Des entrepreneurs récalcitrants défient les mesures sanitaires au Nouveau-Brunswick
Certains ouvrent leurs portes malgré le confinement, d’autres préviennent qu’ils le feront bientôt.

Annick Nini, de Beresford, n'a pas l'intention de fermer son commerce.
Photo : Radio-Canada
Des entrepreneurs néo-brunswickois en ont ras le bol des restrictions sanitaires. Certains d'entre eux ont décidé de carrément ignorer les mesures sanitaires et de poursuivre leurs activités pendant le confinement. D’autres affirment qu’ils vont bientôt rouvrir leurs commerces, même si la province n'allège pas les mesures.
Une esthéticienne de Beresford, Annick Nini, refuse de fermer son salon, malgré les restrictions en vigueur. J’ai toujours suivi les consignes, depuis le début, mais là c’est trop.
Dans une publication faite sur Facebook, cette mère monoparentale dit que son travail est essentiel
pour nourrir ses filles
et avoir un toit sur la tête
, notamment.
« Puisque je n’ai pas l’aide adéquate du gouvernement pour pouvoir survivre, on ne me donne pas le choix, je dois continuer à travailler. »
Ça m’a pris un peu de temps pour prendre cette décision. J’ai fait une espèce de mental breakdown en apprenant cette nouvelle. Quand j’ai fait [ma publication sur Facebook], je ne pensais pas que ça allait être aussi bien accueilli, donc avec tout le bon soutien j’ai décidé de dire ouvertement que j’allais rester ouverte
, raconte Annick Nini.
Elle dit qu’elle a reçu beaucoup de soutien de la part des gens
.
À Edmundston, le propriétaire du restaurant Thaï Zone refuse lui aussi de se conformer aux règles de la phase 3. Steve Picard juge que ces règles – qui interdisent notamment aux clients de restaurants de s'asseoir dans les salles à manger – sont injustes.
Pour lui, comme pour de nombreux entrepreneurs, c’est la goutte qui fait déborder le vase.
Il explique qu’il a décidé de ne pas fermer sa salle à manger pour ne pas perdre de nourriture, pour ne pas perdre de revenus et pour ne pas envoyer des employés au chômage.
Steve Picard affirme être prêt à prendre le risque. S’il reçoit une amende, il va la payer, dit-il.
Des amendes salées
Les amendes imposées aux personnes qui enfreignent les règles sanitaires varient entre 480 $ 20 000 $ au Nouveau-Brunswick. Selon l'arrêté d'urgence, si un entrepreneur brise les règles pendant plusieurs jours, il commet une infraction distincte pour chacun de ces jours et peut donc recevoir plusieurs amendes.
J’écoute pour la dernière fois
Les entrepreneurs sont nombreux à être frustrés par ces nouvelles mesures. Plusieurs le font savoir sur les réseaux sociaux, comme Annick Nini, où d'innombrables publications font état de leur mécontentement.
La plupart suivent encore les règles, pour le moment. Toutefois, certains d’entre eux ont affirmé qu’ils vont rouvrir le 31 janvier – au lendemain de la date visée pour la fin du confinement – même si la phase 3 est prolongée.
Stéphane Girard a fermé son salon de barbier pendant deux semaines, mais il fait une mise en garde : dans deux semaines il retourne au travail, que la phase 3 soit terminée ou non.
« J'écoute pour la dernière fois. J’ai écouté, ça va faire deux ans. Le 31 [janvier], les confinements pour moi, personnellement, ils vont être finis. Je n’en fais plus jamais de nouveau de ma vie. Je suis écœuré. »
Il y a du monde qui reste ouvert tout de suite. Moi, je dis que dans deux semaines, je ne vais pas être le seul qui va réouvrir. Et pas juste des salons de barbiers. Je parle aussi des restaurants à Moncton
, dit le propriétaire du Stephane's Barbershop.
Frustration et incompréhension
Et même chez ceux qui acceptent de suivre les règles, la frustration se fait sentir.
La propriétaire du salon d'esthétique O Studio, à Tracadie, dans la Péninsule acadienne, dit qu’elle a peur de perdre son entreprise.
« Je ne veux pas être obligée de tout fermer et de tout perdre. »
Nathalie Legresley a pensé sérieusement garder ses portes ouvertes pendant le confinement. Elle n'a pas accès à l'aide provinciale parce qu'elle n'a pas d'employés.
Je dois t'avouer que si j'avais 30 ans, je le ferais [rester ouverte], mais je suis rendue à un âge où ce n’est plus évident de me battre
, dit-elle.
En attendant de pouvoir reprendre ses activités, elle a trouvé un moyen de gagner un peu d'argent. Elle vend des billets pour un tirage, afin de gagner des services dans son salon.
Se tenir debout et dire au gouvernement "assez c’est assez", et qu’on ne veut pas de charité, on veut travailler
, dit-elle.
De l'aide pour tout le monde, demandent les libéraux
Le Parti libéral demande au gouvernement de Blaine Higgs d'ajuster les critères pour l'aide financière aux entreprises lors de ce nouveau confinement afin d'offrir du soutien aux entrepreneurs indépendants ou autonomes.
Certaines entreprises sont obligées de fermer à nouveau. Bien que le gouvernement ait mis à disposition un soutien financier, les critères excluent les propriétaires d'entreprises indépendantes, comme les coiffeurs et coiffeuses, et les entreprises comptant moins de deux employés. C'est inacceptable
, dit le porte-parole de l'opposition officielle pour les petites entreprises, Gilles Lepage, dans une déclaration écrite lundi.
Le gouvernement a annoncé jeudi une nouvelle phase à son programme de subvention pour le rétablissement des petites entreprises. Ce programme prévoit une subvention pouvant atteindre 10 000 $ pour les entreprises qui emploient de 2 à 99 travailleurs et qui subissent des pertes de revenu.
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Parmi les commerces qui ne peuvent plus accueillir de clients lors de la phase 3, on compte les salons de coiffeurs, d'esthétique, de tatouage et de barbiers, les gymnases, les spas, les patinoires, les salles de bingo, les cinémas et les salles de spectacles. Les restaurants peuvent poursuivre leurs activités pour la livraison par exemple, mais les salles à manger doivent être fermées.
Le premier ministre du Nouveau-Brunswick, Blaine Higgs, a dit souhaiter que ce confinement se termine très rapidement. Il espère pouvoir lever certaines restrictions le 30 janvier, mais tout dépendra de l'évolution de la pandémie dans la province.
Avec des informations de Pascal Raiche-Nogue et Bernard LeBel