Mobilisation pour un réseau de la santé carboneutre

Les émissions nettes en provenance des soins de santé représentent 4,4 % des émissions mondiales de GES.
Photo : Radio-Canada / Martin Thibault
Le mouvement La Planète s’invite en santé et divers groupes, dont l’Association québécoise des médecins pour l’environnement, demandent au réseau de la santé et des services sociaux de prendre un virage vert.
Selon les données rapportées par le groupe Synergie, Santé et Environnement, si le secteur de la santé était un pays, il serait le cinquième émetteur mondial de gaz à effet de serre (GES). Les émissions nettes en provenance des soins de santé représentent 4,4 % des émissions mondiales de GES.
Ces constats ainsi que les impacts sur la santé humaine de la pollution atmosphérique, de la hausse des températures et des catastrophes météorologiques ont interpellé des organisations médicales et environnementales québécoises.
Elles ont récemment écrit une lettre au ministre de la Santé, Christian Dubé, demandant un plan d’action ministériel pour une carboneutralité du réseau de la santé d’ici 2040.
Plus de 2340 personnes ont déjà envoyé cette lettre au ministre Dubé qui réclame aussi des ressources et de l’argent pour assurer que ce virage vers des pratiques durables se concrétise.
Les auteurs de la lettre souhaitent que le ministère encadre la démarche par une législation et un suivi annuel des actions des établissements de santé et de services sociaux.
Enfin, les signataires estiment qu’une plateforme de recherche et de consultation regroupant tant les travailleurs que des universitaires ou des gestionnaires aiderait le réseau à mieux partager les outils, les informations et les progrès réalisés.
Une contradiction
La rédaction de cette lettre ainsi que le lancement d'une pétition en ligne, disponible jusqu’au 5 janvier sur le site de l’Assemblée nationale, sont issues d’une prise de conscience des impacts du réseau sur la santé des gens, explique Sarah Bergeron, qui fait partie du conseil d'administration de la coalition La Planète s’invite en santé.
Plusieurs activités du réseau de la santé sont des émettrices directes de GES. C’est le cas notamment du transport, de la climatisation, des systèmes énergétiques d’appoint ou de la production de déchets. Des médicaments, comme des gaz utilisés en chirurgie ou des inhalateurs pour les asthmatiques, sont aussi des sources directes de GES.

Un inhalateur destiné à un asthmatique
Photo : Reuters / Bassam Khabieh
Sarah Bergeron souligne la contradiction entre soigner des gens et contribuer en partie aux causes de leurs problèmes de santé. On sait que tout cela a un impact sur la santé des gens. C’est donc contre-productif si on décide de construire de nouvelles infrastructures ou de rénover certaines infrastructures ou de prescrire certains types de traitement qui, au global, vont nuire à la santé des gens
, fait valoir la Dre Bergeron.
Malgré la pandémie
Même si le réseau est débordé par la pandémie, Sarah Bergeron croit que le travail doit être entrepris dès maintenant.
Le but est vraiment de voir ça de façon globale, dit-elle, comment on peut essayer de moderniser notre réseau de la santé, dans un contexte de pandémie, dans un contexte où les ressources en santé sont vraiment épuisées et d'aller dans cette voie le plus rapidement possible, de ne pas laisser les choses traîner parce que notre réseau de la santé ne sera pas capable de suivre si on n’est pas capable de moderniser tout ça.

La pétition Pour un virage durable du réseau de la santé est en ligne sur le site de l'Assemblée nationale.
Photo : web
Celle qui réside en Matanie, mais qui est médecin de famille au Nunavik, à Puvirnituq, croit toutefois que le ministre doit se doter d’objectifs clairs et mesurables et offrir le soutien adéquat. Si on rajoute un dossier de plus sur les épaules des gens déjà en place, je pense qu’on n’y arrivera pas. Les gens rament déjà à contre-courant en ce moment.
Des modèles
Sarah Bergeron estime que le Québec pourrait s’inspirer de démarches en cours dans d’autres pays, dont la Grande-Bretagne.

Selon la Dre Bergeron, le virage vers une diminution de l'empreinte écologique du réseau sera bénéfique pour la population, mais aussi pour le personnel.
Photo : Getty Images
Le plan anglais vise la carboneutralité d’ici 2040, mais le réseau britannique est déjà engagé dans une démarche de réduction des impacts environnementaux depuis 2008. L’expérience a démontré que les actions pour diminuer l’empreinte écologique du réseau avaient eu, en Grande-Bretagne, des impacts positifs sur le bien-être des travailleurs.
Le but, rappelle la médecin, c’est d’en arriver à un environnement sain qui ne nuit pas à la santé ni des travailleurs ni de la population.
La pétition a recueilli un peu plus de 3360 signatures jusqu’à maintenant. Les organisateurs espèrent que la lettre au ministre Dubé sera envoyée au total par 10 000 personnes.