Dépôt du projet de loi mettant fin à la production d’hydrocarbures au Québec

Le puits Galt no 4 de Gaspé Énergie est, jusqu'à ce jour, le puits ayant produit le plus de pétrole au Québec.
Photo : Radio-Canada / /CBC
Le projet de loi 21, qui vise à mettre fin à la recherche et à la production d’hydrocarbures au Québec, a été déposé mercredi à l’Assemblée nationale par le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Jonatan Julien. Il prévoit des compensations estimées à environ 100 millions de dollars.
Le projet de loi va mettre officiellement un terme une fois pour toutes à ce chapitre de l’histoire des ressources naturelles du Québec
, a déclaré le ministre Julien en conférence de presse après le dépôt.
On deviendrait ainsi le premier État en Amérique du Nord à interdire l’exploitation et l’exploration des hydrocarbures sur son territoire.
Il s’agissait d’un engagement pris par le gouvernement Legault l’automne dernier.
Le projet de loi (Nouvelle fenêtre) doit révoquer les licences d’exploration et de production d’hydrocarbures et prévoit que le gouvernement établisse un programme d’indemnisation afférent à la révocation des licences
.
Enfin, il impose aux titulaires des licences révoquées de procéder à la fermeture définitive des puits et à la restauration des sites
, avec l'aide du gouvernement.
Les coûts des compensations et de l'aide à la réhabilitation sont estimés à un peu moins de 100 millions de dollars
, selon le ministre Julien.
Environ 33 millions de dollars serviront à couvrir 75 % des coûts estimés de réhabilitation de l’ensemble des puits sur le territoire du Québec
, et le reste servira à rembourser les frais de licences et les frais d'exploitation qui ont été encourus au cours des dernières années
.
Indemniser ou non?
Une trentaine d’organismes avaient demandé, suivant l’annonce de l’intention du gouvernement, à ce qu’il n’y ait pas de compensation pour les entreprises touchées. Une coalition de groupes environnementaux a réitéré cette demande par communiqué après le dépôt du projet de loi, disant craindre que les coûts de restauration dépassent ce que le gouvernement a prévu
.
Financer la fermeture des puits à hauteur de 75 % pourrait s’avérer être un gouffre sans fond pour le gouvernement
, a notamment déclaré Patrick Bonin, responsable de la campagne Climat-Énergie à Greenpeace Canada, qui est membre de la coalition.
De l’autre côté, des entreprises comme Ressources Utica soutenaient que le gouvernement devait payer (Nouvelle fenêtre) une compensation juste
pour leur expropriation.
L'Institut économique de Montréal (IEDM) est d'avis que Québec fait fausse route
en offrant des indemnisations qu'il juge inéquitables
. L'interdiction de l’exploitation des hydrocarbures est une bien mauvaise décision tant pour l’économie que pour l’environnement
, a aussi réagi l'Institut par communiqué.
Selon l'IEDM, les indemnisations devraient être basées sur la juste valeur marchande
des permis, et l'exploitation du gaz naturel au Québec pourrait réduire sa dépendance au marché extérieur.
Mais pour le Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE), l’Assemblée nationale a le pouvoir de procéder sans la moindre indemnisation
, a-t-il assuré dans une lettre ouverte (Nouvelle fenêtre) publiée en décembre.
Il a quand même fait un choix politique de le faire
, mais devrait limiter le plus possible cette indemnisation
, selon Me Anne-Sophie Doré, avocate au CQDE.
Le plus petit montant qui leur sera accordé sera le mieux parce que ce sont des fonds publics et il y a déjà des sommes importantes qui ont été investies dans cette industrie-là par le gouvernement
, a déclaré Me Doré en entrevue mercredi.
S'il n'a pas d'obligation légale de le faire, le ministre Julien estime que de ne pas accorder de compensation, ce serait faire la preuve qu’on n’est pas très sérieux au Québec et qu’on est une république de bananes essentiellement
. Mais le projet de loi ne prévoit aucun dédommagement qui serait donné pour la perte de revenus ou de profits d’une exploitation hypothétique
, a-t-il précisé.
Radio-Canada a contacté plusieurs entreprises détentrices de licences d'exploration au Québec – notamment Questerre Energy Corporation, Ressources Utica, Cuda Pétrole et Gaz, Ressource & Énergie Squatex et Pieridae Québec – pour obtenir leur réaction suivant le dépôt du projet de loi. Aucune n'avait répondu au moment d'écrire ces lignes.
Il y a 182 licences d’exploration en vigueur au Québec, selon le site web du ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles. Quelque 62 puits devront être réhabilités, selon le ministre Julien.
Plus de détails suivront