Cas de COVID-19 dans les classes : des parents et des profs prennent le relais
Puisque la nouvelle approche de Québec ne prévoit plus la divulgation des cas de COVID-19 actifs dans les classes, certains parents ainsi que des enseignants ont décidé de prendre des moyens pour faire circuler eux-mêmes l’information.

La nouvelle approche de Québec ne prévoit plus de divulguer comme avant les cas de COVID-19 actifs dans les classes.
Photo : Radio-Canada / Francis Ferland
Julie Ouellet se sent laissée à elle-même et dans le noir.
Comme bien d’autres parents, elle a appris il y a quelques jours qu’elle ne serait plus informée lorsque des camarades de classe de son garçon étaient en isolement à la maison en raison de la COVID-19. « Vous ne recevrez plus de communication de votre direction d’école à ce sujet », est-il indiqué dans message envoyé par le Centre de services scolaire de Montréal.
On sent qu’il n’y a plus de pilote dans l’avion et qu’on navigue à travers tout ça seuls comme parents.
Est-ce que son garçon a été en contact avec un ou plusieurs enfants qui ont la COVID-19? Est-ce qu’elle devrait lui faire passer un test de dépistage rapide ou le garder à la maison pour éviter que toute la maisonnée ne soit infectée? Voilà des questions qu’elle se pose régulièrement ces jours-ci.
C’est important pour moi de savoir, pour pouvoir prendre ma propre décision éclairée
, explique la mère de trois enfants, dont deux de moins de cinq ans, et donc non vaccinés.
Olivier Drouin, derrière l’initiative citoyenne COVID Écoles Québec qui surveille de près ces premiers jours de retour en classe sous le signe d’Omicron, affirme que bien d’autres parents sont préoccupés, comme Julie Ouellet, par ce manque de transparence. Plutôt que d’être dans la clarté et la communication, ce dont on a besoin en ce moment, les parents sont inquiets, dans l’inconnu, dans le noir
, lâche-t-il sur un ton découragé.
Des parents passent en mode auto-organisation
Puisqu’ils se sentent abandonnés par le réseau scolaire et la santé publique, certains parents ont donc décidé de prendre les choses en main. Les parents s’organisent entre eux et partagent de l’information, à travers les réseaux sociaux surtout
, confie Olivier Drouin.
Julie Ouellet fait partie des parents en mode auto-organisation
et se mobilise pour trouver un moyen de faire circuler l’information désormais inaccessible. Sur le groupe de parents de la classe de son garçon sur les réseaux sociaux formé au début de l’année scolaire, elle a proposé d’échanger des informations lorsqu’un enfant est malade.
Mme Ouellet a aussi contacté l’école primaire de son garçon pour voir dans quelle mesure il serait possible de rétablir un canal de communication au sujet de la circulation de la COVID-19 parmi les élèves. Selon elle, la direction de l’école n’est pas contre l’idée de divulguer le nombre de cas actifs, mais elle n’aurait pas les moyens de poursuivre cette gestion, surtout dans le contexte actuel de manque de personnel.
Elle propose donc la collaboration de parents volontaires pour colliger les informations signalées à l’école lorsque les enfants s’absentent en raison du virus, leur rappelant que ceux-ci pourraient de toute manière être appelés à prêter main-forte dans les écoles en cas de manque criant de personnel, comme le prévoit le plan de contingence du réseau scolaire préparé par Québec.
Je demande aux centres de services scolaires et aux écoles de laisser les parents les aider dans la gestion et la divulgation des cas.
Des professeurs aussi se mobilisent
De son côté, David (nom fictif) a été agréablement surpris de voir des enseignants de l’école primaire de ses enfants prendre le taureau par les cornes.
Un message de la professeure de sa fillette lui a appris que les enseignants du même niveau s’étaient entendus pour partager l’information lorsqu’il y aurait des absences liées à la COVID-19 dans leur classe respective afin de renseigner les parents. Il estime que cela lui donne la possibilité de faire une meilleure gestion des risques.
Il préfère ne pas être identifié publiquement pour ne pas porter préjudice à l’enseignante de sa fille.
