposé à des reportages télévisés violents, le parent doit s’efforcer de contextualiser les événements tout en surveillant toute évolution de comportement, précise M. Bureau. S’il est plus taciturne, qu’il joue moins, il faut gratter un peu, lui parler, mais surtout que lui en parle.

Remettre en perspective

Les parents doivent jouer leur rôle auprès des enfants en relativisant la situation, poursuit le professeur en psychologie. Cela signifie, par exemple, de leur dire que des conflits, malheureusement, il y en a toujours eus, qu’il faut faire confiance, que des gens vont trouver des solutions. Replacer la crise immédiate dans une perspective à plus long terme permet de prendre un certain recul. Comme pour la pandémie, on en a connues dans l'histoire, on est passé au travers, philosophe le professeur en psychologie.

Il faut avoir un discours rassurant sans nier qu’il va se passer quelque chose, mais qu’éventuellement, il va y avoir une solution.

Une citation de Jean-François Bureau, professeur titulaire à la Faculté des sciences sociales de l'École de psychologie de l'Université d'Ottawa

Pour l’historienne Linda Granfield, auteure de littérature jeunesse et d’ouvrages sur la Première et la Seconde Guerre mondiale, les écoles du Canada devraient promouvoir le témoignage des enfants réfugiés au Canada ayant connu la guerre.

J’ai rencontré des enfants venus de Bosnie, plus récemment de Syrie, d’Afghanistan, raconte-t-elle. Ces enfants font partie des classes, c’est l’occasion, s’ils le veulent, de partager avec leurs camarades leur expérience de guerre. La peur sera interprétée différemment si elle est racontée par un autre élève.

Faire une petite différence donne de la force aux enfants

Prendre des nouvelles d’amis ukrainiens, faire des dons ou agir à son niveau peut contribuer à faire une grande différence chez l’enfant, analyse la psychologue et professeure Laura Armstrong.

S’impliquer en tant que parent ou enseignant peut rassurer les enfants et leur redonner du courage. Il est très important de développer leur résilience, ajoute-t-elle. Souvent, les enfants sont touchés différemment lors d'événements majeurs qui surviennent dans le monde réel, où ils ne savent pas quoi faire.

En somme, agir, c'est aussi reprendre le dessus sur ses émotions. Est-ce qu’il y a-t-il quelque chose, même minime, que nous pouvons faire pour aider à résoudre la situation? Cette approche, assure-t-elle, aide les enfants à transformer leur impression d’impuissance en sentiment de pouvoir faire quelque chose.

Prendre soin de soi, en tant que parent

Après deux ans de pandémie, être toujours la personne-ressource pour l’enfant a peut-être fini par atteindre le parent, note Jean-François Bureau.

Le b.a.-ba? Il faut faire attention à soi, surtout si l’on veut passer plus de temps de qualité en famille et éviter de transmettre ses propres angoisses éventuelles, dit-il.

La professeure Laura Armstrong suggère elle aussi d’établir un environnement calme au sein du foyer.

Avec les informations de Thilelli Chouikrat

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