La Ville d’Ottawa réclame 1800 personnes en renfort immédiatement pour sortir de la crise
Sept corps policiers prêtent main-forte à la police d’Ottawa pour gérer ce qui est devenu une occupation d'une ampleur jamais vue dans la capitale.
Photo : La Presse canadienne / Justin Tang
Dans une lettre envoyée lundi aux gouvernements fédéral et ontarien, le maire d'Ottawa, Jim Watson, et la présidente de la Commission des services policiers, Diane Deans, demandent l'aide immédiate de plus de 1700 policiers et d’une centaine de membres du personnel civil, pour « réprimer l’insurrection ».
La lettre de deux pages spécifie que la situation requiert des ressources spécialisées dans les cyberenquêtes, qui possèdent une expertise en criminalistique numérique, financière et dans les médias sociaux
.
Le maire se rend à l'évidence que, dans l'état actuel des choses, la police ne peut à elle seule maîtriser le problème.
Jim Watson estime que la situation actuelle équivaut à une guerre psychologique. C'est pourquoi, affirme-t-il, il faut utiliser tous les moyens possibles pour mettre un terme aux activités criminelles et [au] hooliganisme
qui ont cours dans le centre-ville d'Ottawa depuis près de deux semaines.
Appel à l'aide de la police
Plus tôt lundi, le chef de la police d’Ottawa, Peter Sloly, a réclamé une « importante augmentation » de ressources policières et civiles. Il veut aussi sur le terrain plus d’agents municipaux pour ramener l'ordre dans le centre-ville.
Il a lancé aussi un appel pressant aux autorités fédérale, provinciale et municipale.
Nous avons besoin d'aide
, a-t-il dit. Ces ressources sont nécessaires, selon lui, pour mettre fin à la manifestation rapidement et sans violence.
Déjà, sept corps policiers prêtent main-forte à la police d’Ottawa pour gérer ce qui est une occupation d'une ampleur jamais vue dans la capitale, selon le chef du Service de police. C’est insuffisant
, a décrété le chef Sloly. Il nous en faut plus.
La police augmente la pression
On augmente la pression de toutes les façons possibles sur les manifestants
, a déclaré Peter Sloly lors d'une brève rencontre avec la presse lundi.
Depuis vendredi, la police a arrêté 20 protestataires et distribué plus de 500 contraventions.
La police a remorqué des camions et d'autres véhicules.
Le chef Sloly estime que la manifestation perd de l'ampleur. Les autorités signalaient en fin de semaine la présence d’un millier de camions et d’environ 5000 sympathisants, ce qui est nettement moins que la foule rassemblée lors de la première fin de semaine de protestation.
La police cherche maintenant à couper les vivres aux manifestants qui refusent de quitter les lieux.
Elle affirme traquer toutes les sources de financement possible, pour les intercepter. Le chef de la police rappelle que les autorités ont réussi à bloquer le fruit d'une campagne de sociofinancement qui avait amassé plusieurs millions destinés aux camionneurs.
La police s'attaque aussi aux ressources matérielles livrées pour soutenir le mouvement d'occupation du centre-ville.
Depuis dimanche, des milliers de litres de propane et de diésel ont été saisis.
Une opération policière menée sur le site du chemin Coventry, transformé en quartier général des camionneurs, a aussi permis aux agents de récupérer un réservoir d'huile, des spas et des saunas.
Mais le chef de la police ajoute que dès que des agents démantèlent un site de ravitaillement, d’autres s'organisent ailleurs presque simultanément. C’est pourquoi du renfort est immédiatement requis.
Peter Sloly revendique une aide rapide et considérable, d'ici tout au plus 72 heures.
La communauté n’en peut plus
, affirme-t-il. Il constate que les citoyens du centre-ville ont atteint un point de rupture. Le chef policier ajoute que la situation est aussi extrêmement exigeante et épuisante pour les membres de son service. Tous les congés sont annulés. Personne n'est en congé, tous les policiers sont déployés sur le terrain
, sans relâche, pendant de longues heures et de grands froids. Il poursuit :certains sont sur le terrain sans arrêt depuis 14 jours, 12 heures par jour. C'est difficile pour tout le monde
, conclut-il.