Ça nous permet d’être tenus informés sans pour autant fermer les classes. Comme parent, ça nous permet d’être plus vigilant.
Il a donc appris dans les derniers jours que la COVID circulait puisque quelques cas avaient été signalés dans ce niveau. On apprécie de le savoir, parce qu’on prévoyait voir les grands-parents cette fin de semaine!
, dit-il. Ça va nous permettre au moins de faire passer un test rapide à notre fille et de briser la chaîne de contagion si jamais elle se révèle positive.
Olivier Drouin indique que quelques enseignants lui ont aussi dit avoir volontairement décidé d’informer les parents lorsque des absences liées à la COVID-19 se produisaient dans leur classe par souci de transparence, même si cela n’était pas nécessairement appuyé par les établissements scolaires.
Le président de la Fédération autonome de l’enseignement (FAE), Sylvain Malette, sans encourager ni décourager ce type d’initiative, dit comprendre que des enseignants agissent de la sorte.
C’est normal que les parents veuillent savoir ce qui se passe dans la classe de leur enfant
, dit-il. Donc, il y a une volonté de la part des enseignants d’entretenir le lien de confiance avec les parents et d’être transparents avec eux.
Le gouvernement s’est désengagé. Les directions d’écoles aussi. Donc, les professeurs font ce que le gouvernement ne veut plus faire, c’est-à-dire informer les parents.
La nouvelle approche de gestion des cas pour laquelle le gouvernement a opté depuis le retour sur les bancs d’école est de ne plus fermer les classes et basculer en enseignement à distance, sauf lorsque 60 % ou plus des élèves d’une même classe sont en isolement en raison de la COVID-19 deux jours consécutifs.
Selon les nouvelles règles, un enfant de moins de 12 ans en contact avec un cas de COVID-19 à l’école est considéré comme un contact à risque faible ou modéré et n’a donc pas à être isolé.
Pour cette raison, les écoles ne sont plus tenues d’informer les parents lorsque des cas positifs surviennent dans une classe. Toutefois, celles-ci pourront communiquer avec les parents, au besoin, comme ils l’ont toujours fait lors d’autres infections respiratoires
, précise le ministère de l’Éducation du Québec (MEQ) par courriel.
Les parents doivent de leur côté informer la direction de l’école fréquentée par leur enfant lorsque celui-ci s’absente. Par contre, ajoute le MEQ, ils ne sont pas tenus d'indiquer pour quelle raison. Si le parent précise que son enfant est en isolement à la maison parce qu'il a contracté la COVID-19 ou parce qu'il en présente des symptômes, le centre de services le déclarera dans sa cueillette de données. Sinon, il déclarera l'absence sans motif particulier.
Ces informations seront utilisées pour une nouvelle collecte de données qui portera sur l’absentéisme des élèves et des membres du personnel du réseau scolaire. Elles seront transmises à la santé publique, « qui effectuera les analyses appropriées », indique le MEQ.

Des infographies simplifiées guidant les parents lorsque leur enfant présente des symptômes de la COVID-19 ont été rendues publiques par le ministère de l'Éducation
Photo : Radio-Canada / Ministère de l'Éducation du Québec
Une commission scolaire anglophone à contre-courant
La commission scolaire Lester B. Pearson dans l’ouest de l’île de Montréal, elle, a décidé de mettre en place son propre système pour tenir les parents au courant de l’évolution des choses dans les écoles.
Le mercredi 19 janvier, elle a informé les parents qu’un nouvel outil avait été développé pour leur permettre d’avoir accès, via le portail en ligne pour les parents Mozaïk, à une mise à jour régulière de la situation dans leur école.
Dans un esprit de transparence et afin d’être aussi proactif que possible, notre commission scolaire a estimé que les parents et le personnel apprécieraient de recevoir des mises à jour quotidiennes concernant les absences liées à la COVID-19 dans notre communauté.
Cet outil ventilera pour chaque école le nombre d’élèves en isolement à la maison ainsi que ceux absents en raison d’un test rapide positif ou de symptômes de COVID-19.