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Discrimination envers les Inuit aux Centres Batshaw : Lionel Carmant promet d’agir

Lionel Carmant devant un drapeau du Québec, en conférence de presse

Lionel Carmant est ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux.

Photo : Radio-Canada / Sylvain Roy Roussel

La Presse canadienne
Prenez note que cet article publié en 2021 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.

Le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, Lionel Carmant, entend ramener à l'ordre les Centres de la jeunesse et de la famille Batshaw, qui continuent d'agir d'une manière jugée inacceptable avec les jeunes Autochtones qui leur sont confiés.

La semaine dernière, la directrice générale du Refuge pour femmes autochtones de Montréal (Native Women's Shelter of Montreal), Nakuset, annonçait qu'elle cessait toute collaboration avec la direction des Centres Batshaw en raison de leur refus de corriger des pratiques qu'elle assimile à du racisme systémique.

Les Centres Batshaw sont responsables de la prise en charge des jeunes anglophones de l'ouest de Montréal qui leur sont confiés par la Direction de la protection de la jeunesse. Ils accueillent également les jeunes inuit du Nunavik, où d'importantes carences de ressources et de services en matière de protection de la jeunesse entraînent leur transfert à Montréal.

Interdiction de parler dans leur langue maternelle

Le traitement des jeunes inuit dans les Centres Batshaw a maintes fois été décrié, la plus récente dénonciation provenant d'un rapport d'enquête de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJQ), en mai dernier.

Celui-ci faisait état de nombreux griefs, notamment une interdiction faite aux enfants autochtones et à leurs mères de communiquer dans leur langue maternelle; le manque d'accès aux services d'éducation et l'absence d'intervenants et d'outils adaptés à leur culture et d'interprètes.

En entrevue avec La Presse canadienne, le ministre Carmant a indiqué qu'il entendait rencontrer prochainement les dirigeants du CIUSSS de l'Ouest-de-l'Île-de-Montréal, de qui relèvent les Centres Batshaw.

Le rapport de la Commission ne venait qu'ajouter aux griefs qui s'empilent depuis des années au sujet du traitement des jeunes autochtones dans cette institution. Malgré les promesses répétées du CIUSSS et des Centres Batshaw, rien n'a changé, selon Nakuset, qui décrit un manque de volonté flagrant.

Les Centres de la jeunesse et de la famille Batshaw fournissent des soins à Montréal.

Les Centres de la jeunesse et de la famille Batshaw fournissent des soins à Montréal.

Photo :  CBC

On fera ce qu'il faut faire

Le ministre n'a pas caché une certaine irritation puisque cette question a été soulevée à maintes reprises dans le passé. Nous étions déjà intervenus dans le passé sur ce sujet-là et je vais répéter le même message qu'on ne peut pas empêcher les gens de communiquer dans leur langue maternelle.

La CDPDJQ avait d'ailleurs rappelé dans son rapport la nécessité de la réaffirmation du droit des jeunes Inuit de parler librement leur langue maternelle lorsqu'ils sont hébergés en centre de réadaptation.

Lionel Carmant a indiqué que son collègue responsable des Affaires autochtones, Ian Lafrenière, était également saisi de cette situation.

Bien qu'il souhaite d'abord prendre connaissance des faits plus en profondeur, le ministre a affirmé que si jamais la situation perdure, on fera ce qu'il faut faire pour que ça se corrige. Il n'a pas voulu s'avancer, toutefois, sur d'éventuelles sanctions à imposer en cas de résistance en interne.

Le CIUSSS nie tout en bloc

Le ministre Carmant risque toutefois d'avoir du mal à obtenir des explications. Jointes en fin de journée lundi, les responsables au CIUSSS de l'Ouest-de-l'Île-de-Montréal ont nié en bloc les affirmations de Nakuset.

Ça n'a jamais existé. Il n'y a jamais eu d'interdiction de conversation entre les parents et leurs jeunes ou entre les jeunes en centre de réadaptation dans leur langue maternelle. On n'a aucune idée d'où vient cette perception, a affirmé la directrice de la protection de la jeunesse, Linda See.

Sa collègue Katherine Moxness, directrice des programmes jeunesse au CIUSSS, a toutefois ajouté cette nuance : Si on a un adolescent qui parle en inuktitut et qui a des propos de suicide ou des propos de planification de fugue, un autre adolescent inuit pourrait nous informer et nous demander de l'aide et là, pour soutenir ces deux jeunes-là [...] on va leur demander de façon temporaire et exceptionnelle de communiquer avec nous en anglais pour gérer la situation de crise. À part ces moments, tous les jeunes ont le droit de parler autant en espagnol, en inuktitut, en français, en anglais, comme ils veulent. S'ils ne se mettent pas en danger, il n'y a aucune exception, a-t-elle précisé, faisant valoir qu'il s'agit d'une question de sécurité.

Pour l'instant, toutefois, on n'a pas de plainte, on n'a pas d'enquête en cours. Notre politique est claire [...] Les allégations qui ont été faites, pour nous, on n'a aucun fait saillant pour les soutenir. On ne tolère pas ce manque de respect dans notre politique, a ajouté Mme Moxness.

Quant à l'accès à l'éducation en anglais, elle a expliqué qu'après 25 ans de difficultés administratives liées aux dérogations requises pour accéder à l'école anglaise, la situation a été résolue cette année.

« Cette année, au mois de septembre, tous les jeunes ont pu être admissibles pour entrer en milieu scolaire anglophone. Ç'a pris un partenariat important avec les milieux scolaires dans le Grand Nord, avec nos partenaires de la régie régionale du Nunavik et nous-mêmes, et le ministère de l'Éducation pour rendre la situation plus simple parce que ça exige énormément de documentation pour avoir une dérogation. »

— Une citation de  Katherine Moxness, directrice des programmes jeunesse au CIUSSS de l'Ouest-de-l'Île-de-Montréal

Difficulté à pourvoir des postes

Le réseau de protection de la jeunesse du CIUSSS n'a pas d'interprètes inuit à son emploi, a-t-on reconnu, mais a accès à une banque d'interprètes gérée régionalement.

Aussi, deux postes ont été ouverts pour des professionnels inuit qui agiraient auprès des travailleuses sociales et des équipes d'intervention, mais le CIUSSS s'est heurté à une réalité bien connue. Ça fait presque un an qu'on a ouvert ces postes [...] et on a du mal à les combler. On s'est tournés vers nos partenaires pour nous aider à les combler. C'est vraiment un problème. C'est clair qu'on veut avoir des gens des communautés inuit et autochtones pour pourvoir ces postes, mais c'est très difficile, avoue Linda See.

De même, le reproche qui leur a été fait de ne pas avoir traduit le code de vie des établissements en inuktitut tient toujours. Nous sommes en train de le faire. Ce n'est pas terminé encore, a reconnu Mme See.

Les deux femmes se désolent par ailleurs de voir Nakuset claquer la porte. C'est dommage que Nakuset nous ait quittés. Elle a offert une contribution importante à notre établissement, a dit Mme Moxness, rappelant toutefois que le CIUSSS compte toujours d'autres partenaires à la table, notamment la Société Makivik et la Southern Quebec Inuit Association.

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