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Le télétravail pendant la pandémie met de l’avant le droit à la déconnexion

Une mère qui regarde son ordinateur portable alors que son bébé est à côté d'elle.

Les Canadiens qui travaillent à la maison pendant la pandémie doivent concilier les besoins de leur patron et leurs obligations familiales de plus en plus souvent.

Photo : Shutterstock / Carlos G. Lopez

Radio-Canada
Prenez note que cet article publié en 2021 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.

Le télétravail, devenu la norme depuis le début de la pandémie, réduit la frontière entre la vie personnelle et professionnelle. À l'instar de certains pays, des provinces canadiennes songent à implanter le droit à la déconnexion.

C’est très rare que le téléphone de Danish Yusuf sonne pendant sa routine matinale. Il n’a également presque jamais de rencontre de prévue avec ses employés.

Et l’absence d'interruptions tôt le matin n’est pas un accident, selon le directeur de la compagnie d'assurance Zensurance.

Il y a plusieurs années, M. Yusuf a demandé à son personnel de ne pas planifier de réunions ni d’envoyer de messages ou courriels tôt le matin ou après 17 h, pour les encourager à profiter de leurs vies personnelles.

J’ai une fille de trois ans et demi. Personne ne va planifier une rencontre avec moi entre 8 h et 9 h, parce que c’est à ce moment-là que je lui donne son petit déjeuner et que je la dépose à la garderie, explique-t-il.

Mon équipe le sait et c’est quelque chose que mes employés apprécient, ajoute M. Yusuf.

Sa politique a pris une nouvelle importance, alors que les limites entre le travail et la vie personnelle se sont brouillées encore plus pendant la pandémie.

Des travailleurs plus souvent en ligne pendant la pandémie

Les Canadiens qui travaillent à la maison en raison de la pandémie doivent concilier les besoins de leur patron et leurs obligations familiales de plus en plus souvent.

S’éloigner du téléphone ou de l’ordinateur peut s’avérer difficile, puisque plusieurs ne se déplacent plus pour aller au bureau et que les cas de COVID-19 sont encore une fois à la hausse.

En date de février 2021, le nombre moyen d’heures où les travailleurs canadiens étaient branchés à un ordinateur a augmenté de 9 à 11 heures par jour, selon la compagnie de cybersécurité NordLayer.

Plus récemment, un rapport du mois de novembre de la firme en ressources humaines Ceridian a révélé que 84 % des 1304 travailleurs canadiens sondés par Hanover Research se sont sentis épuisés professionnellement dans les deux dernières années.

Et certains ont hâte de voir ces statistiques changer.

Les provinces ne comptent pas attendre Ottawa pour légiférer

En 2016, la France a introduit une loi qui donne aux travailleurs le droit d’éteindre leurs appareils électroniques de travail en dehors des heures de bureau. Cette initiative a inspiré le gouvernement fédéral canadien, qui a commencé à se demander s’il devrait emboîter le pas.

En octobre 2018, un comité devait analyser la question et fournir des recommandations à la ministre du Travail à l’époque, Filomena Tassi, le printemps suivant.

Michelle Johnston, la directrice des communications du nouveau ministre du Travail, Seamus O’Regan, n’a pas confirmé si ces recommandations ont été reçues. Elle a cependant indiqué dans un courriel que le travail dans ce dossier se poursuit.

Mais l’Ontario et le Québec n’attendent pas les règlements fédéraux.

En Ontario, une nouvelle loi sur le droit à la déconnexion a reçu la sanction royale le 2 décembre 2021. Elle oblige les entreprises comptant au moins 25 travailleurs à leur emploi à élaborer des politiques sur la déconnexion du travail dans les 6 prochains mois, sans préciser les scénarios que les entreprises doivent considérer.

Une loi difficile à appliquer

C’est un projet de loi qui paraît bien, mais qui manque de mordant, constate l’avocate de Workly Law Sunira Chaudhri.

Elle croit que la loi sera difficile à appliquer et risque de déclencher des vagues de plaintes auprès du ministère du Travail de la part de personnes effectuant des tâches après la fin de leur quart de travail.

Du côté du Québec, Québec solidaire a présenté en décembre un projet de loi exigeant que les entreprises communiquent chaque semaine les périodes pendant lesquelles un employé a le droit d’être déconnecté de toute communication liée à son travail.

Les employeurs qui ne se conforment pas à cette exigence devraient payer une amende de 100 000 $.

Avant que ces deux provinces considèrent ces nouvelles lois, Mme Chaudhri n’a jamais été interpellée pour rédiger des politiques de déconnexion.

« L’impact d’une politique sur la déconnexion dépend vraiment des employés et s’ils décident de l’appliquer. »

— Une citation de  Sunira Chaudhri, avocate

L’avocate torontoise connaît des entreprises qui ont déjà mis en place des règles concernant les communications liées au travail, mais on lui dit que les employés ont largement ignoré ces politiques.

Le risque avec ces nouvelles politiques, c’est que les employeurs vont les rédiger et ensuite les ranger dans un tiroir, pour ne plus jamais les revoir, explique-t-elle.

Les compagnies devront rédiger de nouvelles politiques

Pour la compagnie d’assurance Zensurance, cette nouvelle loi ne changera pas grand-chose. Ces politiques sont déjà très claires, et la firme torontoise a des travailleurs de garde désignés pour les urgences comme les cyberattaques ou les pannes de système.

Cependant, pour d’autres entreprises qui n'ont aucune politique mise en place, le processus pourrait être complexe.

Ces entreprises doivent déterminer les circonstances dans lesquelles l’interdiction de communication en dehors des heures de travail ne s’applique pas ainsi que penser aux conséquences pour les employés qui ne respectent pas les règles.

Les compagnies devront aussi considérer comment les attentes peuvent varier selon les départements et les secteurs.

Il peut être plus facile pour une personne dans une usine de laisser ses tâches au travail, par exemple, mais plus difficiles pour les travailleurs de la santé, les avocats et les agents immobiliers.

Ces travailleurs sont souvent de garde et pourraient rencontrer des problèmes après les heures de travail qui doivent être réglées dans de courts délais.

« Nous n’avons pas une culture de travail où nos employés sont branchés à leurs téléphones, à côté de leur lit à 21 h. »

— Une citation de  Anthony Kaul, cofondateur de Cloud DX

Le cofondateur de l’entreprise des technologies de santé Cloud DX Anthony Kaul espère toutefois que ces complexités n'empêchent pas les employeurs de mettre de l’avant des attentes en matière de déconnexion.

Pour sa part, il encourage depuis longtemps le personnel de son entreprise à ne pas répondre aux messages du travail après les heures de bureau, à moins que ce soit une urgence que le personnel de garde ne puisse pas gérer.

Notre compagnie vise à améliorer les soins de santé pour tout le monde et ça inclut nos employés, dit-il. Nous ne pouvons pas trop leur demander.

Avec les informations de La Presse canadienne

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