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Convoi des camionneurs : GoFundMe convoquée à un comité des Communes

Un agent du Service de protection parlementaire surveillant la manifestation des camionneurs.

Voilà presque une semaine qu'une centaine de personnes manifestent bruyamment contre les mesures sanitaires du gouvernement Trudeau devant le parlement.

Photo : La Presse canadienne / Adrian Wyld

Radio-Canada

Un comité fédéral a voté à l'unanimité pour convoquer les responsables du site de financement participatif GoFundMe afin que ceux-ci puissent répondre aux questions des députés concernant la collecte de fonds ayant permis de financer la manifestation des camionneurs qui paralysent la colline du Parlement depuis plusieurs jours.

La motion avait été déposée par le député néo-démocrate Alistair MacGregor. Libéraux, conservateurs et bloquistes l'ont appuyée. Le texte appelle les responsables de GoFundMe à comparaître dès que possible devant le Comité permanent de la sécurité publique et nationale.

Ses membres souhaitent que les responsables du site web s'expriment sur les mesures mises en place pour s'assurer que les fonds ne sont pas utilisés pour promouvoir l'extrémisme, la suprématie blanche, l'antisémitisme et d'autres formes de haine qui ont été exprimées parmi les organisateurs du convoi.

Le comité souhaite notamment savoir comment GoFundMe empêche les dons anonymes et les fonds étrangers de financer des groupes extrémistes. Il aimerait aussi avoir la garantie que le million de dollars qui a déjà été débloqué ne serve pas à promouvoir des opinions et des activités inacceptables.

Comme l'a proposé le député libéral Taleeb Noormohamed, la motion demande aussi aux responsables du Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE) – l'unité du renseignement financier du Canada – de comparaître devant le comité.

Le député néo-démocrate Alistair MacGregor aux Communes.

« Il y a de vraies questions à poser sur la transparence de cette opération, étant donné que le fonds dépasse maintenant les 10 millions de dollars, que de nombreux donateurs sont anonymes et que plusieurs d'entre eux se trouvent dans des endroits hors de la juridiction du Canada », fait valoir Alistair MacGregor.

Photo : La Presse canadienne / Justin Tang

Une analyse des dons effectuée la semaine dernière par CBC, le réseau anglais de Radio-Canada, a révélé qu'au moins un tiers des donateurs de la campagne de financement Freedom Convoy 2022 sur GoFundMe étaient répertoriés comme anonymes ou utilisaient des noms inventés.

Dans la section des commentaires, un certain nombre de donateurs ont déclaré qu'ils étaient basés dans d'autres pays, comme les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Australie ou la Pologne.

En entrevue à La Presse canadienne, Alistair MacGregor a affirmé qu'il avait présenté la motion parce qu'il était préoccupé par une déclaration de la police d'Ottawa la veille selon laquelle un « élément important » aux États-Unis avait participé au financement de la manifestation canadienne.

Nous n'avons pas vraiment d'idée en raison de la nature anonyme de ces donateurs quant à leur motivation première ou à leur objectif ultime. Cela pourrait être assez néfaste, cela pourrait être tout à fait innocent. Nous ne savons pas et c'est un très réel et très gros problème.

Une citation de Alistair MacGregor, député néo-démocrate de Cowichan–Malahat–Langford, en Colombie-Britannique

Par ailleurs, le Bloc québécois a déposé jeudi sa propre motion pour que l'ensemble des élus fédéraux déclare que l'occupation qui se tient devant la cité parlementaire à Ottawa est illégale, demande à GoFundMe de suspendre tous les fonds destinés à ce siège et demande aux participants de quitter les lieux paisiblement.

La motion bloquiste a toutefois été rejetée puisque le consentement unanime nécessaire à son adoption n'a pas été obtenu.

Une campagne suspendue

La collecte lancée sur GoFundMe vise à financer la manifestation des camionneurs, qui réclament la fin des mesures sanitaires imposées par le gouvernement Trudeau pour lutter contre la COVID-19. Elle a permis jusqu'ici d'amasser 10,1 millions de dollars auprès de plus de 120 000 donateurs.

Cette campagne, toutefois, a été suspendue mercredi par GoFundMe.

L'entreprise a expliqué avoir entamé des vérifications pour s'assurer du respect de ses conditions de service, qui stipulent que l'argent recueilli ne peut pas être utilisé pour promouvoir la haine, la violence, le harcèlement et l'intimidation, entre autres comportements antisociaux.

