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Destitution d’Erin O’Toole : des avis partagés dans un caucus conservateur divisé

Erin O'Toole s'adresse à la presse.

Erin O’Toole lors d'un point de presse le 6 janvier dernier

Photo : La Presse canadienne / Justin Tang

Radio-Canada

La destitution d’Erin O’Toole a été sans appel : près des deux tiers des députés conservateurs ont voté mercredi pour le démettre de ses fonctions, ouvrant la voie à une course à la direction. Si la garde rapprochée de M. O'Toole a accepté l'issue du vote avec inquiétude et dépit, ses détracteurs se sont félicités de cette victoire et ont lancé un appel à l'unité du parti en vue d'un prochain scrutin.

J’ai eu le grand privilège de servir Erin O’Toole pendant un an et demi. C’était un homme entièrement dévoué au Canada […] Je n’ai jamais vu un homme aussi flegmatique faire face à l’adversité. Il n’avait pas d’amertume, a déclaré le député conservateur Gérard Deltell, qui avait voté en faveur du maintien d'Erin O'Toole comme chef.

C'est un ami. C'est une personne qui a su bien servir notre pays au fil des ans, a dit le député d'Abbotsford, Ed Fast. C'est une nouvelle ère qui commence aujourd'hui, un nouveau départ, mais rappelons-nous qu'il s'agit d'une journée difficile pour Erin et sa famille.

La politique est difficile, souvent ingrate, parfois cruelle, a pour sa part écrit sur Twitter le député de Richmond–Arthabaska, Alain Rayes, avant de remercier M. O’Toole pour son dévouement à la tête du parti.

C'est la cheffe adjointe Candice Bergen qui assurera l'intérim à la tête du Parti conservateur.

Des volte-face dénoncées

De nombreux détracteurs d'Erin O'Toole reprochaient au politicien une incapacité à exprimer clairement ses positions. Après avoir fait volte-face sur la taxe carbone et les armes à feu, il avait une fois de plus changé son fusil d'épaule, la semaine dernière, en dénonçant le comportement de certains manifestants à Ottawa.

Le chef n'arrêtait pas de changer d'avis; c'est pour ça que j'ai décidé de le défaire, a indiqué Matt Jeneroux, député d'Edmonton Riverbend.

Par ailleurs, plusieurs députés de l’ouest du pays n’ont pas aimé le recentrage qu’Erin O’Toole a tenté d'effectuer au sein du parti, surtout après s'être présenté comme étant un vrai bleu devant son adversaire Peter MacKay, il y a un an et demi.

Aujourd’hui, plusieurs élus, notamment du Québec, s’inquiètent de voir le parti prendre un virage un peu trop à droite. Moi, je suis élu pour représenter le Parti conservateur du Canada, qui pour moi est un parti progressiste-conservateur. Il doit rester progressiste-conservateur, a rappelé le député de Portneuf–Jacques-Cartier, Joël Godin.

Si Erin O'Toole a bel et bien tenté de rapprocher le parti du centre de l'échiquier politique, la députée de Milton et ancienne ministre, Lisa Raitt, ne croit pas que cet effort soit à l'origine de son échec. Je crois que c'est le chef lui-même et non sa vision, a-t-elle dit.

Le député de Charlesbourg–Haute-Saint-Charles, Pierre Paul-Hus, a abondé dans le même sens. Ça remonte déjà à la course à la chefferie, a-t-il dit. M. O'Toole s'était présenté d'une façon aux membres du Parti conservateur pour avoir le vote. Et au lendemain de son élection, il a fait 180 degrés. Ça a déplu beaucoup, parce qu'on dit : vous avez créé un personnage et, finalement, vous n'êtes pas ce personnage.

Le sénateur conservateur Claude Carignan a lui aussi estimé que ce qui a nui à Erin O'Toole est sa façon d'exercer le leadership, en plus de ses volte-face sur certaines questions.

Le verdict des députés conservateurs est tombé aujourd'hui, à 73 voix contre 45 : Erin O'Toole n'est plus chef du parti. Entrevue avec Gérard Deltell, leader parlementaire du Parti conservateur du Canada.

Un vote des militants déjà prévu en 2023

D'après trois sources au sein du caucus conservateur, M. O'Toole avait indiqué qu'il était prêt à se soumettre à un vote de confiance des militants avant le congrès national de 2023. Dans ce contexte, la députée Lisa Raitt s'est dite surprise du résultat sans appel du vote qui n'a laissé, selon elle, aucune place à M. O'Toole pour décider ou non de soumettre cette question aux membres du parti.

Mais d'après le député de Calgary Shepard, Tom Kmiec, les membres du parti souhaitaient la destitution de M. O'Toole. On a perdu des élections et les députés, encore une fois, ont entendu nos membres de nos comtés qui étaient frustrés par le résultat et qui ne voyaient pas de changements qui venaient immédiatement […] qu’ils avaient le droit de demander. Je pense que ça a mené à cette journée, a-t-il dit.

Denise Batters, qui avait été exclue de tous les comités du Sénat après avoir remis en question le leadership d'Erin O'Toole en décembre, a félicité les 35 députés qui ont déclenché la tenue de ce vote de confiance. Je suis heureuse de constater aujourd’hui que le caucus du Parti conservateur a donné une direction claire sur le leadership du parti […] Maintenant, nous devons aller de l'avant ensemble, de manière unie, afin de servir les Canadiens, a-t-elle déclaré sur Twitter.

On a une occasion de se tourner vers l’avant et d’essayer de trouver une façon de réunir et de faire travailler tout le monde ensemble pour qu’on puisse faire face aux réels problèmes qu’on a, c’est-à-dire la crise de l’inflation au pays et de battre ce gouvernement, a renchéri le député de Mégantic–L'Érable, Luc Berthold.

Défis et divisions

L'ancien ministre Tony Clement a donné un avis plus pessimiste sur l'avenir de la formation politique. Je suis très inquiet et déçu que le Parti conservateur en soit arrivé là. Le parti est divisé, démoralisé et loin d'être prêt à gouverner. Un triste état de fait qui doit être corrigé rapidement dans l'intérêt du pays.

Selon Garnett Genuis, un des députés qui ont demandé une révision du leadership de M. O'Toole, le parti ne fait pas face à un schisme. Il y a certainement des questions sur lesquelles, de temps en temps, on a des opinions différentes, mais c'est assez variable, a-t-il déclaré en mêlée de presse.

« On n’a pas un caucus divisé. On est des gens qui s’adorent, qui s’aiment, mais il y avait des divisions qui ne devaient pas être là, et maintenant, ça doit être réglé. »

— Une citation de  Pierre Paul-Hus, député conservateur de Charlesbourg–Haute-Saint-Charles

Erin O'Toole avait des positions qui ne plaisaient pas à tout le monde, a concédé Gérard Deltell. Et c’est le lot de tout parti politique, soit dit en passant. Mais nous avons ce processus qui permet au caucus de porter une révision sur le chef, et ils ont voté et ont décidé. Cela dit, je ne suis pas un démocrate à géométrie variable et j’aurais bien entendu souhaité que M. O’Toole reste, mais les gens se sont prononcés et on regarde en avant.

Le gouvernement Trudeau étant minoritaire, des élections risquent de survenir plus tôt que tard, avant l'échéance officielle de 2025.

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