L’écrivain Neil Bissoondath reçoit l’Ordre du Canada

Neil Bissoondath, écrivain et professeur au département des littératures de l’Université Laval (archive)
Photo : Radio-Canada
Prenez note que cet article publié en 2021 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
La gouverneure générale du Canada a procédé jeudi à 136 nominations à l’Ordre du Canada. Parmi ces nouveaux membres, l'écrivain et professeur à l’Université Laval, Neil Bissoondath, originaire de Trinité-et-Tobago, mais qui demeure à Québec depuis des dizaines d'années.
Qu’est-ce que cette distinction signifie pour vous, dans votre carrière?
N. B. : C’est tout un honneur, une belle reconnaissance de ce que je pense être ma contribution à la littérature canadienne, ce qui vient confirmer tout le travail que j’ai fait en écrivant mes nouvelles et mes romans. J’aime bien penser aussi que c’est une reconnaissance de l’importance de l’imagination, de la création, de la possibilité du roman d’explorer la belle complexité de la vie humaine avec ses mystères, ses imprévisibilités et ses contractions. Tout ça vient confirmer que je n’ai pas perdu mon temps!
À quel point votre expérience personnelle a-t-elle inspiré vos ouvrages?
Je pense que tout ce qu’on écrit vient d’une partie de son vécu, mais également de ses intérêts intellectuels. Cette idée d’appartenance, d'identité, n'appartient pas tout simplement aux immigrants, mais à l’être humain en général. C'est-à-dire, quelqu’un qui est né dans le Nord-du-Québec qui arrive à Montréal va se sentir dépaysé, comme quelqu’un qui est né à Trinité-et-Tobago qui arrive à Toronto.
Je pense que c’est un défi humain, cette idée de Qui-suis-je?
, où est-ce que je me sens chez moi?
Souvent, les réponses ne viennent pas de la tête, mais du coeur. C’est une des raisons qui fait que je suis ici à Québec par exemple.
Vous avez le choix du Québec et de la ville de Québec. Pourquoi?
Il est difficile de savoir pourquoi, mais je peux vous dire que la première fois que j’ai vu la ville de Québec, j’avais le sentiment de me sentir chez moi. C’est le genre de chose qu’on ne peut pas nécessairement décortiquer ou expliquer clairement, mais ça vient des émotions. Beaucoup de ce que je ressens vient jouer beaucoup dans les romans que j’écris. Pour moi, le roman c’est vraiment une exploration, ce n’est pas une recherche de réponses, mais de poser des questions qui font réfléchir.
Vous avez remis en question le multiculturalisme canadien dans votre œuvre la plus vendue, Selling Illusions: The Cult of Multiculturalism in Canada sortie en 1994. Qu’est-ce que ça vous fait de savoir qu’encore aujourd’hui, c'est une œuvre qui marque le gens?
On peut écrire une vingtaine de livres et les gens n’en parlent plus après cinq ans. Je suis ravi que les gens en parlent encore. Je pense que Le marché aux illusions, c’est le titre en français, a joué un rôle important dans la discussion dont on avait besoin au Canada, au Québec, sur l’importance et l’effet du multiculturalisme.

Le Marché aux illusions. La méprise du multiculturalisme, de Neil Bissoondath
Photo : Radio-Canada / Boréal
Moi j’ai toujours pensé dès le début de mon arrivée à Toronto que cette politique me demandait d’être autre chose. Parce que l’être humain est toujours en évolution. On change. Chaque expérience nous change.
Après cinq ans, dix ans au Canada, est-ce que j’étais la même personne que j’avais été à Trinité-et-Tobago? Non. Alors cette idée de rester immigrant, de rester avec sa culture me semblait très faux
. C’était une façon de fausser l’être humain et trahir la complexité humaine.
Avez-vous l’impression d’être chez vous au Canada?
Complètement. Oui, c’est le seul mot qui me vient à l’esprit!
Avec les informations d’Alexandre Duval, à la barre de l’émission de radio Première heure