Trois camions garés devant le parlement.

La colline du Parlement est complètement paralysée.

Photo : Radio-Canada / Christian Milette

Certains donateurs ont déclaré sur les réseaux sociaux que GoFundMe aurait l'intention de les rembourser, mais l'entreprise refuse pour l'instant de répondre aux questions sur le sujet. Elle n'a pas réagi non plus à la convocation votée jeudi au Parlement.

GoFundMe a déjà déclaré qu'un million de dollars des fonds récoltés avaient été versés aux instigateurs de la manifestation.

Lors d'une conférence de presse tenue jeudi par les organisateurs du convoi, Keith Wilson, du Centre de justice pour les libertés constitutionnelles, a fait savoir que les manifestants avaient entrepris des mesures pour s'incorporer et ouvrir officiellement des comptes bancaires.

L'organisation travaille actuellement à élaborer un système qui permettra d'acheminer l'argent aux camionneurs ayant participé au convoi une fois que GoFundMe aura effectué les vérifications nécessaires, a-t-il ajouté.

Nos avocats ont envoyé à GoFundMe tous les détails qu'ils nous ont demandés, a spécifié la manifestante Joanie Pelchat, qui a pris la parole lors de la conférence de presse.

Nous sommes convaincus que GoFundMe dispose désormais de toutes les informations nécessaires pour lever immédiatement la suspension qu'ils ont imposée à notre campagne.

Une citation de Joanie Pelchat, manifestante

J'espère avoir des nouvelles de GoFundMe bientôt afin que nous puissions acheminer l'argent aux camionneurs et faire avancer notre protestation pour la liberté, a-t-elle déclaré.

Un rayonnement international

La manifestation, qui se poursuit devant le parlement canadien, a eu un écho dans plusieurs autres pays, y compris aux États-Unis.

L'ex-président Donald Trump et son fils, Donald Trump fils, ont tous deux exprimé leur soutien, tandis qu'un membre républicain du Texas de la Chambre des représentants a déclaré à tort que le premier ministre Justin Trudeau avait quitté le pays dans la foulée.

La plateforme américaine Gab, un réseau social accusé de fomenter des opinions extrémistes, a aussi apporté son soutien au convoi après la suspension de la campagne sur GoFundMe en orientant ceux qui souhaitaient aider financièrement les manifestants canadiens vers des sites de cryptomonnaie.

Anne-Marie Dussault s'entretient avec le professeur David Morin.

Professeur à l’Université de Sherbrooke et cotitulaire de la Chaire UNESCO en prévention de la radicalisation et de l’extrémisme violents, David Morin affirme que ces interventions ne sont pas très étonnantes étant donné les liens entre les droites alternatives (« alt-right ») canadienne et américaine.

Non seulement est plausible qu'une partie des fonds ayant servi à organiser le convoi proviennent des États-Unis, mais il n'est pas impossible, selon lui, que des citoyens américains aient traversé la frontière pour venir manifester à Ottawa, vu la présence de drapeaux confédérés parmi les symboles brandis devant le parlement.

En entrevue jeudi soir à l'émission 24•60, M. Morin dit aussi avoir vu flotter des drapeaux des Three Percenters, une milice américaine connue pour avoir joué un rôle important dans l'assaut du Capitole le 6 janvier 2021 à Washington, et qui est considérée comme une entité terroriste au Canada depuis l'été dernier (Nouvelle fenêtre).

Admettons qu'il y ait ce genre de groupe là qui donne de l'argent, il y aurait effectivement du financement qui serait totalement illégal, a-t-il illustré.

Cela dit, d'autres pays sont connus pour leur propension à tenter de déstabiliser les sociétés occidentales, a concédé M. Morin, qui, sans montrer du doigt la Russie, a tout de même rappelé que les usines à trolls de celle-ci étaient particulièrement efficaces pour ajouter du bruit au bruit.

Dans tous les cas, il faudra, juge le professeur, continuer d'être vigilants dans les semaines et les mois à venir pour demander des comptes à GoFundMe, ne serait-ce que pour protéger les donateurs d'éventuels détournements. Il y a un dispositif de vigilance à mettre en place, a-t-il conclu, jeudi.

Avec les informations de CBC et La Presse canadienne

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