Le chef de police adjoint d'Ottawa, Steve Bell, a mentionné qu'une personne de l'Ohio, aux États-Unis, avait été arrêtée relativement à une menace contre le quartier général de la police. Il a soutenu que des menaces provenaient de partout en Amérique du Nord et qu'elles pesaient lourdement sur des ressources déjà épuisées.
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C'est à la police d'Ottawa de faire respecter la loi et l'ordre
Dans une conférence de presse tenue en début d’après-midi lundi, pas moins de cinq ministres du gouvernement Trudeau ont donné leur point de vue sur la situation, mais aucun n’a donné le moindre signe que le gouvernement fédéral souhaite intervenir dans ce dossier.
Les ministres de la Protection civile et de la Sécurité publique, Bill Blair et Marco Mendicino, ont tous deux répété que les gouvernements ne peuvent donner des directives aux forces de l’ordre, qui agissent indépendamment du pouvoir politique dans une saine démocratie.
Je vais être clair : ce n’est le rôle d’aucun gouvernement de diriger les opérations des forces de l’ordre. C’est de la responsabilité et de la compétence de la police, dans ce cas, de la police d’Ottawa, de maintenir l’ordre public et de faire respecter la règle de droit
, a dit sans détour le ministre Blair.
Ils doivent avoir les ressources appropriées et ils ont les outils et les autorisations appropriées dont ils ont besoin pour que leur communauté demeure en sécurité
, a-t-il ajouté à propos des corps policiers, avant d’indiquer que son gouvernement a déjà approuvé toutes les demandes d’assistance reçues de la part du gouvernement de l’Ontario et de la Ville d’Ottawa.
Le ministre fédéral de la Protection civile a aussi proposé la création d’une table tripartite réunissant des représentants du fédéral, de Queen’s Park et d’Ottawa afin que les lignes de communication demeurent ouvertes
et que la réponse à la situation qui évolue sur le terrain soit rapide et efficace
.
Bill Blair a cependant lui-même admis qu’il ne s’agissait là que de resserrer des liens déjà établis entre les policiers des trois ordres de gouvernement depuis le début de la manifestation des camionneurs.
S’adressant aux manifestants toujours présents devant le parlement, le ministre Blair a dénoncé les nombreux gestes illégaux
qui ont violé les droits et libertés des résidents depuis 11 jours. Il est plus que temps de mettre fin à cette protestation
, leur a-t-il lancé.
Il doit y avoir plus de progrès, plus rapidement
Il y a eu des progrès au cours des dernières heures, et il doit y avoir plus de progrès, plus rapidement
, a ajouté le ministre Bill Blair, avant de remercier les policiers d’Ottawa pour leur travail.
Au cours des prochaines semaines, nous devons être clairs que nous ne pourrons pas nous retrouver dans cette situation à nouveau
, a aussi souligné le ministre.
Le ministre des Transports, Omar Alghabra, a pour sa part suggéré aux policiers de sévir contre les manifestants en utilisant les pouvoirs qui leur sont conférés en vertu du Code de la route. Le Québec a réussi à le faire en fin de semaine dernière, a-t-il souligné.
Le ministre Alghabra a aussi suggéré que les autorités provinciales suspendent les licences commerciales et les assurances des propriétaires de camions qui bloquent des rues de la capitale fédérale.
Il est clair que bloquer des rues et des ponts viole la loi, et cela devrait entraîner de graves conséquences pour les propriétaires
, a-t-il renchéri.
La présidente du Conseil du Trésor, Mona Fortier, est aussi députée d’Ottawa-Vanier, un quartier touché par l’occupation du centre-ville. Elle exige le départ du convoi, au nom des résidents, des familles, des travailleurs, des entreprises et des organismes communautaires d’Ottawa-Vanier, d’Ottawa-Centre et de toute la région de la capitale nationale
.
« Je vous dis clairement : nous en avons eu assez. Cette situation doit cesser. »
Le député provincial d’Ottawa-Centre, Yasir Naqvi, dénonce aussi les actions des protestataires qui ne sont ni pacifiques ni légales
. Il dénonce le harcèlement et le racisme subis par des membres de sa communauté qui sont mis devant des symboles racistes et douloureux, et doivent endurer des klaxons incessants et toutes sortes d’insultes
.
Avec les informations de La Presse canadienne