Souder sa communauté grâce à la cuisine traditionnelle

Chris Boreland est le propriétaire de la compagnie Elbo, qui se spécialise dans la confection de galettes jamaïcaines.
Photo : Radio-Canada / Justine Beaulieu-Poudrier
Préserver un lien avec sa communauté peut être compliqué pour les personnes noires qui vivent en situation de minorité culturelle. C’est face à ce constat que Christopher Boreland, chef cuisinier, a pris l’initiative de célébrer sa culture et de créer un sens de la communauté à travers son entreprise, Elbo Patties.
Le Vancouvérois cuisine plusieurs plats de la cuisine de la Jamaïque, pays d’origine de ses parents. Sa signature : les patties
, galettes fourrées aux légumes ou à la viande soigneusement assaisonnées aux épices.
J’ai choisi de cuisiner des patties principalement parce que c’est quelque chose avec quoi j’ai grandi
, explique Christopher Boreland, qui a grandi à Scarborough, en Ontario.
À son arrivée à Vancouver, il y a 11 ans, il ne trouvait pas de mets qui puisse le rapprocher de sa ville natale et de ses racines. C’est ce qui l'a poussé à lancer Elbo Patties quelques années plus tard.
Cuisiner pour les personnes noires
Environ 43 000 personnes noires vivent en Colombie-Britannique, selon les données du recensement de 2016.
Être connu de ses pairs, dans une ville où la communauté noire est minoritaire, présente plusieurs défis. Seul le noyau de la communauté connaissait Elbo Patties à ses débuts
, précise Christopher Boreland, qui est aussi le fondateur du collectif Afro Queer.
Dès le début, mon slogan a toujours été inclusif parce que les patties sont pour tous
, confie le chef cuisinier, qui souhaite faire connaître ses galettes jamaïcaines au plus grand nombre.
Mais je me concentre sur le fait d’atteindre la communauté noire et queer, qui me ressemble, dans un espace sécuritaire pour les personnes queers caribéennes.
À travers son collectif, Christopher Boreland organise des évènements pour célébrer la fierté, destinés aux personnes noires et queers et au cours desquels il cuisine pour tous.
Dans la culture caribéenne, la nourriture représente une part importante de l’identité : être assis autour de la table et rompre le pain avec sa famille, c'est important. Cela nous permet de nous rapprocher des autres et de nos racines
, dit-il.
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La difficulté de trouver des ingrédients
Le lancement d'Elbo Patties a été difficile, dit Christopher Boreland, notamment pour trouver les ingrédients dont il a besoin pour produire ses galettes en petites quantités.
Après avoir discuté avec des membres du milieu de la restauration, il travaille désormais avec des épiciers et des fermiers locaux pour retrouver ses ingrédients.
J'ai encore des difficultés pour trouver des ingrédients comme leScotch Bonnet, l’ingrédient clé pour rendre mes galettes le plus authentiques possible
, confie-t-il, même s'il a trouvé un fournisseur à Richmond, dans le Grand Vancouver.
L’acculturation alimentaire détériore la santé des immigrants
Sandrine Staco, diététiste et nutritionniste à Montréal, souligne l’importance pour la communauté noire de cuisiner leurs plats traditionnels.
« L’alimentation, c’est les nutriments, mais c’est tellement plus : c’est un lien avec le pays d'origine, un lien avec nos ancêtres, nos souvenirs, une façon de se connecter entre les gens de la même culture. »
D'ailleurs, une fois arrivés au Canada, les immigrants qui conservent le plus possible leurs habitudes alimentaires culturelles gagnent en bénéfices sur leur santé. Il s’agit de l’effet de l'immigrant en santé
, selon elle.
Selon Statistique Canada, l'état de santé des immigrants est généralement meilleur que celui des personnes nées au Canada.
En effet, à leur arrivée, ils sont généralement en bonne santé parce qu’ils doivent subir un processus de dépistage médical. Toutefois, leur santé a tendance à se détériorer avec le temps passé au Canada.
L’acculturation alimentaire, c'est-à-dire l'adoption d'habitudes alimentaires du pays d'accueil, en est l’une des causes, note Sandrine Staco. Plus l’immigrant adoptera les habitudes alimentaires du pays d'accueil, plus le risque de développer des maladies chroniques augmente.
Un reportage d'Audrey Simon et Justine Beaulieu-Poudrier