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Fusillades : à Toronto, les tireurs et les victimes sont de plus en plus jeunes

Des armes à feu saisies par la police de Toronto.

En 2021, il y a eu 408 fusillades à Toronto, selon les données du Service de police de la ville.

Photo : La Presse canadienne / Chris Young

Quatorze ans : c’est l’âge de l’adolescent accusé du meurtre au premier degré, par arme à feu, de Jahiem Robinson dans une école secondaire de Toronto lundi. Selon le Service de police de la ville, les personnes impliquées dans des fusillades à Toronto sont de plus en plus jeunes. Et ce phénomène ne surprend pas un militant contre la violence armée et un intervenant jeunesse de Toronto.

J’ai toujours dit qu’il est plus facile de se procurer une arme à feu que de trouver un emploi quand on vit dans les quartiers défavorisés de Toronto, lance Karim Grant, qui travaille auprès des jeunes des quartiers défavorisés de Toronto depuis plus de 15 ans.

Avec son entreprise, Make it Happen Inc, cet ancien joueur de football professionnel met sur pied des activités sportives pour les jeunes.

Selon lui, la pauvreté et les faibles possibilités de mener une vie décente dans les communautés plus démunies de la ville expliquent pourquoi tant de jeunes sont attirés par la criminalité.

La première chose qu’ils me disent, c’est : "Karim, pourquoi travailler de 9 h à 17 h quand je peux gagner autant d’argent en vingt minutes qu’en huit heures de travail?”

Karim Grant sur un terrain de football.

Karim Grant met sur pied des activités sportives pour les jeunes des quartiers défavorisés de Toronto.

Photo : Gracieuseté : Karim Grant

C’est très difficile pour ces jeunes de voir les possibilités qui s'offrent à eux parce qu’il y a très peu de ressources autour d’eux, explique ce Torontois qui a lui-même grandi dans un milieu défavorisé.

« Ils gravitent vers ce à quoi ils sont exposés. »

— Une citation de  Karim Grant, intervenant jeunesse

Des tireurs de plus en plus jeunes

Selon le Service de police de Toronto, un tiers des homicides commis en 2022 impliquent des victimes ou des personnes accusées de moins de 20 ans.

Des adolescents de moins de 15 ans ont d’ailleurs fait l’objet d’accusations à la suite de deux fusillades cette année.

La police indique également que la moyenne d’âge des personnes impliquées dans des incidents de violence par arme à feu est passée de 25 ans entre 2015 et 2020 à 20 ans en 2021.

C'est très dérangeant, quelque chose doit changer, a déclaré le chef adjoint du Service de police de Toronto, Myron Demkiw, en conférence de presse mardi.

Il n’y a aucune explication rationnelle pour justifier qu’un jeune de 13, 14 ou 15 ans ait accès à des armes à feu illégales, encore moins qu’il éprouve le besoin de s’en servir.

Culture des armes

Nous sommes surpris et choqués dans la mesure où c'était prévisible et où nous observons cette tendance depuis des années, a affirmé Louis March, fondateur du mouvement Zero Gun Violence, un organisme de sensibilisation à la violence armée dans la région de Toronto, à l'émission de radio de CBC Metro Morning mercredi.

Un homme qui porte des lunettes et une casquette parle dans la rue lors d'une entrevue.

Louis March est le fondateur du mouvement Zero Gun Violence.

Photo : Radio-Canada

Selon lui, la culture qui entoure la violence par arme à feu a changé de manière radicale au cours des deux dernières décennies.

À l’époque, dit-il, la quantité d’armes en circulation dans les communautés était réduite.

Il n’y avait généralement qu’une ou deux armes à feu en circulation dans une communauté et elles étaient prêtées, partagées ou encore louées. [...] Aujourd’hui, les jeunes ont une ou deux armes en leur possession, et ce ne sont pas des armes de poing mais des armes semi-automatiques.

Il ajoute que les jeunes sont plus enclins à utiliser leurs armes qu’auparavant et que la violence est de plus en plus imprévisible.

Cinq armes à feu étiquetées sur une table.

Ces armes ont été saisies lors de l'enquête sur le meurtre par armes à feu d'un Torontois âgé de 19 ans en janvier 2021. Des accusations ont été portées contre un homme de 19 ans et contre quatre adolescents. L'un d'eux, âgé de 16 ans, est accusé de meurtre au premier degré.

Photo : Gracieuseté : Service de police de Toronto

Bien des jeunes que je connais partagent des armes à feu. Ils ont une cachette où ils mettent toutes leurs armes, et quand ils veulent commettre un crime, ils disent : "Va dans ce stationnement souterrain, prends un fusil et assure-toi de le nettoyer avant de le ramener", explique Karim Grant.

Il se demande toutefois de quelle manière un nombre aussi élevé d’armes peuvent arriver jusqu’à Toronto.

Comment des adolescents qui n’ont même pas de passeport, qui ne sont jamais sortis de leur quartier, ont-ils accès à autant d’armes qui proviennent de partout dans le monde? se demande-t-il en précisant qu’Ottawa doit en faire davantage pour contrer l’entrée d’armes illégales au Canada.

Toronto lance une nouvelle stratégie

La Ville de Toronto a récemment mis au point une nouvelle stratégie sur 10 ans en collaboration avec le Service de police, la santé publique, des organisations communautaires et divers ordres de gouvernement afin de réduire la violence par armes à feu.

Elle prévoit aussi créer un service spécialisé dans la prévention de ce type de violence.

Dans une déclaration par courriel, elle indique avoir investi plus de 5,36 millions de dollars en 2021 et en 2022 dans des programmes destinés à prévenir la violence chez les jeunes.

Louis March souligne toutefois que le temps presse, d'autant plus, dit-il, que la fermeture des salles de classe et des centres communautaires en raison de la pandémie a exacerbé le problème.

Nous ne savions plus où ils se rassemblaient : dans les corridors, dans des immeubles de logements, dans des stationnements intérieurs, dans la rue. Nous ne pouvions plus les tenir à l'œil, déplore-t-il.

Parfois, je crois qu’on a besoin d’un programme sur 10 jours, pas sur 10 ans. [...] Il doit y avoir un sentiment d’urgence, pense-t-il.

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