L’élection d’un premier maire innu à Natashquan suscite de l’espoir pour la réconciliation

Henri Wapistan a été élu maire de Natashquan lors de l'élection du 7 novembre 2021.
Photo : Radio-Canada / Daniel Fontaine
Prenez note que cet article publié en 2021 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Pour la première fois à Natashquan, c’est un Innu, Henri Wapistan, qui occupe le poste de maire de la municipalité. Pour certains, ce changement de garde suscite l’espoir d’une meilleure collaboration avec la communauté innue du secteur et le village.
En remportant la course à la mairie, dimanche dernier, Henri Wapistan a créé la surprise.
Le conseil municipal de Natashquan est élu par les habitants du village et par ceux de la communauté innue voisine de Nutashkuan, située à environ cinq kilomètres à l’est du village, où réside le nouveau maire. Celui-ci explique avoir réussi à mobiliser les membres de sa communauté, qui se sont déplacés en grand nombre, selon lui, pour aller voter.
Il voit maintenant son élection comme une chance de bâtir des ponts entre le village et la communauté.
J'aimerais qu'on échange sur nos coutumes entre Natashquan et Nutashkuan, qu’on travaille ensemble dans les différents dossiers, parce qu’il y a du potentiel et si on se chicane, on n’ira pas loin.
Cette envie de rapprochement semble partagée par d’autres élus du nouveau conseil municipal. À ce que je sache, c’est pour les bonnes raisons qu’il a décidé de se présenter, souligne Jacques Tanguay, conseiller municipal. À partir de ce moment-là, l’ensemble des conseillers va travailler avec lui et ça va sûrement donner une vision nouvelle, quelque chose de différent par rapport à ce qu’il y avait autrefois.
Ça peut apporter du mieux, pas juste de se côtoyer et d’être voisin, mais de créer des projets ensemble, pour que les deux communautés en profitent
, ajoute le conseiller Mathieu Vigneault, nouvellement élu.

Mathieu Vigneault est conseiller municipal à Natashquan.
Photo : Radio-Canada / Daniel Fontaine
Malgré tout, l’élection d’Henri Wapistan à la mairie de Natashquan soulève des questions auprès d'habitants de la municipalité.
L'hypothèse qu'un jour le conseil municipal pourrait être formé à la majorité par des membres de la communauté de Nutashkuan, qui habitent en dehors du village et qui sont plus nombreux que les électeurs allochtones, fait réagir.
Mettons que ça donne un grand coup, illustre Jacques Tanguay. Ce n'est pas une évolution, c’est une révolution. On voyait ça venir, mais on ne pensait pas que ça arriverait de si tôt.

Jacques Tanguay est conseiller municipal à Natashquan.
Photo : Radio-Canada / Daniel Fontaine
L’élection de Henri Wapistan a démontré un intérêt et une participation nouvelle de la communauté aux élections municipales.
Appelé à commenter la situation, le professeur à l’École d’administration publique et ancien ministre des Affaires municipales du Québec, Rémy Trudel affirme, pense que si l'inquiétude soulevée ici n’est pas prise au sérieux, les relations entre les deux communautés pourraient s’effriter. Il appartient selon lui au gouvernement de trouver un compromis.

Rémy Trudel, ancien ministre du Parti québécois et professeur invité à l'École nationale d'administration publique (ÉNAP)
Photo : Radio-Canada
Il y a une responsabilité supérieure là-dedans, de lancer le mouvement de réflexion et de découverte des pistes qui appartient au ministère des Affaires municipales et autochtones. Il faut que le mouvement soit lancé. N’attendons pas que les appréhensions se détériorent à un point tel que ça dégénère dans quelque chose d’autre qui n’est pas souhaitable,
déclare-t-il.
Les ministères des Affaires municipales et des Affaires autochtones n'ont pas encore réagi à ce sujet.
Les élus locaux se veulent toutefois rassurants. Selon les conseillers et le nouveau maire, l’interdépendance des deux communautés n’est plus à démontrer à Natashquan et le visage de la nouvelle administration municipale en est une preuve tangible.
D'après un reportage de Félix Lebel